Alors que le nombre d’hospitalisations liées à la COVID-19 augmente de jour en jour, le directeur national de santé publique, le Dr Luc Boileau, estime qu’il pourrait y avoir du délestage, d’autant que 13 000 travailleurs infectés sont maintenant absents du réseau de la santé.

La sixième vague qui déferle sur le Québec ne devrait pas connaître d’embellie avant deux semaines, a-t-il déclaré, dans le cadre d’un point de presse, en compagnie de Marie-France Raynault, conseillère médicale stratégique senior, et de Jean Longtin, médecin microbiologiste.

Cela dit, il n’est pas question d’ajouter des « mesures sanitaires qui vont contraindre les gens » ni de prolonger, au-delà du 1er mai, l’obligation de porter le masque dans les lieux publics, a-t-il dit, insistant sur l’importance d’adopter des « comportements responsables », surtout à l’approche du long week-end de Pâques.

Le nombre d’hospitalisations, en hausse de 55 par rapport à la veille, a atteint 1637, vendredi. Cela représente une augmentation de 28 % sur une semaine.

« Si cette hausse continue, mais aussi la hausse de travailleurs de la santé qui sont absents à cause de la COVID […], il y a un effet possible sur l’offre de services du système de santé et de services sociaux. Pas juste les hôpitaux, mais les autres services », a noté le DBoileau.

Il y a des zones de fragilité qui amènent, effectivement, pendant quelques périodes, du délestage. Ça, c’est possible, bien sûr. C’est pour ça qu’il faut être d’autant plus vigilants, tout le monde, pour aider notre système de santé à rester correctement debout.

Le DLuc Boileau, directeur national de santé publique par intérim

Selon les plus récentes projections d’experts en santé publique, la tendance à la hausse du nombre d’hospitalisations pourrait se poursuivre encore deux semaines. Le nombre de personnes hospitalisées ne devrait cependant pas être aussi élevé qu’en janvier. La plus grande immunité collective et la météo plus clémente pourraient aider.

« Rien n’est impossible, a dit l’expert en santé publique. Mais nos projections montrent plutôt que la vague va continuer encore pendant, globalement, pour l’ensemble du Québec, probablement deux semaines. »

Tendance à la hausse

Après une augmentation des cas dans l’est du Québec au cours des dernières semaines, la situation semble se stabiliser en Gaspésie, aux Îles-de-la-Madeleine et sur la Côte-Nord.

Mais la tendance reste à la hausse dans le Bas-Saint-Laurent et au Saguenay–Lac-Saint-Jean, tout comme à Québec, en Chaudière-Appalaches et en Mauricie. La vague touche aussi le Grand Montréal, l’Estrie et l’Outaouais.

« Dans un monde idéal, les gens sont isolés 10 jours, a précisé le médecin microbiologiste Jean Longtin. C’est la période sécuritaire pour être certain que la personne n’est plus contagieuse. »

Mais dans les hôpitaux, frappés par un manque de personnel, les employeurs peuvent tester les travailleurs au sixième jour de la maladie et les inciter à revenir travailler s’ils ne sont plus contagieux.

« Donc, les établissements, maintenant, ont un outil supplémentaire pour faire face à une pénurie de personnel, et c’est vraiment laissé aux soins de chaque établissement de décider le niveau de besoins pour ramener un employé, en fonction du risque qu’on doit prendre », a expliqué le spécialiste.

Écouvillon dans la bouche

De son côté, le DBoileau a réitéré l’invitation à obtenir une troisième et même une quatrième dose, si possible.

Quant aux personnes non vaccinées, elles doivent subir un test rapide au moindre symptôme. « Et même si ce test est négatif, allez passer un test PCR, a-t-il dit. Vous êtes admissibles, si vous faites partie des groupes cibles. »

Dans le cas d’un test positif, les non-vaccinés âgés de 60 ans et plus ou ayant des problèmes de santé particuliers peuvent consulter leur pharmacien pour obtenir le médicament antiviral oral Paxlovid, qui les protège des formes graves de la maladie et d’une éventuelle hospitalisation.

De nouvelles directives seront publiées sous peu par le gouvernement sur la façon de réaliser un test rapide chez soi. Bon à savoir : il faut d’abord frotter l’écouvillon dans la bouche, avant de l’introduire dans les narines. Des études ont montré que le sous-variant BA.2 affectait davantage les voies respiratoires supérieures et que la détection dans la bouche donnait des résultats plus fiables.

Au revoir, le masque

Pour ce qui est du port du masque, il n’est pas question de le rendre obligatoire dans les espaces publics au-delà du 1er mai. « Ce n’est pas l’intention actuellement, a assuré le DBoileau. L’intention, c’est de revenir dans un contexte le plus normal possible. Mais on ne décide pas de ça, c’est la contagion qui va décider de ça, ce sont les mesures prises par tout le monde de façon responsable. »

Vendredi, 30 morts supplémentaires causées par le virus ont été rapportées au Québec, portant la moyenne quotidienne calculée sur sept jours à 19. La tendance est en hausse rapide de 59 % sur une semaine. Aux soins intensifs, le nombre de patients (62) est stable par rapport à la semaine dernière.

Les personnes qui succombent à la COVID-19 sont, en très grande majorité, âgées et vulnérables, et des gens non vaccinés, a précisé le DBoileau. « Les vaccins ne peuvent pas garantir à 100 % la protection contre la maladie grave, mais il la garantit à plus de 90 %, donc il y a un énorme avantage », a-t-il rappelé.

C’était la deuxième fois cette semaine que le directeur national de santé publique par intérim s’adressait aux Québécois pour faire le point sur la pandémie.

Mercredi, après un passage houleux devant les parlementaires chargés d’étudier le projet de loi 28, il avait déclaré en conférence de presse qu’on allait « tuer du monde » si Québec enlevait toutes les mesures de protection contre la COVID-19. Une déclaration sur laquelle il est revenu vendredi : « Je regrette d’avoir utilisé ces mots. Ils étaient inappropriés, et je m’en excuse », a-t-il dit.

Avec la collaboration de Pierre-André Normandin, La Presse