(Ottawa) Le gouvernement Trudeau optera pour la plus grande prudence avant de rouvrir la frontière canado-américaine. Les pressions exercées par certains leaders démocrates au sud de la frontière, en particulier le sénateur Chuck Schumer, pour une levée des restrictions au début de juillet ne pèsent pas lourd dans la balance, indique-t-on en coulisses.

Le taux de vaccination de même que le taux de transmission communautaire de la COVID-19 – deux indicateurs relevant des autorités sanitaires – seront les principaux critères qu’utilisera le gouvernement Trudeau avant de trancher cette délicate question.

En coulisses, on précise d’ailleurs que le dossier de la réouverture de la plus longue frontière du monde aux voyageurs n’a pas encore fait l’objet de pourparlers officiels de haut niveau entre Ottawa et Washington, au grand dam des organisations représentant les gens d’affaires des deux côtés de la frontière. Ces derniers piaffent d’impatience d’avoir des signaux en provenance des deux capitales quant à l’échéancier prévu pour la réouverture complète de la frontière et des critères qui seront retenus pour évaluer les étapes à franchir.

Récemment, le premier ministre Justin Trudeau a manifesté peu d’empressement à lever les restrictions. Il a laissé tomber un indice important selon lequel il faudra qu’au moins 75 % des Canadiens soient pleinement vaccinés (deux doses) avant d’envisager un déblocage à la frontière.

L’échéancier évoqué pour en arriver à ce taux de vaccination complet est le mois de septembre.

Depuis mars 2020, la frontière canado-américaine est fermée à tout voyage non essentiel. Cette fermeture est reconduite chaque mois d’un commun accord entre les deux pays en renouvelant un décret gouvernemental. M. Trudeau pourrait d’ailleurs annoncer vendredi que cette fermeture est prolongée d’un autre mois jusqu’au 21 juin.

La frontière demeure toutefois ouverte aux travailleurs essentiels comme les travailleurs de la santé et les camionneurs qui assurent la livraison de denrées, de médicaments, de biens essentiels et de marchandises.

Dans les rangs libéraux, on estime que cet arrangement entre Ottawa et Washington a permis à la majorité des entreprises de continuer leurs activités, sauf dans les secteurs les plus touchés comme le tourisme, l’hébergement et la restauration. On ne sent pas de pression de la part des Canadiens pour accélérer les choses.

Pour l’heure, on privilégie le statu quo, d’autant que le gouvernement Trudeau fait l’objet de vives pressions de la part du premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, qui réclame depuis quelques semaines un resserrement des mesures à la frontière afin de freiner la propagation des variants dans sa province.

En coulisses, on soutient que la situation sanitaire au pays dictera la vitesse à laquelle on pourra reprendre les voyages transfrontaliers comme c’était le cas avant la pandémie.

Selon des sources gouvernementales, on pourrait alléger certaines mesures d’ici quelques semaines, notamment celles encadrant la quarantaine des personnes qui rentrent au pays par voie aérienne. À l’heure actuelle, tous les voyageurs qui arrivent par l’un des quatre aéroports internationaux désignés au pays (Montréal, Toronto, Calgary et Vancouver) doivent obligatoirement séjourner à l’hôtel pendant qu’ils attendent le résultat de leur test de dépistage de la COVID-19. Si le test est négatif, le voyageur peut terminer sa quarantaine à son domicile. Si le test est positif, il doit poursuivre sa quarantaine dans un centre supervisé par les autorités sanitaires. Le coût du séjour à l’hôtel peut atteindre 2000 $.

En guise d’allègement, le gouvernement Trudeau pourrait exempter les personnes qui sont pleinement vaccinées de la quarantaine obligatoire ou encore réduire la période d’isolement. Aucune décision n’a toutefois encore été prise à ce sujet, a-t-on toutefois insisté en coulisses.

PHOTO SUSAN WALSH, ASSOCIATED PRESS

Récemment, chef des démocrates au Sénat

Récemment, le sénateur Chuck Schumer, qui est le chef des démocrates au Sénat, a écrit à des membres de l’administration de Joe Biden afin de plaider pour une reprise des déplacements plus normaux entre le Canada et les États-Unis, après plus d’un an de restrictions, selon la CBC.

D’autres membres de la classe politique américaine, notamment ceux qui représentent des régions limitrophes, ont aussi fait des pressions semblables.

À l’ambassade des États-Unis à Ottawa, une porte-parole n’a pas voulu s’avancer sur une date de réouverture de la frontière.

« Les États-Unis réexaminent les restrictions d’une manière régulière dans le but de les assouplir dès que l’amélioration des conditions de santé publique le permettra en toute sécurité. Les données scientifiques et de santé publique éclairent et guident ce travail. Nous n’avons aucune mise à jour spécifique à partager pour le moment », a-t-on indiqué dans un courriel à La Presse.