Il n'y a probablement pas de nation au monde qui soit dépourvue d'un courant politique de centre droit, méfiant à l'endroit des élites urbaines, prompt à brandir les valeurs traditionnelles et les «vraies» préoccupations populaires.  

En ajoutant à cela le trait particulier d'une doctrine autonomiste, on trouve la position que l'Action démocratique de Mario Dumont a tenue sur l'échiquier politique depuis 1994. Une position que l'on peut définir comme un mélange de duplessisme soft et de créditisme amélioré qui, sous une forme ou une autre, existera encore demain dans le paysage québécois.

Mais sous quelle bannière, là est toute la question.

Après la dégringolade d'hier, qui l'a privé de près de la moitié de son appui populaire et divisé par cinq sa représentation à l'Assemblée nationale, ce parti a-t-il toujours un avenir?

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En tout état de cause, on sait maintenant que cet avenir, s'il existe, ne sera pas défini par Mario Dumont.

Fort courageusement, celui-ci a en effet annoncé, hier soir, qu'il ne dirigera pas l'ADQ lors des prochaines élections «après 14 ans comme député et 20 ans de militantisme politique», a-t-il résumé.

Cela étant, le problème ne réside pas tant dans le fait que l'ADQ a subi une cuisante défaite lors de ces élections non désirées, mais plutôt dans l'absence de profondeur de ce parti d'un seul homme. On l'a d'ailleurs assez abruptement reproché à Mario Dumont lorsque, récemment, deux de ses députés l'ont abandonné pour aller s'asseoir de l'autre côté du Salon bleu.

Ce handicap dont les effets se font maintenant pleinement sentir n'explique-t-il pas aussi, au moins en partie, les «humeurs» de l'ADQ au fil des mois? C'est-à-dire les errements, les faux pas, les déclarations à l'emporte-pièce d'un chef qui, peu ou pas conseillé, n'a toujours pu (ou voulu?) compter que sur son flair politique... lequel était grand, bien sûr, mais dont on a constaté qu'il était loin d'être infaillible.

C'est peut-être ainsi que l'ADQ aura raté le coche de l'Histoire, se heurtant au plafond au-dessus duquel on trouve les véritables « partis de gouvernement », un niveau que la formation de Mario Dumont n'a finalement jamais atteint.

On l'a dit : un parti est un véhicule. Et ce qui est arrivé à l'ADQ, hier, n'implique pas que vont disparaître les préoccupations légitimes qu'elle a souvent portées -inconfort identitaire, ou méfiance profonde à l'endroit du système d'éducation, ou inquiétude économique. Mario Dumont se dirigeant vers la sortie, les partisans adéquistes ont dorénavant devant eux une liste de questions dont aucune n'est facile. Ce véhicule peut-il être remis en assez bon état de marche pour continuer de faire rouler ces préoccupations? À supposer que l'alternative existe, quel autre chef pourrait-il être chargé de cette remise à neuf?