Une série de faux passeports vaccinaux seront « révoqués » au cours des prochains jours. Au lendemain de révélations de La Presse, Québec a assuré avoir mis en place un dispositif pour le faire rapidement lorsque des preuves de malversation pourront être obtenues.

« Vous allez voir : dans les prochains jours, il y a des passeports qui vont être révoqués », a affirmé le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, en marge d’une conférence de presse tenue jeudi à Montréal.

Il réagissait ainsi à une enquête de La Presse1, qui rapportait plus tôt que les autorités avaient épinglé des employés du réseau de la santé d’un peu partout au Québec qui, contre de l’argent, avaient participé à la fabrication de milliers de passeports vaccinaux frauduleux. Ces personnes inscrivaient à la tonne de faux vaccins dans le registre de vaccination du gouvernement.

« C’est criminel, ce qui est arrivé. Autant les gens qui ont émis des passeports qu’ils n’avaient pas le droit de faire que les gens qui ont acheté des passeports qu’ils n’avaient pas le droit d’avoir, c’est criminel. […] On va s’assurer que ces gens-là, on va s’occuper d’eux avec l’UPAC », a promis M. Dubé, sans toutefois s’avancer sur la nature des accusations qui pourraient être portées.

Aux gens qui ont malheureusement fait ça : c’est très dangereux, ce que vous faites. Vous avez permis à des gens non vaccinés d’aller dans des endroits réservés à des personnes vaccinées.

Christian Dubé, ministre de la Santé et des Services sociaux

L’élu caquiste a également confirmé que Québec avait été mis au courant dès le mois d’octobre de potentielles fraudes dans le système des passeports vaccinaux. « À compter [de jeudi], on sera capables de révoquer les passeports », a encore dit M. Dubé, précisant que l’application mobile d’une personne ayant un faux passeport allait « allumer rouge » lorsqu’elle le présenterait pour entrer dans un commerce. « D’ailleurs, le fédéral est en train de nous demander comment faire pour avoir cette application-là », a révélé M. Dubé.

La ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, a déclaré à Radio-Canada jeudi que les révélations de La Presse étaient « matière à réflexion ». « On a toujours été assez humbles sur le fait que l’informatique est un défi au gouvernement et au ministère de la Santé », a réagi la ministre, en confirmant avoir été informée que 150 dossiers d’enquêtes étaient en cours relativement à la falsification de passeports vaccinaux, dont près d’une trentaine pour corruption ou tentative de corruption.

Les partis de l’opposition indignés

Pendant ce temps, les trois principaux partis de l’opposition, eux, se sont montrés catastrophés devant la facilité avec laquelle des milliers de passeports vaccinaux frauduleux ont pu être fabriqués. Ils accusent Québec d’avoir fait preuve de laxisme dans l’implantation du passeport vaccinal, ce qui aurait ouvert la porte aux fraudeurs, et d’avoir négligé de resserrer les mesures de sécurité alors que des problèmes avaient été décelés et médiatisés dès le départ.

« Très vite, le gouvernement est sorti en disant : non, non, il n’y a pas d’enjeu, tout est sous contrôle. Ils ont pris ça à la légère. Une fois que leur dynamique de communication est passée, le problème est demeuré et on ne le règle pas », a notamment déploré la cheffe du Parti libéral, Dominique Anglade.

C’est plus que de la tolérance [envers la fraude], c’est inacceptable comme manière de se gouverner.

Dominique Anglade, cheffe libérale

Au Parti québécois, le porte-parole en matière de stratégie numérique, Martin Ouellet, a affirmé que « le gouvernement a fait l’économie de débats » et que « ce fiasco est complètement sur ses épaules ». « Il ne remplit pas sa part du contrat pour s’assurer que ce qu’il met en place est fiable. Les tricheurs s’en sortent. C’est une claque au visage que les vaccinés reçoivent aujourd’hui », a-t-il tonné.

Selon Vincent Marissal, de Québec solidaire, le gouvernement a agi « dans la précipitation » avec l’implantation du passeport vaccinal, et comme il est « notoirement mauvais en système informatique, malheureusement, c’est peut-être un accident qui attendait d’arriver ».

« Si Éric Caire veut se trouver une crédibilité dans son rôle de ministre de la Cybersécurité, il faut qu’il sorte et qu’il s’explique », a-t-il ajouté. Une demande d’entrevue de La Presse avec M. Caire est d’ailleurs restée sans réponse, jeudi.

Avec la collaboration de Vincent Larouche, La Presse

1. LISEZ « Passeports vaccinaux frauduleux : “C’était de l’argent très facile et leur sécurité était tellement médiocre…” »