La région de Montréal, c'est bien connu, est la locomotive économique du Québec. Voici que des chiffres publiés cette semaine par l'Institut de la statistique du Québec montrent que le poids économique de la métropole s'est encore accru depuis neuf ans.

La région de Montréal, c'est bien connu, est la locomotive économique du Québec. Voici que des chiffres publiés cette semaine par l'Institut de la statistique du Québec montrent que le poids économique de la métropole s'est encore accru depuis neuf ans.

En 2006, la taille de l'économie québécoise, c'est-à-dire l'ensemble de la production de biens et services, se situait à 265 milliards.

En termes réels, c'est-â-dire en tenant compte de l'inflation, ce chiffre représente une hausse de 25 % par rapport à 1997.

Or, un coup d'oeil attentif sur le Produit intérieur brut (PIB) de chacune des régions du Québec nous apprend que c'est essentiellement la région de Montréal qui tire le reste du Québec vers le haut.

Administrativement, la «région» de Montréal se limite à l'île de Montréal. À elle seule, cette région affiche un PIB de 96 milliards, ce qui n'est pas rien: aux taux de change officiels, l'économie de Montréal se compare à celle d'un pays comme la Roumanie.

À l'intérieur du Québec, le poids économique de l'île de Montréal est largement supérieur à son poids démographique. Ainsi, Montréal compte pour 25 % de la population québécoise, mais représente 36 % de l'économie de la province.

Ce n'est pas tout. Le découpage administratif du Québec comporte des aspects franchement fantaisites. Laval, qui n'est rien d'autre qu'une banlieue de Montréal même si elle aime bien se donner des airs de grande ville, est considéré comme une région distincte.

Trois autres régions, la Montérégie, les Laurentides et Lanaudière, englobent de vastes espaces ruraux, mais leur population, à plus de 70 %, est constituée de banlieusards dont la plupart travaillent Montréal (les autres offrant localement des biens et services à ces travailleurs).

Toutes ces «régions», qui dans les faits n'en constituent q'une seule, l'agglomération de Montréal, connaissent un rythme de croissance économique égal ou supérieur à la moyenne québécoise: 25 % en Montérégie, 27 % sur l'île de Montréal, 33 % dans Lanaudière, 37 % à Laval et un impressionnant 38 % dans les Laurentides.

Il est clair que cette poussée n'est pas due à Mont-Laurier ou Saint-Michel-des-Saints, mais à la forte croissance de la couronne nord, de Deux-Montagnes à Repentogny.

Ainsi, la vaste région de Montréal, incluant Laval, la Rive Sud et la couronne nord, compte pour près de 60 % de l'économie québécoise, et cette proportion est en constante augmentation.

Trois autres régions, l'Outaouais, la Capitale-Nationale, et le Nord-du-Québec, parviennent à devancer la moyenne, mais leur poids demeure négligeable par rapport à celui de Montréal.

En aucun cas on ne saurait considérer Québec, encore moins Gatineau, comme des locomotives. Toutes les autres régions traînent de la patte, et particulièrement les régions-ressources: la croissance n'atteint que 14 % sur la Côte-Nord, 12 % au Saguenay-Lac-Saint-Jean, 11 % en Mauricie, et des scores anémiques de 4 % et 1 % en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine. En neuf ans, c'est pitoyable.

Il est de bon ton, dans certains milieux régionalistes, de rechigner contre Montréal. Il est certainement tentant et facile de comparer la grande métropole à une sorte de monstre parasitaire qui aspire les ressources et les forces vives des régions.

En réalité, c'est tout le contraire: les régions peuvent se compter chanceuses d'avoir Montréal.

Selon les barèmes nord-américains, le Québec est une société pauvre. Compte tenu de la progresssivité de son régime fiscal, 41 % de ses «contribuables» ne paient pas d'impôt. Le financement de tout le système repose donc sur moins de 60 % de la population.

D'autre part, le Québec compte peu de riches; seulement 2,6 % des contribuables gagnent plus de 100 000$. Dans ces conditions, le gros du fardeau repose sur les épaules des ménages à revenus moyens.

Comme la grande région de Montréal compte pour plus de 60 % de l'économie québécoise, et que son rythme d'expansion est largement supérieur à celui du reste du Québec, les contribuables montréalais à revenus moyens ou élevés, incluant les banlieusards, financent plus que leur part des routes, hôpitaux, écoles et autres services publics en région.

En fait, l'agglomération compte 48 % de la population québécoise, mais le gouvernement québécois y puise 56 % des impôts sur le revenu des particuliers.

Il est loin d'être certain que les Montréalais reçoivent un rendement correct sur leur investissement.

Les hôpitaux montréalais figurent parmi les pires de la province, comme le montre le récent classement de La Presse, et le réseau routier de la région montréalaise est dans un état épouvantable. S'il y a quelqu'un qui aurait de bonnes raisons de chiâler, ce ne sont certes pas les régionalistes, mais bien les contribuables montréalais.