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Après avoir reçu le vaccin AstraZeneca en première dose, de nombreux lecteurs voient maintenant arriver le moment de la seconde dose avec une pointe d’appréhension. Le risque de caillots sanguins ou la moins bonne performance du vaccin face à certains variants suscitent des réflexions.

« Puis-je reprendre le processus avec un autre vaccin ? », se demande Robert Lavoie. « Au moment de recevoir ma deuxième dose, en juillet, aurai-je la possibilité de recevoir un vaccin ARNm ? », ajoute Diane Dumont.

Patience, recommandent les experts : de nouveaux éléments permettront bientôt aux autorités et aux vaccinés de prendre une décision mieux éclairée quant à l’administration d’une seconde dose d’AstraZeneca.

D’abord, une étude britannique fort attendue devrait livrer de premiers résultats en mai. L’étude Com-Cov, pilotée par l’Université d’Oxford, vise à mesurer l’efficacité de la protection vaccinale offerte par une dose de vaccin à vecteur viral AstraZeneca et une dose de vaccin à ARNm (Pfizer ou Moderna).

De façon générale, les experts ne croient pas qu’il soit « dangereux » de recevoir deux doses de vaccins différents. L’étude permettra surtout de savoir si la protection est aussi efficace que deux doses du même type de vaccin.

Mais se pourrait-il que la combinaison du vaccin à vecteur viral et de celui à ARNm offre une protection vaccinale « supérieure » à celle offerte par deux doses identiques ?

L’idée n’est pas farfelue, loin de là.

Le DAlan Bernstein, membre du Groupe de travail canadien sur les vaccins contre la COVID-19, compare cette stratégie à une défense militaire qui serait composée de plusieurs types de soldats qui peuvent attaquer l’ennemi de différentes façons, par les airs, par les mers, par la terre… Face aux mutations du virus, la stratégie pourrait en effet s’avérer judicieuse.

« Mais nous avons d’abord besoin des données », rappelle le DBernstein, dans un courriel à La Presse. « Je suis cependant très enthousiaste envers cette approche et je suis optimiste quant à ses chances de succès », ajoute-t-il, soulignant qu’il existe des précédents du genre avec d’autres virus.

En Colombie-Britannique, la directrice de la santé publique s’est elle aussi montrée très optimiste, le 3 mai dernier. « Il se peut que la réponse immunitaire soit meilleure, et plus forte, avec une seconde dose qui vient d’un vaccin différent », a dit la Dre Bonnie Henry. Le lendemain, la Dre Theresa Tam, responsable de la santé publique au Canada, a elle aussi dit que les études en cours détermineront « non seulement si l’interchangeabilité des vaccins est sécuritaire, mais s’il s’agit également d’une stratégie encore meilleure que celle d’utiliser le même vaccin pour les deux doses ».

Au Québec, le DGaston De Serres, de l’INSPQ, a hâte lui aussi de voir les résultats de l’étude Com-Cov.

L’hypothèse est que ça va très bien fonctionner. Mais il faut avoir les données, c’est essentiel.

DGaston De Serres, médecin-épidémiologiste à l’Institut national de santé publique du Québec

Déjà, en France, cette interchangeabilité est en marche. Le ministre de la Santé, Olivier Véran, âgé de 41 ans, a reçu cette semaine une deuxième dose de vaccin Moderna après avoir reçu une première dose d’AstraZeneca début février. C’est désormais le cas pour tous les Français âgés de 18 à 54 ans qui avaient reçu l’AstraZeneca en première dose (surtout du personnel soignant).

Et au Québec ? Des discussions sont en cours. Le Canada attend surtout des vaccins Pfizer dans les prochaines semaines (près de 20 millions de doses). Si les autorités de santé publique donnent le feu vert à la combinaison AstraZeneca et vaccin à ARNm, cette option pourrait notamment donner plus de flexibilité à l’administration des deuxièmes doses.

Des risques de caillots moins élevés ?

En attendant qu’un nouveau choix (ou non) de vaccin soit offert en deuxième dose, les recommandations tant au niveau fédéral que provincial sont de compléter sa série vaccinale avec le même fabricant.

Huguette Naud-Caron et son mari appréhendent cependant cette seconde dose d’AstraZeneca. « Lors de la deuxième dose, peut-on se sentir plus rassurés, face aux thromboses, puisque nous avons bien réagi la première fois ? »

Encore une fois, il faut regarder du côté du Royaume-Uni. On y a administré jusqu’ici environ 23 millions de premières doses d’AstraZeneca (soit presque la moitié des doses administrées au pays), comparativement à 524 000 au Québec. Les autorités britanniques ont répertorié jusqu’ici 236 cas de caillots sanguins à la première dose (dont 49 mortels), soit 1 cas pour 100 000 doses.

Jusqu’ici, 6 millions de deuxièmes doses d’AstraZeneca ont été administrées chez les Britanniques. Et seulement 6 cas de thrombose ont été rapportés, soit 1 cas pour 1 million de doses.

« Ce n’est donc pas impossible d’avoir un caillot à la deuxième dose, mais ça semble moins fréquent », observe le DNicholas Brousseau, de l’INSPQ. « On devrait en apprendre plus dans les prochaines semaines sur le risque exact de caillots sanguins pour la deuxième dose, mais ça semble un évènement qui passe de “très rare” à “extrêmement rare” », dit le médecin.

Moins d’effets secondaires

Si certains vaccinés ont eu l’impression d’« avoir roulé sous un autobus » dans les 48 h suivant leur première dose d’AstraZeneca, ils seront peut-être soulagés d’apprendre que les effets secondaires désagréables sont généralement moins forts à la deuxième dose. Ce qui, par contre, n’est pas le cas pour les vaccins ARNm (Pfizer ou Moderna), où les effets secondaires sont plus souvent rapportés à la deuxième dose. « Il faut bien comprendre que ça reste bénin et qu’on parle d’une durée d’environ deux jours après la vaccination », dit le DNicholas Brousseau. « La deuxième dose reste importante pour venir compléter la protection et assurer une protection à plus long terme. »

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