Le ministre de la Sécurité publique a raison de tenir une enquête publique sur la mort du jeune Fredy Villanueva.

Les conclusions du rapport de la Couronne sur l'intervention policière du 9 août dernier ne répondent pas à toutes les questions laissées en suspens depuis le drame qui a embrasé Montréal-Nord.

De nombreuses interrogations demeurent. À commencer par le contexte de cette intervention policière. Quelques jeunes jouent aux dés dans le stationnement d'un aréna. Or, un règlement municipal interdit les jeux de hasard dans les endroits publics. Les policiers ont-ils fait preuve d'un excès de zèle en interpellant ces jeunes? Avaient-ils simplement l'intention de les disperser? Leur intervention s'inscrivait-elle dans le contexte plus large d'une guerre des nerfs entre les gangs de jeunes et les policiers? S'agissait-il plutôt d'une tentative d'intimidation de la part des deux policiers?

 

L'enquête publique permettra d'aller au fond des choses et contribuera peut-être à mieux comprendre le climat qui régnait et qui règne encore aujourd'hui entre les policiers et les jeunes dans ce quartier de Montréal.

Des questions persistent aussi quant au travail des policiers. Auraient-ils dû, et pu, appeler rapidement des renforts? Autre interrogation: le déroulement des événements illustre bien qu'à un moment donné, le policier Jean-Loup Lapointe ne sentait plus que sa partenaire pouvait assurer sa sécurité. La description des événements montre aussi l'incapacité des policiers à maîtriser Dany Villanueva qui faisait preuve de beaucoup d'agressivité, invectivant les deux agents et allant même jusqu'à frapper l'un d'eux.

Autre question: la présence d'un gaillard de 1m90 sur les lieux (plutôt qu'une policière) aurait-elle changé quelque chose? Une armoire à glace aurait-elle intimidé Dany Villanueva au point où il n'aurait pas osé s'opposer aux deux policiers? Quant au jeune Fredy Villanueva, aurait-il eu l'audace de s'attaquer à l'agent Lapointe s'il avait senti que son partenaire maîtrisait mieux la situation?

Ces questions, fort délicates, doivent être posées puisqu'il y a eu mort d'homme. D'un très jeune homme. Cette mort aurait-elle pu être évitée?

De la même façon, on peut se questionner sur la responsabilité du service de police dans la sélection des agents appelés à patrouiller dans des quartiers chauds où la violence peut éclater à tout moment. Ne devrait-on pas y assigner les policiers les plus physiquement imposants afin que les jeunes comprennent que l'intimidation, verbale ou physique, n'est pas une option?

Enfin, les membres de la communauté de Montréal-Nord qui blâment l'attitude des policiers dans cette affaire devraient regarder les faits en face. Par ses actions, Dany Villanueva a contribué à faire grimper le niveau d'agressivité qui a conduit l'agent Lapointe à utiliser son arme. La famille de la victime, qui intente une poursuite civile contre les policiers et la Ville de Montréal, doit reconnaître que le fils aîné a, lui aussi, sa part de responsabilité dans cette tragédie.

Cela dit, le but de l'enquête publique n'est pas de trouver un coupable, mais bien de comprendre ce qui s'est passé afin d'en tirer les leçons qui s'imposent. Espérons qu'on y arrive. Dans le calme.

nathalie.collard@lapresse.ca