Le 17 septembre dernier, mon collègue Francis Vailles, de La Presse Affaires, avançait, de bonnes sources, que la Caisse de dépôt et placement du Québec détenait quelque 13,6 milliards de dollars de papier commercial adossé à des créances émis par des tiers (PCAC), lequel papier commercial non bancaire fait actuellement l'objet d'une restructuration.

Le 17 septembre dernier, mon collègue Francis Vailles, de La Presse Affaires, avançait, de bonnes sources, que la Caisse de dépôt et placement du Québec détenait quelque 13,6 milliards de dollars de papier commercial adossé à des créances émis par des tiers (PCAC), lequel papier commercial non bancaire fait actuellement l'objet d'une restructuration.

Jeudi dernier, le chroniqueur Konrad Yakabuski, du Globe and Mail, renchérissait en alléguant que l'exposition de la Caisse dans ce type de papier commercial jouait entre 13 et 20 milliards.

Dans leurs articles respectifs, les deux journalistes ont mentionné que la Caisse pourrait devoir éponger des pertes de plusieurs centaines de millions de dollars avec son controversé papier commercial, voire de 680 millions (pour Yakabuski) jusqu'à 1,4 milliard (pour Vailles).

La Caisse n'a émis aucun commentaire sur les chiffres avancés par La Presse et le Globe.

Ce qui leur donne de la crédibilité puisque la Caisse à l'habitude de réagir promptement à tous les articles qu'elle juge incorrects à ses yeux.

Cela dit, la Caisse refuse de donner la moindre information sur la somme actuellement engloutie dans le papier commercial non bancaire, alléguant qu'en vertu de sa loi constitutive, elle ne donne des précisions sur ses placements qu'une fois l'an, soit à la publication son rapport annuel.

Pourquoi? «La Caisse rappelle que, conformément à sa loi constitutive, elle fait annuellement une reddition de comptes complète, en suivant un processus rigoureux de divulgation, encadré par des normes canadiennes et internationales. La Caisse effectuant une gestion active de ses placements, le contenu de son portefeuille varie de manière constante à l'intérieur des politiques de placement des déposants. C'est pourquoi elle ne publie le portrait de ses placements qu'à l'occasion de son rapport annuel.»

D'accord. Laissons de côté la position actuelle de la Caisse dans les PCAC non bancaire et contentons-nous à ce moment-là de la position qu'elle détenait dans ces mêmes PCAC le 31 décembre 2006.

Voici la question que j'ai posée à la Caisse: «Au 31 décembre dernier, quand la Caisse donnait un «instantané» du portrait de ses placements dans son rapport annuel, elle détenait du papier commercial adossé à des actifs de tiers pour quel montant précisément? Je sais bien que le chiffre en question n'est valide que pour cette journée-là bien précise, soit le 31 décembre 2006. C'est ce chiffre que je souhaite obtenir. Simple question de transparence de la part de la Caisse, puis-je, oui ou non, l'obtenir?»

Eh bien, la Caisse refuse de donner cette information. Raison évoquée: «La Caisse fait une reddition de comptes annuelle complète, par portefeuille spécialisé et non par véhicule de placement», répond la porte-parole de la Caisse, Annie Vallières.

Pourtant, la Caisse divulgue dans son rapport annuel une brique de renseignements additionnels qui, d'ajouter Mme Vallières, permettent de connaître la valeur des investissements que la Caisse détient dans des sociétés ouvertes (cotées sur les marchés boursiers) et des sociétés fermées (placements privés).

Deux exemples. Ainsi, la Caisse trouve important de divulguer qu'elle détenait le 31 décembre dernier dans son gigantesque portefeuille quelque 100 000$ d'actions de la compagnie Uranium North Resources ou 400 000$ d'obligations de la compagnie Signature 4 Ltd...

La liste de ses placements de 203 milliards de dollars s'échelonne sur plus de 100 pages. Mais en ce qui concerne les milliards de dollars de papier commercial non bancaire (PCAC) qu'elle possédait le 31 décembre dernier, NIET, impossible de connaître la réelle position de la Caisse.

Et encore moins la liste complète desdits placements PCAC.

La Caisse conclut que «la publication de l'exposition de la Caisse dans les PCAC n'aurait donc aucune signification à ce moment-ci,» puisqu'il s'agirait d'un portait au 31 décembre.

D'accord. Mais pourquoi la Caisse juge-t-elle important de publier en date du 31 décembre toutes ses positions dans les sociétés ouvertes et privées alors qu'on sait pertinemment que celles-ci peuvent varier quotidiennement par la suite?

Pourquoi la Caisse mentionne-t-elle à la page 101 de son rapport annuel qu'elle a elle-même effectué en 2006 des émissions de papier commercial pour une valeur de 31,2 milliards de dollars et que l'encours de ses emprunts à court terme s'élevait à 4,1 milliards et celui de ses emprunts à moyen terme à 1,5 milliard?

La seule «précision» qu'il a été possible d'obtenir sur la position de la Caisse dans les PCAC au 31 décembre dernier se résume à ceci: «Le papier commercial adossé à des créances est un des éléments du total des Titres à revenu fixe de la page 112 du Rapport annuel 2006», m'a répondu la Caisse.

Le papier commercial se retrouve donc dans les 113,9 milliards de dollars de titres à revenu fixe que la Caisse détenait le 31 décembre dernier. Ces titres comprennent des valeurs à court terme pour 33,6 milliards, des obligations pour 73,4 milliards et des financements hypothécaires pour 6,9 milliards.

Par rapport à l'article choc de Francis Vailles, la Caisse s'est contentée de rappeler qu'elle est un «investisseur de long terme», qu'elle peut faire face «à une crise comme celle qui sévit présentement», qu'elle a «très rapidement rétabli le niveau de ses liquidités», qu'elle est «en mesure d'honorer toutes les demandes de liquidités de ses déposants...», que «les PCAC ne font plus partie de ses liquidités de court terme» et qu'après avoir constaté «l'ampleur de la crise», elle a pris en août «le leadership de la dénouer» en travaillant activement à la restructuration des PCAC.

Cette restructuration, à laquelle participent nombre d'institutions financières touchées par la crise du papier commercial, a essentiellement pour but de protéger le mieux possible la valeur desdits PCAC et ce: en les convertissant en instruments financiers de moyen terme (au lieu de court terme comme c'est le cas actuellement); en rendant ces instruments «davantage transparents pour les investisseurs»; et en favorisant la négociation de ceux-ci sur le marché secondaire.

«Dans toutes les situations de crise, a déclaré Henri-Paul Rousseau, président et chef de la direction de la Caisse, il faut éviter la panique et travailler avec toutes les parties prenantes. C'est ce que vise la «Proposition de Montréal», à laquelle ont déjà adhéré plus de 81% des investisseurs.»

Une bonne façon d'éviter la panique et surtout de rassurer la population (l'actif de 208 milliards des déposants de la Caisse appartient aux travailleurs et citoyens québécois) c'est de donner des chiffres précis sur l'exposition de la Caisse dans les PCAC.

Y a-t-il quelqu'un au gouvernement Charest, à l'ADQ ou au PQ qui peut poser la question sur l'exposition de la Caisse au PCAC et nous donner un aperçu?

Après tout, c'est notre argent!