Ils sont jeunes, ils ont terminé leurs études depuis peu et ils rêvent d'une maison. Jonathan, âgé de 28 ans, travaille en informatique et gagne 58 500$.

Marie-Ève, 24 ans, a un bac dans le domaine social mais est pour l'instant sans emploi.

«La famille s'agrandit! indique Jonathan. Un premier enfant va arriver en mars 2009. Le quatre et demi sera trop petit. L'achat d'une maison est-il envisageable?»

 

Marie-Ève ira vraisemblablement travailler après la naissance de l'enfant, «ce qui devrait laisser une plus grande marge de manoeuvre», observe le jeune homme.

Avec un loyer de 675$ par mois, leur budget dégage un surplus de 470$. L'enveloppe disponible pour les mensualités paraît donc plafonner à 1145$.

«Il semble y avoir une différence entre ce que les prêteurs hypothécaires peuvent nous donner et ce qu'on peut se permettre selon notre budget, observe Jonathan. Où est l'erreur? On vise une maison dans la fourchette de 165 000$ à 190 000$ dans la région de Québec.»

Selon leurs calculs, les barèmes bancaires habituels leur accordent davantage. Le critère de l'amortissement brut de la dette (ABD) autorise un maximum de 32% du revenu brut, soit 1562$ pour les mensualités hypothécaires, l'impôt foncier et les frais de chauffage.

L'amortissement total de la dette (ATD) ne doit pas excéder 40% du revenu brut. En considérant le prêt auto, dont la mensualité s'établit à 410$, les frais de logement peuvent atteindre 1542$.

«Comment aller chercher la marge de manoeuvre pour se permettre une hypothèque telle que nous l'envisageons?» demandent les futurs parents.

Place au bébé

Il faut faire de la place au futur bébé, à la fois dans l'appartement et dans le budget.

La planificatrice financière Marguerite Pernice, directrice principale Gestion personnalisée à la Banque Nationale du Canada, a révisé avec le couple sa situation financière. Leur coût de vie s'établit en fait à 36 000$ par année. Leur budget dégage donc un surplus mensuel de 325$.

Ils ont évalué que le bébé entraînera des dépenses additionnelles de 400$ par mois.

«Par ailleurs, précise la planificatrice, la venue de l'enfant leur donnera droit à la prestation universelle pour garde d'enfant de 100$ par mois (imposable), plus la prestation fiscale canadienne pour enfants, qui varie en fonction du revenu familial, soit environ 80$ par mois (non imposable) et, au provincial, le paiement de soutien aux enfants, lui aussi en fonction du revenu familial, qui représente environ 120$ mois (non imposable).»

En définitive, le bébé grèvera le budget mensuel de 100$. Le surplus sera donc ramené à 225$ par mois.

Du côté du logement, la planificatrice a résumé la question à une alternative. Le couple peut déménager dans un appartement plus grand, qui lui coûterait environ 800$ par mois, plutôt que les 675$ actuels. Ou encore, il peut acquérir immédiatement une propriété de 170 000$.

«Quelle solution semble la plus plausible et réaliste?» s'est demandé la planificatrice.

Un logement plus grand

L'option d'un logement plus grand, pour un loyer plus élevé de 125$ par mois, réduit le surplus budgétaire mensuel à 100$. «Cette somme pourrait être investie dans le REER collectif de Jonathan afin de combler une partie des cotisations REER non utilisées», suggère Marguerite Pernice.

Le projet d'acquisition d'une propriété serait relancé lorsque Marie-Ève retournerait sur le marché du travail. La planificatrice suggère au couple d'évaluer à combien s'élèveront les dépenses qui suivront l'achat d'une propriété - déménagement, aménagement, etc. Cette somme serait réservée sur les fonds non enregistrés du couple. Le solde de ces placements pourrait servir immédiatement à un remboursement du prêt auto ou du prêt étudiant de Marie-Ève, ou encore à combler en partie les cotisations REER non utilisées.

Une maison

Deuxième voie: achat immédiat d'une propriété de 170 000$. La mise de fonds proviendrait d'un retrait de 20 000$ du REER collectif de Jonathan - le maximum permis en vertu du RAP (régime d'accession à la propriété).

Si on inclut la prime de l'assurance prêt hypothécaire de 3300$, au taux de 2,2%, l'emprunt s'élèverait à 153 300$.

En raison du budget serré de notre couple, la planificatrice recommande un prêt à taux fixe d'une durée de 24 à 30 mois, amorti sur 30 ans plutôt que 25. Dans ces conditions, avec un taux de 5,35% les mensualités seraient de 850$.

L'impôt foncier, l'électricité et l'entretien y ajouteraient quelque 394$ par mois. Au total, ce sont donc des dépenses supplémentaires de logement de quelque 570$ par mois que le couple aurait à supporter. Le surplus budgétaire, ramené à 225$ avec la venue du bébé, se transformerait donc en déficit de 345$.

Pendant les 18 mois qui précèdent le retour au travail de Marie-Ève, le déficit accumulé atteindrait 6200$. «Il pourrait être pourvu par le placement non enregistré présentement détenu par le couple», propose Mme Pernice. Ce placement de 12 000$ servirait également en partie à couvrir les dépenses parallèles - droits de mutation, frais de déménagement et de décoration, etc.

Notre planificatrice fait néanmoins une mise en garde: «Cette situation peut être envisagée uniquement si l'acquisition d'une propriété est un projet de vie qu'il faut réaliser le plus tôt possible et si leur situation financière relativement serrée ne leur apporte pas une trop grande inquiétude.»

Pour plus de sûreté, Jonathan pourrait interrompre temporairement ses versements à son REER.

Un poids supplémentaire s'ajouterait au plus tard le 31 décembre 2010. Jonathan devrait alors entreprendre le remboursement de son RAP.

Le choix leur revient, indique la planificatrice. Mais on sent le fléau de sa balance pencher d'un côté. «La solution la plus prudente est d'opter pour le logement plus grand car, dans la deuxième option, le moindre imprévu serait difficile à gérer.»

Dernière précaution: Jonathan et Marie-Ève doivent rédiger une convention de conjoints de fait et des testaments.

 

LA SITUATION

Un jeune couple attend un premier enfant. Son logement sera bientôt trop petit. Les conjoints rêvent de s'acheter une maison mais ils n'ont qu'un seul salaire. Déménager dans un logement plus grand ou acheter tout de suite?

«Est-ce que le projet d'acheter une maison est toujours réaliste?»

LES CHIFFRES

Jonathan, 28 ans

Revenu: 58 500$

REER collectif: 28 660$

Placement hors REER: 12 000$

Cotisations REER non utilisées: 11 661$

Marie-Ève, 24 ans

Sans emploi

Aucun actif

Dettes d'études: 750$

Salaire prévu à son retour sur le marché du travail: 37 000$

Prêt auto: 410$/mois jusqu'en août 2012

Coût de vie: environ 36 000$ par année

Surplus budgétaire de 325$ par mois

LA RECOMMANDATION

Le couple pourrait s'acheter une maison de 170 000$, mais au prix d'un déficit budgétaire de 345$ par mois, qu'il faudra soutenir jusqu'au retour au travail de Marie-Ève. Un logement de 800$ par mois laisserait un surplus mensuel de 100$. Au choix. Mais la location est une option plus prudente.

Marguerite Pernice, directrice principale Gestion personnalisée, Banque Nationale du Canada

 

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