Inflation galopante, immobilier en crise, électeurs en rogne. La situation tourne au cauchemar pour le gouvernement du Royaume-Uni.

Inflation galopante, immobilier en crise, électeurs en rogne. La situation tourne au cauchemar pour le gouvernement du Royaume-Uni.

George Bush a de gros ennuis au plan économique. Mais le président des États-Unis peut se consoler en jetant un coup d'oeil de l'autre côté de l'Atlantique.

Les dernières nouvelles en provenance du Royaume-Uni sont si mauvaises que les Américains auront l'impression que l'herbe est encore moins verte chez les cousins anglo-saxons qui reçoivent pourtant beaucoup de pluie.

La crise immobilière, par exemple, est en train de virer au drame là-bas. Si bien que l'expression negative equity (valeur nette négative) résonne dans les salons de Londres comme aux pires heures de la récession du début des années 90.

Une nouvelle étude de Morgan Stanley avance que, d'ici 2010, deux millions de Britanniques auront des emprunts supérieurs au prix de vente de leur propriété... lorsqu'il est possible de vendre. En somme, beaucoup de gens auront bientôt plus de dettes qu'ils n'ont d'actif.

Car, toujours selon l'étude, les prix des propriétés devraient baisser de 10% en 2008 et d'autant en 2009 dans la foulée de la débâcle immobilière. Au cumulatif, un plongeon de plus de 20% en deux ans!

La glissade est déjà amorcée. D'après la firme Nationwide, un baromètre du marché britannique, le prix moyen des maisons est tombé de 2,5% en mai, contraction la plus brutale depuis le début de cette enquête, en 1991.

La tourmente touche à ce que les sujets de Sa Majesté ont de plus précieux: leur home sweet home. Deux tiers des ménages sont propriétaires de leur logement.

40% plus cher

Au chapitre du coût de la vie, les Américains trouveront aussi matière à consolation.

Par exemple, la facture énergétique des Britanniques pourrait grimper de 25 à 40% l'hiver prochain, a affirmé jeudi la BBC sur la base d'une enquête auprès des fournisseurs nationaux. Cela représente, dans le pire des cas, une hausse moyenne de 400 livres sterling (800$ CAN) pour chaque ménage.

Ça tombe plutôt mal. Déjà, l'inflation s'est accélérée plus que prévu au Royaume-Uni, en mai, pour atteindre un sommet depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement travailliste en 1997.

L'Office national de la statistique vient d'annoncer que les prix à la consommation ont augmenté de 3,3% (sur une base annuelle) depuis un an.

Chose peu commune, ce rapport a forcé le gouverneur de la Banque d'Angleterre, Mervyn King, à envoyer une lettre d'explications à Alistair Darling, l'équivalent du ministre des Finances, comme la règle l'exige quand l'inflation dépasse d'un point l'objectif de 2%.

Ce n'est que la deuxième fois que Mervyn King doit ainsi s'expliquer, après un premier dérapage en avril 2007. Mais cette fois-ci, la situation est nettement plus grave.

«L'inflation va probablement augmenter fortement au deuxième semestre, à environ 4%", écrit Mervyn King. L'explication est simple: les prix alimentaires, en particulier ceux de la viande et des légumes, montent en flèche. À cela s'ajoutent les factures d'électricité et de gaz. L'inflation n'atteindrait un pic qu'à la fin de l'année.

«L'accélération se ressent partout, commente Michael Saunders, économiste de Citi Bank dans une note. Les services, les marchandises, l'alimentation, les services collectifs. Tout souligne la gravité des pressions inflationnistes qui pèsent sur le Royaume-Uni.»

Entre-temps, les prévisions de croissance pour 2009 sont brusquement revues à la baisse. Le CBI (patronat britannique) prévoit désormais seulement 1,3%, estimation très éloignée des 2,5% prévue par le gouvernement. Là encore, le ralentissement s'explique facilement: flambée du pétrole, crise du crédit, ralentissement de l'immobilier...

La Banque d'Angleterre, qui a baissé à trois reprises les taux d'intérêt depuis six mois pour porter son taux directeur à 5%, se trouve bloquée, et une hausse des taux semble même possible.

Serrez la ceinture

Que dit alors le gouvernement aux Britanniques devant un tel bloody mess? Il faut se serrer la ceinture. Alistair Darling a appelé la semaine dernière à la «retenue» dans les hausses de salaires, pour éviter une spirale inflationniste.

Pour le premier ministre Gordon Brown, qui pourrait décréter des élections en 2010, c'est un véritable cauchemar. Son gouvernement est de plus en plus impopulaire, un récent sondage indiquant que 75% des Britanniques désapprouvent sa gestion économique. Bref, on s'ennuie déjà de Tony Blair.