Dump, dump, dump À lire les nouvelles en finance internationale, la célèbre chanson de Queen revient spontanément en mémoire:Another one bites the dust!

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Après le départ de Charles Prince III, grand patron de la banque Citigroup, après la retraite forcée de Stanley O'Neal, chef de direction de la firme de courtage Merrill Lynch, c'est au tour du président du conseil d'UBS, Marcel Ospel, de se trouver dans le collimateur.

Le conseil de la banque suisse lui montrera la porte si les pertes atteignent la barre des 10 milliards de francs, rapporte le quotidien Sonntag.

Bref, les administrateurs de ces institutions ne sont pas très indulgents et patients devant ce qui a toutes les allures d'une saignée.

À preuve la révélation-choc de dimanche: Citigroup pourrait devoir radier 11 milliards US en pertes associées aux prêts immobiliers à haut risque, en plus des 6,5 milliards US que la première banque des États-Unis a effacés le mois dernier.

En comparaison, la radiation de 8,4 milliards US annoncée par Merrill Lynch le 24 octobre dernier -présentée comme la plus importante de l'histoire de Wall Street!- semble modeste.

Mais Stanley O'Neal avait aggravé son cas. Le grand patron de la firme de courtage avait entrepris des négociations de fusion avec la banque Wachovia sans en informer son conseil d'administration. Un PDG voudrait se faire renvoyer qu'il ne s'y prendrait pas autrement!

Ces institutions financières ont succombé aux charmes d'instruments financiers complexes comme les obligations adossées à des actifs qui, jusqu'à tout récemment, offraient des rendements supérieurs à des placements sécuritaires.

Cet été, par exemple, Merrill Lynch détenait pour 40 milliards US de ces obligations, alors que ce type d'investissement ne représentait que 1 milliard US il y a 18 mois, rapporte le New York Times.

Les banques vendaient ces obligations à des investisseurs et se servaient des rentrées de fonds pour acheter de nouvelles obligations qui étaient adossées à des prêts hypothécaires à haut risque.

Or, le marché pour ces obligations s'est effondré lorsqu'un nombre croissant d'Américains a manqué de sous pour rembourser son hypothèque.

Les institutions financières canadiennes ne sont pas en reste. Certaines d'entre elles, dont la Caisse de dépôt et placement du Québec et la Banque Nationale du Canada, ont investi des sommes considérables dans le papier commercial adossé à des actifs.

Toutefois, l'ampleur de leurs pertes reste inconnue. On aura déjà une meilleure idée à la fin du mois, lorsque les banques canadiennes dévoileront leurs résultats financiers de fin d'année.

Peut-être que les efforts de restructuration du marché porteront fruit et que les pertes seront minimes. Mais peut-être que les actionnaires des grandes banques se préparent à de très mauvais lendemains de veille.

Si c'était le cas, les conseils des grandes banques canadiennes iront-ils jusqu'à renvoyer leurs PDG comme cela s'est vu aux États-Unis? Disons que j'achèterais du papier commercial adossé à des actifs avant de parier là-dessus!

Les banques canadiennes ont elles aussi de belles bourdes à leur actif. Or, de mémoire de journaliste, jamais un conseil n'a montré la porte au président d'une banque canadienne.

Rappelez-vous l'effondrement de la société immobilière Olympia & York, en 1992. Plusieurs banques avaient prêté sur la gueule, si on peut dire, des sommes astronomiques aux frères Reichmann sans évaluer correctement les risques de l'entreprise.

Si les banques Royale, CIBC et Toronto-Dominion avaient toutes écopé, la Nationale avait été la plus durement touchée, ses prêts étant disproportionnés par rapport à sa taille.

La Nationale a enregistré une perte sur prêt de 350 millions pour Olympia & York, ce qui l'a contrainte à couper de moitié le dividende sur ses actions ordinaires. Et pourtant, André Bérard est resté bien en selle.

Rappelez-vous les déboires de la Banque CIBC avec son célèbre client américain Enron. Selon le gouvernement américain, la CIBC a aidé Enron à maquiller ses résultats financiers.

La Banque a versé 2,4 milliards US uniquement pour régler à l'amiable les recours collectifs qui avaient été intentés contre elle.

C'est sans parler de la stratégie d'expansion aux États-Unis qui s'est terminée en queue de poisson; la vente des activités américaines de CIBC World Market, annoncée lundi, en est la dernière manifestation.

Et pourtant, jamais John Hunkin, qui dirigeait la banque à l'époque, n'a été inquiété. Il est parti à l'été de 2005 les poches pleines à craquer.

Plus récemment, la Banque de Montréal a rapporté des pertes avant impôt totalisant 849 millions causées par des négociateurs de gaz naturel qui, laissés à eux-mêmes, ont commis des folies.

Qui a réclamé la tête de William Downe ou de son prédécesseur, Anthony Comper? Personne.

Les institutions financières sont de grandes organisations. Aussi, leurs décisions ne sont jamais prises par une seule personne. Néanmoins, il y a un principe d'imputabilité.

Quand tout va bien, la gloire de l'entreprise rejaillit d'abord sur son PDG. Cela se reflète d'ailleurs dans les salaires faramineux qui sont versés aux grands banquiers et courtiers.

Par exemple, Stanley O'Neal, de Merrill Lynch, a gagné plus de 70 millions US en salaire en cinq ans.

Et si son contrat ne lui accorde aucune indemnité de départ, ses prestations de retraite et ses options d'achat d'actions valent 159 millions US au bas mot, estime la firme James F. Reda & Associates.

L'inverse devrait être tout aussi vrai. Quand l'aventure tourne au vinaigre, on devrait au moins identifier le grand responsable. C'est le cas aux États-Unis et ailleurs dans le monde.

Bref, partout sauf au Canada. Sans doute parce que, comme le chante si bien Freddie Mercury, «We are the champions of the woooorld»...

LE CHOC: En raison de la crise des prêts à risque (subprimes), Citigroup la première banque mondiale annonce des dépréciations d'actif colossales de 8 à 11 milliards US.

LES VICTIMES: Charles Prince, PDG de Citigroup, doit démissionner, quelques jours après le départ forcé du patron du courtier Merrill Lynch, Stan O'Neal.