Crise financière oblige, le gouvernement Harper a décidé d'augmenter de 6 à 15 milliards de dollars la capacité d'emprunt de la SADC (Société d'assurance dépôts du Canada), question de refléter l'expansion des dépôts assurés au cas où des institutions financières déclareraient faillite.

Le système financier canadien a beau être stable, bien capitalisé et encadré par une réglementation efficace, cela ne le met pas pour autant à l'abri des grandes perturbations des marchés financiers. Voilà pourquoi le gouvernement fédéral met en place des mesures d'urgence d'intervention et autorise son ministre des Finances, Jim Flaherty, à accorder des prêts, des lignes de crédit et des garanties financières aux institutions financières, banques, sociétés de fiducie, etc.

 

Les nouvelles mesures annoncées hier dans le cadre du budget? Outre la hausse de la capacité d'emprunt de la SADC, celle-ci mettra en place une «institution transitoire» chargée de préserver la stabilité financière en cas de faillite d'une de ses institutions membres. La SADC pourra, au besoin, détenir des actions de ses institutions membres. Elle pourra également régler une faillite «sans nécessairement opter pour la solution la moins coûteuse» pour elle.

Et concernant le nouveau CELI (compte d'épargne libre d'impôt), lequel nous permet d'investir jusqu'à 5000$ l'an et d'accumuler des revenus en franchise d'impôts, le gouvernement Harper demande à la SADC de lui accorder un statut particulier, comme celui accordé au REER pour les dépôts assurables. Le CELI bénéficiera donc d'une protection distincte de 100 000$.

Entre nous, c'est de la poudre aux yeux... Soyons réalistes: ça va prendre plus de 15 ans avant de pouvoir accumuler plus de 100 000$ dans le CELI. Et là on parle des gens qui investiront le maximum.

La SADC protège les dépôts des clients des institutions financières à charte fédérale. Pour permettre aux institutions financières à charte provinciale (comme les caisses Desjardins, des sociétés de fiducies, autres institutions bancaires, etc.) de bénéficier des nouvelles mesures fédérales, il va falloir que le gouvernement Charest dote l'Autorité des marchés financiers (AMF) de mesures similaires. Au Québec, c'est l'AMF qui protège les dépôts des clients des institutions à charte provinciale.

Pour rassurer davantage les épargnants canadiens, le gouvernement Harper aurait dû imiter le gouvernement américain et augmenter la protection des dépôts de 100 000$ jusqu'à 200 000$.

Pour protéger entièrement leurs épargnes, les Canadiens qui ont plus de 100 000$ de dépôts (dans leurs REER, dans leurs comptes d'épargne) doivent actuellement éparpiller leurs dépôts dans plusieurs institutions financières. Hausser la protection à 200 000$ est une mesure qui ne coûte rien au gouvernement fédéral... à moins d'anticiper plusieurs faillites!

La discrimination résidentielle

Il faut croire qu'aux yeux du gouvernement Harper, les familles à faible revenu qui possèdent une habitation, aussi modeste soit-elle, n'ont pas besoin du nouveau crédit d'impôt fédéral pour la rénovation résidentielle. Ce crédit de 15% (maximum de 1127$ au Québec) à l'égard des dépenses de rénovation admissibles (la tranche dépassant les premiers 1000$, sans excéder 10 000$) est un crédit d'impôt non remboursable. Autrement dit, si vous ne payez pas d'impôt fédéral, vous ne pouvez pas obtenir ce petit allègement fiscal. Quelle discrimination!

Pour votre information, lorsqu'un crédit d'impôt est «remboursable», il permet à tous les contribuables de bénéficier dudit crédit, même ceux qui ne paient pas d'impôt. À Québec, par exemple, le gouvernement Charest a annoncé récemment un nouveau crédit d'impôt à la rénovation résidentielle (20% sur les dépenses dépassant la première tranche de 7500$, jusqu'à 20 000$). Ce crédit québécois (maximum de 2500$) à la rénovation résidentielle est justement un crédit d'impôt remboursable, accessible même aux familles à faible revenu.

Une parenthèse: pourquoi exclure les premiers 1000$ de dépenses de rénovation de l'admissibilité du nouveau crédit d'impôt fédéral de 15%? Quand on veut stimuler un secteur, il n'y a pas de «petites» dépenses à exclure... Là aussi, c'est de la discrimination! Après tout, on paie de la TPS sur toutes les dépenses.

Dans le cadre de son budget d'hier, le ministre Flaherty a également annoncé l'octroi d'un crédit d'impôt pour l'achat d'une première maison (après cinq années sans être propriétaire). Ce crédit d'un maximum de 626$ (au Québec) est lui aussi un crédit non remboursable. Si l'acquéreur ne paye pas d'impôt fédéral, il n'aura donc pas accès à cet autre cadeau fiscal! Comment justifier cette autre mesure discriminatoire?

Par ailleurs, le gouvernement Harper a quelque peu bonifié le Régime d'accession à la propriété (RAP). Il permet maintenant de sortir de son REER jusqu'à 25 000$ pour s'en servir comme mise de fonds à l'achat d'une première maison. C'est à peine 5000$ de plus que le retrait permis depuis 1992.

Somme toute, c'est un retrait supplémentaire vraiment minime que le gouvernement fédéral permet de sortir de son REER pour accéder à la propriété.

De 1992 à aujourd'hui, le prix des propriétés au Canada a plus que doublé. Comme il s'agit d'une mesure qui ne coûte pas une cenne au gouvernement fédéral, pourquoi n'a-t-il pas doublé le montant du retrait potentiel du REER à des fins d'accession à la propriété...

Comme on sait, les utilisateurs du RAP doivent rembourser le retrait sur une période maximale de 15 ans.