La Caisse de dépôt et placement du Québec va bientôt nous dévoiler son piètre bilan de l'année 2008. Que l'ex-grand manitou de la Caisse, Henri-Paul Rousseau, et son équipe de gestionnaires de portefeuille viennent s'expliquer devant une commission parlementaire, cela nous donnerait un sacré bon show. De divertissement, s'entend. Côté «finances 101», ça risque de voler très bas.

Je vois d'ici les ténors du PQ et de l'ADQ passer Rousseau et ses collègues à la moulinette en les qualifiant de mauvais gestionnaires et de spéculateurs éhontés... pour avoir investi dans des aéroports étrangers, dans le controversé papier commercial, dans des hedge funds, dans les Bourses étrangères, etc.

 

Et le clou du spectacle? Les critiques du PQ et de l'ADQ accuseraient Henri-Paul Rousseau et les dirigeants de la Caisse d'avoir négligé le Québec au profit des entreprises étrangères.

La grande question: sous le règne d'Henri-Paul Rousseau, soit de 2003 à 2008, aurait-il été plus rentable pour la Caisse de privilégier nettement les entreprises québécoises au lieu d'investir massivement dans les sociétés canadiennes et étrangères?

Le 31 décembre 2007, l'actif en capital-actions de la Caisse dans les entreprises québécoises s'élevait à 12,1 milliards de dollars, dont 5 milliards dans des entreprises fermées, 4,7 milliards dans des sociétés immobilières et 2,4 milliards dans les entreprises québécoises cotées en Bourse. Cela représente 12,7% de l'actif (valeur marchande de 95,3 milliards) que la Caisse détenait à la fin de 2007 en capital-actions dans l'ensemble de ses portefeuilles d'entreprises privées et d'entreprises boursières, au Canada et à l'étranger.

Une parenthèse: le reste (une valeur marchande de 127 milliards) du portefeuille de la Caisse est investi dans des obligations, des financements hypothécaires, etc. Dans ce volet, les placements québécois comptaient pour 20,2%, soit une valeur marchande de 25,7 milliards à la fin de décembre 2007.

Revenons à nos placements dans le capital-actions des entreprises. Pour comparer des pommes avec des pommes, j'ai analysé la performance de divers indices boursiers. Mon analyse porte sur les six années de la période du règne d'Henri-Paul Rousseau. Pour simplifier le tout, je m'en suis tenu au rendement cumulatif que les indices ont obtenu au cours de cette période de référence. Mise en garde: même s'ils ne reflètent pas la performance exacte des entreprises privées, les indices boursiers peuvent servir d'indicateur d'évaluation marchande.

Commençons par les deux grands indices des Bourses étrangères. Le MSCI Monde a rapporté, en dollars US, un rendement cumulatif de 47% au cours des six dernières années et le MSCI EAEO, un rendement de 66,6%.

Du côté de la Bourse américaine, l'indice le plus représentatif, soit le S&P 500 de la Bourse de New York, a accumulé un rendement total de 28,7%.

Au Canada, le S&P/TSX Composite s'en tire avec un rendement cumulatif de 59,4% après six ans.

Comment ont évolué les entreprises québécoises au cours de cette même période? Il existe deux indices boursiers qui reflètent bien la performance boursière des entreprises québécoises, soit le IQ-30 et le IQ-120. Ils ont été mis au point par le Centre d'analyse et de suivi de l'Indice Québec, un partenariat entre le département de finance de l'Université de Sherbrooke et l'Institut de recherche en économie contemporaine.

L'indice IQ-30 représente la performance boursière des 30 plus grandes sociétés qui ont leur siège social au Québec, comme BCE, Power Corporation, Jean Coutu, Banque Royale, Banque Nationale, Transcontinental, Saputo, SNC, Rona, Quebecor, Transat, CN, Industrielle-Alliance, Bombardier, Domtar, Banque Laurentienne, etc.

En plus de ces titres québécois à forte capitalisation, l'indice IQ-120 regroupe 90 autres titres de sociétés québécoises inscrites à la Bourse de Toronto.

Pour les six dernières années, le rendement cumulatif de l'indice IQ-120 s'élève à seulement 9,7% et celui de l'indice IQ-30, à 4,8%. Autant dire que les entreprises québécoises de la Bourse ont fait du surplace au bout de ces six années du règne d'Henri-Paul Rousseau.

C'est donc une nette contre-performance québécoise par rapport aux grands indices internationaux. Et même par rapport aux autres indices provinciaux. L'indice ontarien IO-40 (les 40 grandes sociétés ontariennes) a progressé de 32,7% pendant cette période. La meilleure performance provinciale revient à l'indice des Prairies IP-10, avec un rendement total de 129%. Suivent l'indice albertain IAB-25 avec un gain de 79,6%; l'indice Atlantique avec une hausse de 40,2% et l'indice de la Colombie-Britannique, avec un gain de 25,3%.

Vive la Caisse... libre!

P.-S. Avis aux critiques péquistes et adéquistes: il serait malvenu d'accuser Henri-Paul Rousseau d'être une marionnette libérale... puisqu'il a été embauché sous le gouvernement péquiste de Lucien Bouchard et de son ministre des Finances, Bernard Landry.