Il ne faut pas se surprendre que l'Association des joueurs de la LNH ait choisi de ne pas demander la réouverture hâtive de la convention collective signée à l'été 2005.

Dans le contexte économique difficile qui prévaut cette année, la dernière chose dont le hockey aurait besoin serait de se lancer dans d'épineux pourparlers qui risqueraient de déboucher sur un nouveau conflit de travail. Comme l'a souligné avec justesse le directeur de l'Association, Paul Kelly, ce n'est pas le moment de repartir sur la brosse quand tu viens juste de te remettre de la cuite de la veille.

 

La LNH est déjà chanceuse d'avoir réussi à rebondir financièrement après l'annulation de la saison 2004-2005. Sans rien enlever au bon travail de marketing effectué par la Ligue depuis la reprise de ses activités, la croissance des trois dernières années a été alimentée en grande partie par la force inattendue du dollar canadien, qui a gonflé les revenus des six très populaires équipes situées au nord de la frontière et, par ricochet, les recettes de la LNH.

Le huard vole désormais pas mal plus bas (autour de 80 cents, après avoir été à parité avec la devise américaine). Ce repli, conjugué à la baisse de revenus qui ne manquera pas de se produire dans plusieurs marchés américains en cette période de récession, signale la fin de la récréation pour les joueurs.

On a beaucoup dit que Gary Bettman et les propriétaires étaient sortis grands vainqueurs du conflit de travail. L'instauration d'un plafond salarial que l'Association des joueurs avait juré de ne jamais accepter, de même que la bisbille ayant entouré le départ de Bob Goodenow et le règne tumultueux de Ted Saskin, étaient des symboles éloquents d'un rapport de forces qui semblait nettement à l'avantage des propriétaires.

La réalité, c'est que les joueurs se sont plutôt bien débrouillés jusqu'ici dans l'ère post-lock-out. De Vincent Lecavalier à Alexander Ovechkin en passant par Daniel Brière, on ne compte plus les joueurs qui ont signé beaucoup de lucratifs contrats depuis trois ans. Le plafond salarial est passé de 39 millions $ à plus de 56 millions $. Le salaire moyen, de 1,8 million à 2,2 millions. Pas si mal, quand on se souvient que les joueurs ont accepté une diminution générale de 24% des salaires garantis par les contrats signés avant le conflit.

Mais il faut se méfier des chiffres. Car dorénavant, les dollars promis n'aboutiront pas tous dans les poches des joueurs. Pourquoi? Parce que les salaires, en vertu de la convention collective, ne peuvent pas dépasser 57% des revenus totaux de la LNH. Or, la modeste croissance des revenus anticipée cette année n'est tout simplement pas suffisante pour permettre aux joueurs de continuer à toucher leur pleine rémunération.

Les retenues risquent de s'élever à 15% cette saison. Un joueur comme Ovechkin touchera autour de 7,6 millions, au lieu des 9 millions prévus à son contrat. Non, je sais, il ne fait pas pitié. Mais dans l'ensemble de la Ligue, les revenus avant impôts perdus par les joueurs devraient atteindre les 220 millions. Ça commence à faire beaucoup de sous. Et ça risque d'être pire encore l'an prochain, quand les effets de la récession se feront pleinement sentir.

C'est pourquoi les joueurs ont raison de réclamer un renforcement de leur partenariat avec la LNH. Pour l'instant, ce sont eux qui absorbent l'essentiel des risques, sans avoir le moindre mot à dire sur la conduite des affaires de la Ligue.

«Un vrai partenaire aurait un siège à la table pour toutes les décisions importantes, souligne Paul Kelly. Là, on est consultés pour certaines choses, mais pas pour d'autres. Les joueurs veulent avoir un mot à dire sur les contrats de télé nationaux, sur le déménagement de franchises, sur le calendrier des événements spéciaux. Si nous sommes de vrais partenaires, alors donnez-nous ces droits et privilèges.»

Les joueurs ont décidé de laisser la convention collective courir jusqu'en 2011 parce qu'ils n'avaient pas vraiment le choix. Un deuxième conflit de travail en quelques années leur ferait très mal. De deux maux, ils ont choisi le moindre : vaut mieux des baisses de salaire de 15 ou 20% que pas de salaire du tout.

Mais ils commencent à réaliser que les beaux jours sont bel et bien terminés. Si le ralentissement économique se prolonge, attendez-vous à ce que ça rue dans les brancards tout à l'heure...

Sanctions méritées

J'ai appuyé dans le journal d'hier la décision de Nicklas Lidstrom de ne pas participer au match des Étoiles, compte tenu de ses longs états de service. Mais je pense que la LNH a raison d'exiger que Lidstrom et son coéquipier Pavel Datsyuk s'absentent de leur prochain match, à Columbus, mardi. La Ligue devait faire quelque chose pour éviter que les absences injustifiées se multiplient au match des Étoiles. Lidstrom et Datsyuk auraient très bien pu passer le week-end à Montréal même s'ils ne jouent pas, comme le fait Sidney Crosby. «C'est leur décision, a dit Crosby, hier, au sujet des deux joueurs des Wings. Pour un événement comme le match des Étoiles, c'est important que tout le monde participe, surtout les joueurs. Je ne vois rien de mal (dans la décision de la Ligue) si tout le monde savait à quoi s'attendre.»

En passant, la décision de Lidstrom était prise de longue date et ne résulte pas d'une blessure subie à son dernier match. Son remplaçant, Stéphane Robidas, savait depuis une semaine qu'il serait invité au match des Étoiles...