Dans quel secteur la Caisse de dépôt et placement du Québec a-t-elle vraiment échoué en 2008? Dans le secteur des actions, tant en Bourse que dans ses placements privés.

Ce fut carrément la catastrophe. Les gestionnaires des portefeuilles d'actions (cotées et privées) de la Caisse ont accumulé des pertes nettes de 36,6 milliards de dollars. Cette somme comprend une somme de 22,9 milliards au chapitre des pertes matérialisées à la suite de la revente des actions et un montant de 13,7 milliards de moins-values sur les actions conservées en portefeuille.

 

Ces pertes de 36,6 milliards sur actions ne représentent rien de moins que 80% de toutes les pertes déclarées par la Caisse dans ses divers portefeuilles à rendement négatif, soit actions, immobilier, papier commercial et produits dérivés.

Pour démontrer à quel point les gestionnaires des portefeuilles d'actions de la Caisse ont dramatiquement raté leur coup en 2008, il suffit de remettre en perspective l'ampleur de ces pertes par rapport à la valeur de ces mêmes portefeuilles d'actions au 31 décembre 2007.

Les portefeuilles d'actions (cotées et privées) de la Caisse avaient en début d'année une valeur globale de 72,6 milliards de dollars. Par extrapolation, les pertes encourues (36,6 milliards) en cours d'année représentent ainsi 50% de cette valeur initiale.

C'est tout simplement une contre-performance catastrophique par rapport à la chute des indices de référence. Les marchés boursiers ont certes connu en 2008 des reculs majeurs mais tout de même pas de cette ampleur.

Un rappel de la contre-performance des grands indices boursiers s'impose. L'indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto a reculé de 33,0% en 2008. L'indice le plus représentatif de la Bourse américaine, soit le S&P 500 de la Bourse de New York, a chuté pour sa part de 37% (en dollars américains), mais «seulement» de 22,6% en dollars canadiens (en raison de sa dévaluation). Au chapitre des autres Bourses étrangères, l'indice MSCI EAEO a reculé de 43,4% en dollars américains et de 29,2% en dollars canadiens.

Autre facteur à considérer. La perte de 50% du secteur actions de la Caisse (par rapport à la valeur initiale des portefeuilles d'actions en début d'année) s'explique probablement par la surpondération des portefeuilles de la Caisse dans des entreprises lourdement plus touchées par la crise financière que la moyenne.

Des lecteurs se demandent sans doute comment il se fait que la Caisse avait tant d'argent (72,6 milliards) d'investi dans les actions en début d'année 2008. La Caisse, faut-il le rappeler, ne se contente pas d'investir strictement les épargnes que lui confient ses déposants. La Caisse «joue» avec l'effet de levier, en utilisant notamment sa capacité d'emprunt pour investir davantage. Lors des années lucratives, cette stratégie à effet de levier s'est avérée nettement profitable pour les déposants de la Caisse. Mais quand l'année se termine dans la déconfiture, l'effet de levier se retourne contre vous et amplifie vos pertes. Comme ce fut le cas en 2008.

Et Quebecor Media?

Où en est rendue la Caisse de dépôt et placement du Québec avec son plus gros investissement de tous les temps, soit les 3,2 milliards de dollars qu'elle a investis dans la création de Quebecor Media? Il lui reste à vrai dire encore beaucoup de chemin à parcourir avant de récupérer sa grosse mise de fonds.

En date du 31 décembre 2008, la Caisse attribue à son investissement dans Quebecor Média une valeur marchande de seulement 1,5 milliard, soit 663 millions de moins que l'année précédente.

Cette dévaluation de 31% survient alors que Quebecor Media présentait en 2008 une augmentation respective de ses revenus et de son bénéfice d'exploitation de 10,8% et de 16,2%.

«Dans le cadre de l'évaluation annuelle de certains placements privés réalisée par une firme indépendante, cet investissement a été ajusté à la baisse en raison de la chute généralisée de la valeur des sociétés comparables cotées en Bourse. Dans ce contexte, explique la Caisse, il faut comprendre que l'amélioration de la rentabilité de la société et les flux monétaires générés n'ont pas permis d'éviter la baisse de l'évaluation de l'investissement.»

Ce placement de 3,2 milliards dans Quebecor Media a été effectué en 2000, sous l'ancienne direction du tandem Jean-Claude Scraire et Michel Nadeau. Ce méga investissement avait été effectué en pleine bulle spéculative des titres de haute technologie et des communications. Donc, à très gros prix.

Pas surprenant qu'après huit ans, la Caisse accuse encore une perte sur papier de 1,7 milliard de dollars avec son investissement dans Quebecor Media, dont elle détient 45,3% des actions.

Une suggestion. Vu l'implication financière de la Caisse, peut-être qu'elle pourrait exercer un petit peu de pression morale sur la direction de Quebecor Media et ses employés du Journal de Montréal pour qu'ils mettent fin au plus sacrant à leur conflit. Ce qui pourrait donner une sacrée «Bonne nouvelle TVA».