J'ai dit hier dans le journal ce que j'avais à dire sur le travail de Bob Gainey. Personnellement, j'estime que les partisans auraient plus de chances d'encourager une grande équipe avec un autre directeur général. Mais il est évident que Gainey a décidé de rester à son poste de directeur général et peut-être d'entraîneur, et ce sera maintenant à Pierre Boivin et George Gillett de prendre la décision finale sur sa situation dans l'organisation.

C'est d'ailleurs la première fois depuis qu'il s'est offert pour prendre le poste de directeur général d'André Savard que Gainey met un bémol dans une réponse. Il a affirmé hier qu'il ne pouvait confirmer son retour tant que ses patrons n'auraient pas pris leur décision à son sujet. Auparavant, Gainey ne se préoccupait absolument pas des états d'âme de Pierre Boivin, son patron direct selon l'organigramme.

Par contre, je sais que Pierre Boivin ne donnera plus jamais carte blanche à Gainey. Il va falloir que ces deux-là s'expliquent et que M. Boivin fasse connaître ce qu'il attend exactement de son employé. Va-t-il exiger davantage de respect envers les fans et les gens de hockey issus de la société québécoise?

Par ailleurs, dans sa façon de ne pas répondre, Gainey a confirmé qu'il avait promis yeux dans les yeux, deux semaines avant de crucifier Guy Carbonneau, qu'il démissionnerait plutôt que de le congédier. C'est lui qui doit maintenant vivre avec sa trahison.

Et il a confirmé un scoop de Mathias Brunet à propos de Vincent Lecavalier. Malheureusement, je serais surpris que Lecavalier accepte de venir s'enterrer dans une organisation qui ne sait même pas quels joueurs elle mettra sur la glace la saison prochaine.

***

Ce fut une conférence de presse teintée de rose. Tout va bien et tout s'explique. Tant mieux pour les partisans, qui devront sans doute vivre une autre saison de misère l'an prochain.

Rien n'est réglé. Le Canadien est toujours à vendre, le processus progresse, mais en attendant qu'on y voie plus clair, personne ne se retrouve vraiment dans une situation pour prendre des décisions vitales pour l'organisation. Rien ne garantit que Pierre Boivin et Bob Gainey seront encore des dirigeants du Canadien dans six semaines. Ça complique le travail de Pierre Boivin, nul ne peut le nier.

Cela dit, si je faisais confiance à l'équipe de direction hockey, je pourrais espérer une bonne tournure des événements. Le directeur général du Canadien va sans doute perdre Lang, Schneider, Dandenault, Koivu et quelques autres. Mais en même temps, il va se retrouver avec une vingtaine de millions pour attirer quelques bons joueurs. Le problème, c'est que Mats Sundin, Daniel Brière, Brendan Shanahan l'ont montré: les vrais joueurs autonomes de qualité ne veulent rien savoir de cette organisation et de Montréal.

Ça veut dire que Trevor Timmins va repêcher d'autres joueurs moyens et médiocres en Sibérie, que de rares joueurs moyens vont accepter une offre de Gainey s'il est encore en poste, et que le Canadien va rester une équipe moyenne et parfois médiocre. Et que les Québécois vont continuer à se faire bouchonner par l'organisation de leur ville et de leur province. Mais c'est sans doute ce que vous voulez puisque vous avez une si grande capacité de tolérance.

***

Quelques mots sur Carey Price. Je sais qu'il n'a que 21 ans et qu'il subit une pression énorme. Mais il peut compter sur la confiance totale et absolue de son entraîneur et de son directeur général. Combien d'athlètes ont pu se sentir autant supportés que Carey Price?

Je sais aussi que c'est un jeune de la nouvelle génération de la casquette. Mais hier, j'aurais apprécié qu'on puisse voir ses yeux quand il est venu rencontrer les journalistes. Si on enlève ses lunettes fumées quand on s'adresse à un douanier par politesse, il me semble que les centaines de milliers de fans qui ont suivi le point de presse à la télé auraient mérité de jauger la sincérité de ses réponses en voyant son regard.

Pensez-vous que Patrick Roy n'aurait pas regardé ses interlocuteurs droit dans les yeux à 21 ans?

Il ne faudrait pas que la seule imitation de Casseau que puisse faire Carey Price soit de lever les bras en l'air pour envoyer promener la foule. On devrait avoir droit à quelques jours de tranquillité mais, dans une semaine à peine, la saga va reprendre.

Si Bob Gainey reste à son poste, il faudra cependant faire comme Pierre Boivin. Lui retirer sa carte blanche. Votre confiance, ça se mérite!

«On a vécu trois saisons de Lance et compte en une seule année... Il n'y a pas eu une semaine où l'équipe n'a pas donné de quoi parler aux médias.»