On les compte aujour-d'hui par dizaine de milliers. Des investisseurs plumés. Des retraités paumés. Des propriétaires lourdement hypothéqués. Des consommateurs surendettés. Des travailleurs remerciés... Le Canada a basculé dans la récession à cause de la crise financière.

Et dire qu'en juin dernier, il y a donc neuf mois exactement, tout semblait encore aller sur des roulettes au Canada, et ce, en dépit des signaux d'alarme qui nous provenaient des États-Unis et de l'Europe.

 

Ici, dans le «plus beau pays du monde», l'optimisme battait encore son plein. On se sentait riche comme Crésus. D'ailleurs, seule la Bourse canadienne trônait à la hausse alors que tous les marchés boursiers de la planète commençaient à éprouver de sérieuses difficultés.

On se contemplait dans l'irréel d'une richesse artificielle, gonflée à bloc par une Bourse à son zénith de la spéculation.

La réalité de la crise financière nous a malheureusement rattrapés. Et pour en «apprécier» le juste impact sur nos finances personnelles, voici une comparaison entre les statistiques financières qui dominaient la scène économique en juin dernier et celles d'aujourd'hui.

Début juin 2008. La Bourse canadienne, à son sommet historique, dépasse la barre des 15 000 points. Les titres des secteurs des matériaux, de l'industrie, de l'énergie, des technologies de l'information et des services publics gravitent près de leurs sommets des 52 semaines précédentes.

1100 milliards partis en fumée

La Bourse canadienne a fondu depuis juin dernier de 50%. Nous avons collectivement perdu 1100 milliards de dollars au seul chapitre de la valeur boursière des compagnies inscrites à la Bourse de Toronto. Pour vous dire l'ampleur des pertes, sachez qu'elles équivalent à 69% du PIB du Canada en 2008, lequel s'élevait à 1600 milliards. Quels secteurs ont essuyé les plus lourdes pertes? Les institutions financières ont chuté en moyenne de 50%, les pétrolières de 60%, les technos de 60%, les compagnies de services publics de 30%, les industrielles de 45%, le secteur des matériaux de 40%.

En juin, le baril de pétrole dépasse momentanément les 140$US, pour se diriger vers le prix record de 146$US. Le prix de l'essence fait la manchette quotidienne alors qu'on se plaint en faisant le plein à 1,35$ le litre, même à 1,50$ à certains endroits.

Aujourd'hui, le baril de pétrole a toutes la misère du monde à se maintenir au-dessus de la barre des 40$US. Au grand dam de l'Alberta et de ses sables bitumineux, le pétrole s'est écroulé de 73%. À la pompe, la baisse n'a toutefois pas suivi le même rythme. Un litre d'essence coûte actuellement autour de 88 cents, soit environ 37% de moins qu'en juin dernier.

Cherchez l'erreur: le baril de pétrole s'effondre de 73% et les pétrolières nous refilent seulement la moitié de la baisse!

Juin 2008. Le TD Commodity Price Indices (TDCI), soit l'indice du marché des produits de base (énergie, métaux de base, métaux précieux, produits agricoles, produits forestiers, etc.) se rapproche de son sommet (413 points). Neuf mois plus tard, il affiche un recul de 50%. Pour un pays riche en ressources naturelles, c'est catastrophique.

Passons maintenant au dollar canadien. Début juin 2008, il vaut 1,02$US. Les exportateurs canadiens s'arrachent les cheveux. Aujourd'hui, le dollar canadien s'échange à 78 cents US, en chute de 24%. C'est bon pour les exportateurs... Le problème? Les États-Unis sont en grande récession, ce qui se répercute forcément sur nos exportations.

Les taux d'intérêt? De juin 2008 à aujourd'hui, le taux directeur de la Banque du Canada est passé de 3% à seulement 0,5%. Pendant ce temps, le taux préférentiel, celui que les banques offrent à leurs meilleurs clients, recule de 4,75% à 2,5%.

Les institutions bancaires offrent maintenant des hypothèques de cinq ans à un taux moyen de 5,79%, à comparer à un taux de 6,7% en juin dernier. Quant au rendement des certificats de placement garantis (CPG) de cinq ans, il a reculé de 3%, en moyenne, à 2,1%.

Et combien d'emplois a-t-on perdus en neuf mois? On en a perdu 149 000 au Canada, le taux de chômage grimpant d'un point de pourcentage à 7,2%. Au Québec, on se retrouve avec un taux de chômage en hausse d'un demi-point de pourcentage, à 7,7%, et 26 700 emplois de moins.

Comme vous pouvez voir, beaucoup de changements sont survenus depuis neuf mois.

Toutefois, il y a un secteur où le statu quo fait office de solidité. C'est au chapitre des taux d'intérêt des cartes de crédit courantes et des services publics. Baisse de taux directeur ou pas, pas de changement.

Sur les soldes des cartes de crédit courantes, telles Visa et Mastercard, les institutions bancaires continuent d'exiger des consommateurs retardataires un taux d'intérêt oscillant entre 18,5% et 19,9%. Du côté des services publics, les intérêts vont de 14,4% (Hydro-Québec) à 26,8% pour Bell Canada, en passant par 19,5% pour Vidéotron et Gaz Métro.