La vaccination s’accélère chez les adultes, mais stagne chez les enfants. Si le quart des Québécois ont maintenant reçu leur troisième dose et que les rendez-vous pour les premières doses augmentent, les 5 à 11 ans demeurent peu nombreux à recevoir le vaccin.

En moyenne, ce sont en effet 1500 enfants de 5 à 11 ans qui ont reçu une première dose du vaccin au quotidien dans la dernière semaine. Avant la pause des Fêtes, ce chiffre était au-dessus de la barre des 10 000. La pause des Fêtes a ainsi marqué un net ralentissement de la campagne de vaccination chez les enfants. Jusqu’ici, environ 382 000 des 5 à 11 ans – qui sont environ 650 000 au Québec – ont reçu leur première dose. De ce nombre, environ 6200 ont reçu leurs deux doses.

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Pour la professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal Roxane Borgès Da Silva, cette stagnation chez les jeunes s’explique par le fait « qu’il n’y a plus de super-motivés » chez les parents, comme c’était le cas au départ. « Il reste la tranche des moyens motivés qui se posent des questions. Il y a des gens à qui il faut mieux expliquer pourquoi ça reste important de faire vacciner leurs enfants. Ça prend une communication plus claire », note-t-elle.

Québec a annoncé la semaine dernière que la vaccination était terminée dans les écoles. Il n’est pas question pour l’instant d’administrer la deuxième dose en milieu scolaire.

Chez les adultes, c’est une autre réalité, alors que le rythme des premières doses continue à progresser depuis les derniers jours. Ils sont en moyenne 1565 Québécois de 18 ans et plus chaque jour à relever la manche pour la première fois. C’est deux fois plus que durant les Fêtes, où ils étaient à peine 700 par jour.

Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, a annoncé mercredi que globalement, la prise de rendez-vous pour les premières doses poursuit sur sa lancée. Environ 7000 créneaux ont été réservés dans la seule journée de mardi. C’était environ 5000 la veille. Le total de la vaccination enregistré mardi, soit un peu plus de 107 000 doses, est particulièrement « encourageant », a écrit M. Dubé. Ce dernier a récemment annoncé que le passeport vaccinal serait exigé pour entrer dans les succursales de la Société des alcools du Québec (SAQ) et de la Société québécoise du cannabis (SQDC), et ce, dès le 18 janvier.

Mardi, les autorités ont administré 107 238 doses supplémentaires, auxquelles s’ajoutent 3795 vaccins donnés avant le 11 janvier qui n’avaient pas encore été comptabilisés. Ainsi, 25,2 % des Québécois ont maintenant reçu leur troisième dose, 78,1 % d’entre eux ont reçu deux doses et 85,3 %, une première dose.

Troisième dose dès la fin des symptômes

Les Québécois ayant contracté la COVID-19 pourront dorénavant obtenir leur troisième dose « dès que leur maladie sera résolue », soit dès la fin des symptômes, a aussi annoncé mercredi le gouvernement, en disant se baser sur une recommandation de la Santé publique.

« Dans le contexte épidémiologique actuel, il est recommandé que toutes les personnes qui le souhaitent, incluant celles qui ont eu la COVID-19 récemment, puissent obtenir dès que possible une dose de rappel contre la COVID-19. La dose de rappel offre une meilleure protection contre le variant Omicron », a en effet indiqué le ministère de la Santé et des Services sociaux dans un communiqué diffusé en matinée.

Il s’agit d’un revirement important pour le Québec. Jusqu’ici, une période d’attente de huit semaines était prévue entre la fin d’une infection et une dose de vaccin. De plus, pas plus tard qu’en décembre, le Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ) jugeait qu’une dose de rappel ni même une deuxième dose n’était nécessaire pour les personnes qui avaient contracté la COVID-19. Au contraire du Comité consultatif national de l’immunisation au niveau fédéral, le CIQ jugeait en effet qu’une infection procure une protection assez « robuste » contre le virus. Récemment, le DHoracio Arruda avait aussi affirmé que « si vous avez reçu deux doses d’ARN messager [Pfizer ou Moderna] et que vous [contractez] la maladie, cette maladie-là vous confirme comme si c’était une troisième dose ».

On précise néanmoins que l’intervalle de trois mois qui doit s’être écoulé entre la deuxième et la troisième dose est maintenu.

L’annonce du gouvernement est toutefois loin de faire consensus chez certains scientifiques. Pour Alain Lamarre, par exemple, qui est professeur et chercheur spécialisé en immunologie et en virologie à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), « il n’y a pas de motif scientifique derrière ça ».

« De mon point de vue, l’infection agit un peu comme une immunisation, et si on donne la troisième dose très tôt après, on n’a pas le temps de solidifier la réponse immunitaire. On sait que ça prend quand même plusieurs semaines avant qu’une bonne capacité de neutralisation apparaisse et se développe. »

Le faire quelques jours après une infection aiguë, d’un point de vue immunologique, ça n’a pas beaucoup de sens. Ça ne sert à rien.

Alain Lamarre, professeur et chercheur spécialisé en immunologie et en virologie à l’INRS

Aux yeux de M. Lamarre, Québec poursuit surtout un but de « communication ». « J’ai davantage l’impression que le gouvernement essaie de passer un message pour accélérer l’accès à la troisième dose pour tout le monde. C’est plus un effort d’urgence, de communication, que de science. »

Trudeau encourage les parents

En conférence de presse à Ottawa, Justin Trudeau a voulu encourager les parents d’enfants âgés de 5 à 11 ans à faire vacciner leur progéniture. Car à l’heure actuelle, au Canada, 45 % de ces jeunes d’âge scolaire ont reçu l’injection, et, avec le variant qui rôde, cela ne suffit pas, d’autant plus que les écoles sont de véritables foyers d’éclosion, a-t-il signalé, y allant d’une remarque à l’intention des enfants. « Je sais que c’est nul, mais vous avez été extraordinaires. Et il faut continuer à faire tout en notre pouvoir pour traverser [cette pandémie]. Je compte sur vous », a-t-il lancé.

Quant à l’administration des doses de rappel, il ne faut pas relâcher la pédale, a plaidé le premier ministre. À l’heure actuelle, 10 millions de personnes au pays ont relevé la manche trois fois. Et même si le Canada a dans ses coffres suffisamment de doses pour que l’ensemble de la population mette la main sur la troisième dose, les arrivages ne dérougissent pas, a-t-il indiqué.

Ainsi, en tenant compte des livraisons anticipées de 1,8 million de doses du vaccin Pfizer-BioNTech en janvier, on recevra quelque 6,8 millions de doses de vaccin au cours de ce premier mois de l’année 2022, « et nous continuons à recevoir des doses afin que les besoins futurs qui seraient prescrits par les scientifiques et les experts soient remplis », a-t-il déclaré.

Avec Mélanie Marquis, La Presse

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