L'an dernier, le gouvernement québécois adoptait une loi pour interdire la malbouffe dans les écoles. Un an plus tard, il fait un pas en avant et lance un programme sur l'alimentation dans les écoles primaires et secondaires, l'École en santé.

Cette approche, conçue par l'Institut national de santé publique du Québec et mise en oeuvre par les ministères de la Santé et de l'Éducation, a déjà été implantée dans des centaines d'écoles québécoises et devrait se répandre à la grandeur de la province.

 

L'idée est excellente. La lutte contre l'obésité est devenue un véritable enjeu de santé publique. Or, on aura beau bannir les gras trans et les aliments nocifs, rien ne remplace l'éducation.

L'approche de l'École en santé - qui fait de l'alimentation un thème qu'on peut étudier aussi bien en français qu'en mathématiques - est d'autant plus intéressante qu'elle est flexible. Pas question d'imposer un programme soviétique aux écoles. C'est un outil que les enseignants peuvent adapter à la réalité de leur classe.

Cette flexibilité s'impose quand on sait que les enfants sont inégaux devant le frigo: à 5 ans, certains enfants mangent des sushis alors que d'autres voient rarement des légumes dans leur assiette. Dans un tel contexte, les enseignants doivent pouvoir s'adapter.

L'idée d'éduquer les jeunes à l'alimentation est d'autant plus séduisante qu'on souhaite insister sur l'aspect pratico-pratique. C'est bien beau les principes mais il n'y a rien comme tenir un couteau et préparer un repas pour intéresser les jeunes. Le concret, ça fonctionne.

Une heureuse initiative, donc, qui devrait être accompagnée d'un sérieux coup de barre dans les écoles québécoises.

En effet, pour que les écoles soient vraiment cohérentes avec les objectifs du ministère de l'Éducation, il faudrait penser aux conditions dans lesquelles les jeunes passent l'heure du dîner. Dans bien des cas, elles sont désastreuses.

Il y a quelque chose de paradoxal à parler de l'importance de l'alimentation de 11h à midi, puis de presser les enfants à avaler leur lunch de midi à midi et quart.

Combien d'écoles primaires québécoises confinent les enfants dans leur salle de classe à l'heure du lunch? Et on ne parle pas d'écoles de milieux défavorisés. Est-ce que les fonctionnaires du ministère de l'Éducation apprécieraient devoir manger leur lunch à leur bureau TOUS les midis? C'est pourtant ce qu'on impose à des centaines d'enfants parce que les écoles n'ont pas de salles à manger et qu'elles ne veulent pas utiliser le gymnase, réservé à d'autres activités.

Toujours au primaire, certaines écoles divisent les élèves en deux groupes: pendant qu'on dit au premier de se dépêcher de manger, on demande à l'autre de patienter. Résultat: une fois assis, les élèves du second groupe dévorent leur lunch en quelques minutes tellement ils ont faim. Est-ce que ce sont des conditions qui favorisent une bonne alimentation? Absolument pas.

Bien sûr, on rêve tous que nos enfants jardinent des légumes qu'ils cuisineront dans une grande cuisine ensoleillée, en compagnie d'un chef pédagogue. Mais assurons-nous également que nos écoles permettent aux enfants de manger calmement, dans un environnement qui favorise le plaisir, plutôt que de les presser pour qu'ils terminent leur lunch...

nathalie.collard@lapresse.ca