Allez hop! Ça dérape trop. Il est temps de faire une petite trêve au Journal de Montréal et de s'asseoir pour reprendre les négociations. Syndiqués et patrons, arrêtez de vous dénigrer, mettons durant 48 heures. On ne sait jamais, tout d'un coup que ça marche.

Je ne vous fais pas cette suggestion à titre de chroniqueur syndiqué de votre concurrent et je ne veux absolument pas faire la morale à qui que ce soit. Je fais cette suggestion de trêve à titre de «contribuable-actionnaire» de Quebecor Media, propriétaire du Journal de Montréal.

 

Je voudrais ainsi rappeler aux deux parties que nous, contribuables québécois, avons investi jusqu'à présent quelque 3,2 milliards de dollars dans Quebecor Media. Je vous rappelle qu'il s'agit ici du plus gros placement, et de loin, fait par la Caisse de dépôt et placement du Québec depuis sa création.

Qu'a-t-on obtenu en retour de ce gigantesque investissement historique de 3 200 000 000$? On a obtenu 45,3% du capital-actions de Quebecor Media.

Chers syndiqués et patrons du Journal de Montréal, vous comprendrez qu'en tant qu'important actionnaire de votre quotidien, j'aimerais bien qu'on règle le conflit au plus sacrant.

Dans le meilleur intérêt des deux parties, on sait pertinemment qu'au bout du compte, vous allez être obligés de toute façon de vous asseoir pour négocier. Et il est écrit dans le ciel que les deux parties vont obligatoirement devoir faire des compromis sur leurs demandes respectives. Il n'y a rien de nouveau là-dedans.

Pourquoi attendre des semaines, des mois... pour aboutir à la table de négociation alors qu'avec de la bonne volonté... vous pourriez passer à la table d'ici les 48 prochaines heures. Essayez-le!

En tant qu'actionnaire, j'aimerais bien que «mes» journalistes et leurs collègues syndiqués du Journal de Montréal reprennent le boulot. Les boss, aussi vaillants soient-ils, ne peuvent quand même pas faire la job à leur place. Et puis, entre nous, la direction de Quebecor Media ne peut quand même pas demander à ses sept millions de contribuables-actionnaires d'approuver une quelconque stratégie qui fournirait les nouvelles au Journal de Montréal avec l'aide de filiales.

Quand on a le gouvernement comme actionnaire majeur, patrons et syndiqués ont le devoir moral de penser également à la collectivité qui les finance.

Je rappelle aux deux parties quelques faits... financiers.

À la suite du dégonflement de la bulle internet, la Caisse de dépôt et placement du Québec avait, en date du 31 décembre 2002, dévalué son investissement (de 3,2 milliards) dans Quebecor Media à seulement 435 millions. Méchante claque, sur papier s'entend!

Depuis ce moment-là, Quebecor Media (Vidéotron, TVA, Sun Media (dont le Journal), Archambault, Canoë, etc.) a vu sa valeur augmenter sensiblement, reflétant ainsi la bonne rentabilité de sa stratégie d'affaires. Et le placement de la Caisse a pris du galon. Mais on est encore très loin d'avoir recouvré notre mise de fonds.

À preuve, les analystes du service de recherche de la Financière Banque Nationale, Adam Shine et Greg MacDonald, évaluent actuellement Quebecor Media à 3 milliards de dollars. Comme la Caisse détient 45,3% des actions, cela signifie que «notre» investissement dans Quebecor Media vaut aujourd'hui près de 1,4 milliard. Même pas la moitié de son investissement initial.

Précisons que cette évaluation de la valeur «boursière» de Quebecor Media tient compte de la crise financière qui sévit depuis l'an dernier. Mais qu'à cela ne tienne, grâce à l'efficacité de sa stratégie de convergence avec ses entreprises québécoises, Quebecor Media est reconnue par les analystes boursiers comme l'une des sociétés canadiennes parmi les plus performantes du secteur des communications et des médias.

Cependant, on ne se cachera pas que la récession frappe de plein fouet le secteur des médias. Et cela atteint Quebecor Media, convergence ou non.

C'est dans ce douloureux contexte que les négociations doivent reprendre, et que chacun doit mettre de l'eau dans son vin.