« Prudent » et « raisonnable ». Le plan de déconfinement présenté par Québec satisfait les experts, même si à l’instar des oppositions, la plupart auraient aimé voir « des liens clairs » être établis entre les allègements, la vaccination et la transmission du virus.

Des points à clarifier

Selon le DMatthew Oughton, spécialiste des maladies infectieuses à l’Hôpital général juif de Montréal, le plan du gouvernement est « raisonnable », au sens où il tient compte d’un contexte « très favorable ». « Le Québec a du succès dans sa campagne de vaccination et c’est juste de penser que cet été, ça s’accélérera, même pour les deuxièmes doses », suggère-t-il.

Mais d’un autre côté, dit l’expert, baser le déconfinement strictement sur des dates reste « risqué ». « Ça montre qu’on est confiants, certes, mais j’aurais préféré qu’on fasse des liens clairs avec la vaccination et la transmission. À la place, le gouvernement dit : voici le plan, et nous le changerons au besoin. Il y a encore plusieurs détails qui devront être précisés », observe-t-il. À l’École de santé publique de Montréal (ESPUM), la professeure Roxane Borgès Da Silva est du même avis. « C’est un plan prudent, mais je m’attendais à ce qu’on aille plus loin que la Saskatchewan », dit-elle.

Le grand oublié, pour moi, ça reste les tests rapides antigéniques. Et je me demande comment on fera réellement appliquer les mesures liées aux deux doses. Bref, il y a encore beaucoup de questions.

Roxane Borgès Da Silva, professeure à l’ESPUM

« La bonne direction »

Les élèves de toutes les écoles primaires et secondaires, y compris celles situées dans les régions qui sont en mesures spéciales d’urgence, pourront retourner en classe d'ici le le 31 mai, avec l’exception qu’en zone rouge, l’alternance se poursuivra pour les élèves de 3e, 4e et 5secondaire. « On va dans la bonne direction, dit le président de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE), Sylvain Mallette. Être enseignant, c’est d’abord vouloir être avec ses élèves. Il faudra rester vigilants, continuer d’appliquer les mesures, et se souvenir que les écoles sont tributaires des comportements que les gens ont à l’extérieur. » Même son de cloche pour la présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE), Josée Scalabrini. « Tant que ça se fasse dans le respect des règles, ce sont vraiment de bonnes nouvelles. On tombait dans une période critique avec le beau temps et la fin de l’année, où c’est difficile de motiver les élèves. C’est toujours plus facile en personne de saisir ses difficultés », avance-t-elle.

Une déclaration de Dubé mise en cause

Oppositions et syndicats ont déploré mardi la position du ministre Christian Dubé, qui a déclaré que l’état d’urgence sanitaire ne serait pas revu « tant qu’on n’a pas réglé nos conventions collectives » avec le Conseil du Trésor. « C’est irresponsable et dangereux d’instrumentaliser l’état d’urgence sanitaire pour mettre la pression sur les syndicats dans un contexte de négociation. C’est la situation épidémiologique qui doit le déterminer, pas les objectifs politiques de la CAQ », fustige le co-porte-parole, Gabriel Nadeau-Dubois. Au Parti québécois, le critique en santé Joël Arseneau parle d’une réponse « ambigüe » et « inquiétante pour nos anges-gardiens ». Sinon, il accueille les restrictions « avec soulagement », mais cherche encore « les détails sur les cibles et les objectifs ». « Tout ça semble encore bien subjectif. […] Les étapes du déconfinement ne seront applicables aux dates données qu’en fonction de la situation épidémiologique, pas strictement la vaccination », note-t-il. Dans les rangs libéraux, la députée Marie Montpetit affirme que l’annonce du déconfinement « fait du bien », mais que le gouvernement « a le devoir de demeurer vigilant et d’utiliser tous les outils à sa disposition », dont les tests antigéniques rapides.

Le tourisme impatient de reprendre

Le directeur général de Tourisme Côte-Nord, Paul Lavoie, attend avec impatience la levée de l’interdiction des déplacements entre régions, dès le 28 mai. « C’est vraiment là où on va rouvrir les vannes, affirme-t-il. C’est une super nouvelle pour notre secteur qui, normalement, a déjà commencé depuis un mois. Nos pourvoyeurs, notamment, pourront au moins limiter les dégâts en ouvrant dès la fin mai. » Chez Évènements Attractions Québec, qui regroupe plusieurs festivals et attractions touristiques au Québec, « c’est un véritable soulagement », dit le directeur François Chevrier. « Nos membres travaillent sans relâche pour s’adapter depuis maintenant plus d’un an. Cette grande période d’incertitude peut donc faire place à l’enthousiasme à l’approche de la saison touristique estivale, qui est la plus importante pour la grande majorité des entreprises », soutient-il.

Été « dynamique »

La mairesse Valérie Plante n’a pas manqué de saluer la réouverture des terrasses des restaurants dès le 28 mai, une demande qu’elle avait formulée à plusieurs reprises dans les dernières semaines. « Ce plan de déconfinement jette les bases d’un retour vers une certaine normale », a écrit l’élue sur Twitter mardi soir. La réouverture des salles à manger, dès le 14 juin, est « une super nouvelle » pour les commerçants et la population, a-t-elle souligné, parlant d’une « bouffée d’air frais ». « D’ici là, on continue la vaccination. Les bases sont jetées pour un été dynamique à Montréal, et une relance forte, avec l’ouverture de ces établissements essentiels à l’effervescence urbaine et à l’économie locale », a conclu Mme Plante.