Les médias ont accordé beaucoup d'importance à une étude de l'Institut Fraser qui place le Québec à la queue du peloton pour ce qui est de la performance du marché du travail.

Les médias ont accordé beaucoup d'importance à une étude de l'Institut Fraser qui place le Québec à la queue du peloton pour ce qui est de la performance du marché du travail.

L'Institut dresse chaque année un palmarès des 10 provinces canadiennes et des 50 États américains, en attribuant une note à chacun en fonction d'un certain nombre d'indicateurs reconnus (taux de chômage, productivité, etc). Selon cette méthodologie, le Québec arrive au 50e rang sur 60. Ce n'est effectivement pas très brillant.

La compilation de Fraser est utile en ce sens qu'elle fait bien ressortir les forces et les faiblesses de chaque gouvernement. Mais elle ne dit pas tout.

Entre la grille d'analyse de Fraser, qui est par ailleurs très bien construite, et les résultats réels du marché du travail, tels que mesurés par Statistique Canada, il y a un monde.

Il est vrai que le marché québécois du travail, en 2008, en arrache. Les chiffres les plus récents montrent que l'économie québécoise a perdu 5000 emplois entre juillet 2007 et juillet 2008.

Cette mauvaise nouvelle ne doit pas masquer le fait que le marché québécois du travail, examiné sur une plus longue période, obtient des résultats remarquables.

C'est ce que vient de rappeler le Centre d'étude sur l'emploi et la technologie (CETECH), dans son dernier bilan annuel. Le CETECH est un organisme qui relève d'Emploi Québec; il est reconnu pour la haute qualité de ses études.

Le document rappelle d'abord que le taux de chômage québécois en 2006, à 7,2%, a atteint son plus bas niveau en 33 ans, ce qui n'est quand même pas rien. Sur une longue période, le Québec a pratiquement réussi à combler l'écart chronique qui le séparait de l'Ontario. Ainsi, en 1989, le taux de chômage se situait à 9,6% au Québec, contre 5% en Ontario. En 2007, les chiffres correspondants sont de 7,2% au Québec et 6,4% en Ontario, un écart de moins d'un point de pourcentage. Certes, une partie de ce rattrapage est attribuable à la détérioration du marché ontarien, surtout ces dernières années avec la crise de l'automobile. Mais elle est aussi due à une nette amélioration du marché québécois, grâce à la vigueur du secteur des services.

Les travaux du CETECH montrent aussi à quel point le marché du travail a vécu de profonds changements depuis le début des années 90.

Deux choses surtout retiennent l'attention: la forte création d'emplois chez les travailleurs âgés de 55 ans et plus et l'augmentation importante de la présence des femmes dans les emplois hautement qualifiés et professionnels.

L'affluence des travailleurs de 55 à 64 ans sur le marché du travail est un phénomène déjà bien connu et documenté. Du simple fait du vieillissement de la population, ce groupe d'âge devient forcément de plus en plus nombreux. Mais ce n'est pas tout. Nombreux sont les jeunes retraités qui, pour toutes sortes de raisons, décident de revenir sur le marché du travail. Les travailleurs expérimentés, que l'on mettait à la porte dans les années 90, sont aujourd'hui de plus en plus recherchés par les employeurs. Toujours est-il qu'en 2007, l'emploi a progressé de 6,7% chez les 55-64 ans, contre 1,4% chez les 25-54 ans.

L'année 2007 ne constitue pas une exception. Sur une longue période, l'emploi chez les travailleurs québécois de 55 à 64 ans est en constante et rapide progression. En 1993, ce groupe d'âge affichait un taux d'emploi de 36,2%. L'an dernier, pour la première fois, cette proportion a dépassé la barre des 50%, et tout indique que la tendance se maintiendra.

D'autre part, la forte présence des filles dans toutes les facultés universitaires, observée depuis plusieurs années, fait sentir ses effets sur le marché du travail. Les femmes ont récolté 68% des emplois créés depuis 1987. L'an dernier, ce pourcentage a atteint un record de 78%. «Le fait que les huit dixièmes des nouveaux emplois sont revenus à des femmes n'est pas un accident de parcours, mais la confirmation d'une tendance observée déjà depuis quelques années», écrivent les chercheurs du CETECH.

Et on parle de plus en plus, ici, d'emplois de qualité. Les femmes sont maintenant majoritaires dans les emplois hautement qualifiés, où elles détiennent 52% des postes, contre 43% en 1987. Au niveau professionnel, elles occupent maintenant 54% des emplois. Enfin, dans les postes de gestion, elles sont toujours minoritaires à 36%, mais il y quand même eu un progrès notable par rapport aux 25% de 1987.