Quels sont au juste les droits, les pouvoirs et les devoirs des parents? La question peut paraître oiseuse: depuis la première caverne, l'être humain sait à peu près ce qu'il convient de faire pour élever ses petits. Pourtant, l'État jongle de plus en plus avec les prérogatives parentales.

De sorte qu'il faudra bientôt se demander aussi: jusqu'où vont les droits, les pouvoirs et les devoirs de l'appareil étatique par rapport aux enfants?

 

«Comment deux parents qui aiment leur enfant peuvent-ils confier à un parfait étranger (même s'il porte une toge et qu'on l'appelle Votre Honneur) la tâche de décider de la vie, de la santé, de l'éducation, des loisirs et du temps qu'aura cet enfant avec chacun d'eux? Quelle personne sensée pourrait défendre cette méthode?» demande le juge ontarien Harvey Brownstone dans Tug of War (traduisible en l'occurrence par La joute guerrière).

Le juge a officié pendant 14 ans à la Cour de la famille. Il dit aujourd'hui: «Ce tribunal n'est pas bon pour les familles.»

Voyons voir.

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Comment un juge de Toronto peut-il confier la garde exclusive d'une enfant de 9 ans à sa mère, rayant ainsi définitivement le père de sa vie? Et ce, même s'il a été prouvé que la mère avait installé la haine du père chez sa fille et littéralement kidnappé celle-ci pour l'emmener à l'autre bout du monde, où la GRC l'a retrouvée? «Les revenus du père sont peu élevés, sans comparaison avec ce que la mère peut offrir en Arabie Saoudite», explique le magistrat, qui n'a trouvé aucune faute chez le père autre que sa modeste situation.

Cette décision envoie un message troublant, c'est le moins qu'on puisse dire.

Comment, à Winnipeg, l'État peut-il réclamer la «saisie» de deux enfants pour cause non pas de maltraitance, mais de déviance idéologique chez leurs parents? Certes, le discours de ceux-ci est répugnant: ce sont des racistes avoués, version lourde. Mais d'autres dadas parentaux peuvent aussi être vus comme nocifs: on pense tout de suite aux fondamentalistes religieux de toutes obédiences.

Or, si on en arrive là, on imagine le nombre de bambins dont l'État pourra revendiquer la garde...

Deux instances judiciaires, la Cour supérieure et la Cour d'appel, se sont prononcées à tour de rôle pour casser la décision d'un père de l'Outaouais qui avait puni sa fille de 12 ans en la privant d'un voyage scolaire... qu'elle a entre-temps effectué.

Cela donne un sens nouveau à la menace d'un enfant qui hurle à ses parents: «Je vais appeler la DPJ!» (la Direction de la protection de la jeunesse)...

C'est de plus en plus difficile d'être parent, on le sait. Pourquoi alors serait-ce plus facile pour l'État? Son intrusion croissante dans l'intimité familiale devrait être la plus limitée possible: elle n'est pas sans danger.

mroy@lapresse.ca