Le plan de relance économique du président Barack Obama risque de provoquer une guerre commerciale susceptible de s'étendre rapidement à toute la planète. Et c'est le Canada qui pourrait en devenir la première victime.

Le projet de loi adopté par la Chambre des représentants la semaine dernière bannit l'achat d'acier et de fer à l'étranger pour la réalisation des projets d'infrastructures auxquels seront consacrés les deux tiers des investissements de 820 milliards.

 

Dans les prochains jours, le Sénat américain prévoit d'aller encore plus loin en interdisant purement et simplement l'importation de tout produit relié aux programmes.

Le gouvernement Harper a raison de froncer les sourcils. Après tout, 40% des exportations canadiennes d'acier prennent le chemin des États-Unis. Nos chefs de file comme Groupe Canam seront forcément touchés par la décision américaine. Lors de sa visite à Ottawa, le 19 février, l'accueil réservé au président pourrait s'avérer moins chaleureux.

Le chef néo-démocrate, Jack Layton, suggère au premier ministre Harper de riposter en adoptant des mesures de représailles. Ce serait une grave erreur.

En période de crise économique, c'est reconnu, les pays ont le réflexe de se refermer comme des huîtres et de recourir au protectionnisme pour sauvegarder leurs emplois. M. Obama a promis d'en créer plus de trois millions pour endiguer la crise. Mais, en fermant leurs frontières, les États-Unis inciteront leurs partenaires commerciaux à les imiter en freinant eux-mêmes leurs importations américaines, ce qui multipliera les mises à pied. Si M. Obama autorise cette loi, il se tirera donc dans le pied.

Dans les années 30, les Américains ont eu la malencontreuse idée d'adopter la loi Smoot-Hawley, qui avait gonflé les tarifs de milliers de produits importés. Résultats: les biens américains ont été boudés et la récession s'est transformée en dépression.

À peine quelques jours après l'élection de M. Obama, le G20 avait réitéré qu'il était primordial de préserver l'ouverture des marchés. Ne l'oublions pas, la croissance des échanges commerciaux a grandement contribué à sortir des centaines de millions de démunis de la misère dans les pays émergents.

Mais face à la dure réalité du chômage, qui frappe de plus en plus fort au fil des mois, les beaux discours ne tiennent plus. C'est chacun pour soi.

Au Forum économique mondial de Davos, le directeur général de l'Organisation mondiale du commerce, Pascal Lamy, a incité les pays à prendre des mesures concertées afin que la crise économique mondiale ne dégénère pas.

Les États-Unis ne sont pas les seuls à se replier sur eux-mêmes. L'Inde et la Russie n'ont pu échapper à la tentation. Mais la plus grande économie mondiale doit montrer l'exemple. La spirale protectionniste ne fera aucun gagnant. Le commerce mondial fondra déjà de 2,8% en 2009, selon le Fonds monétaire international. La crise s'intensifiera davantage si les barrières tarifaires poussent comme des champignons.

M. Obama enverra un bien mauvais signal s'il ne met pas son veto au projet de loi du Congrès. Sa politique de la main tendue a suscité tous les espoirs aux quatre coins du monde. Il serait dommage que ce vaste capital de sympathie commence à s'effriter au profit d'une politique économique à courte vue.