Le Trésor britannique n'a pu placer la totalité d'une émission obligataire la semaine dernière, une rebuffade gênante et troublante pour un pays en proie à une grave récession. C'est aussi un avertissement pour les autres États qui cherchent à financer de coûteux plans de relance.

Des vandales ont brisé des fenêtres et endommagé une luxueuse Mercedes, mercredi dernier, au domicile écossais de Fred Goodwin, l'ancien patron de la Royal Bank of Scotland.

 

D'aucuns soupçonnent que le banquier, qui a soulevé un tollé en refusant de renoncer à une forte retraite même si l'État a dû renflouer sa banque, a été la cible de citoyens en colère.

Or, ce cher M. Goodwin n'est pas le seul symbole de la finance britannique qui reçoit des taloches ces temps-ci. Le même jour, le grand argentier du Royaume-Uni a eu droit à une rebuffade peu ordinaire.

Le Trésor anglais n'a pu placer que 93% d'une émission de gilts (nom familier des obligations du gouvernement britannique) à 40 ans. Sur une émission de 1,75 milliard de livres (3,2 milliards $CAN), seul 1,6 milliard ont trouvé preneurs.

Les financiers appellent ça un échec, le premier du genre pour les Brits en neuf ans. Mais surtout, cela n'est pas de bon augure pour la suite des financements de l'État à un moment critique.

Londres prévoit émettre pour 146 milliards de livres sous forme de dettes en 2009 et autant en 2010. Le but: financer un lourd déficit et des mesures de relance visant à sortir le pays de sa pire crise économique depuis les années 80.

3 millions de chômeurs

Le Royaume-Uni s'enfonce dans une crise grave.

Le nombre de chômeurs au Royaume-Uni a dépassé les 2 millions en janvier, une première en 12 ans, et la barre des 3 millions est en vue.

Le Fonds monétaire international (FMI) vient de réduire sa prévision. Il mise désormais sur une contraction de 3,8% de l'économie britannique cette année et encore de 0,2% en 2010. Parmi les pays riches, seul le Japon ferait pire.

Aussi, l'émission ratée de gilts semble avoir secoué le gouvernement de Gordon Brown. À tel point que, selon la presse britannique, le premier ministre renoncerait à un second plan de relance dans l'immédiat, après les 20 milliards de livres (36 milliards $CAN) injectés en novembre.

De toute façon, M. Brown était presque seul à défendre cette idée. La Banque d'Angleterre est même sortie de sa réserve, la semaine dernière, pour avertir le gouvernement de ses excès financiers.

Car les risques d'une crise budgétaire sont bien réels au royaume d'Élisabeth II. Cette année, le déficit public atteindra 11% du produit intérieur brut -l'un des taux les plus élevés du G20, selon le FMI.