Des dizaines de médecins, enseignants et travailleurs de la santé ont à leur tour dénoncé mercredi l’intervention de spécialistes en prévention et contrôle des infections (PCI) qui demandent à la CNESST de ne plus obliger le port du masque N95 en « zone tiède ».

« Le SRAS-CoV-2 est un danger reconnu qui présente un risque avéré en milieu de soins et nous pensons que ceci devrait guider vos recommandations dans une approche préventive. […] Nous demandons que la CNESST maintienne son excellente décision », écrivent les quelque 190 signataires d’une lettre envoyée mercredi à la présidente de la Commission, Manuelle Oudar, dont La Presse a obtenu copie.

Parmi ces signataires, on retrouve notamment le médecin spécialiste en médecine du travail au CIUSSS de la Capitale-Nationale, le DLuc Bhérer, ainsi que l’expert en hygiène du travail de l’École de santé publique de Montréal (ESPUM), Maximilien Debia. Le DGary Kobinger, connu pour avoir développé un vaccin efficace contre le virus d’Ebola, est aussi du lot.

Ils réagissaient ainsi à une sortie d’une centaine de spécialistes en prévention et contrôle des infections (PCI). Ceux-ci ont soutenu dans une lettre envoyée plus tôt à la CNESST et au ministre de la Santé, Christian Dubé, que le port du masque N95 en « zone tiède » a « créé le chaos » dans le réseau de la santé en plus de « semer la confusion et un fort sentiment d’insécurité » chez les travailleurs. Pour ces spécialistes, la directive ne « repose pas sur des bases scientifiques », parce qu’en zone tiède, les « conditions nécessaires » à la transmission aérienne du virus ne « sont pas réunies ».

LETTRE FOURNIE À LA PRESSE

Une « abstraction » risquée ?

Le problème avec cette position, répliquent les signataires, est que ces spécialistes « font abstraction des conséquences de ne pas porter » le masque. « Nombre de travailleurs demeurent avec des séquelles permanentes causées par des AVC, des limitations respiratoires, des déficits cognitifs et davantage encore doivent composer avec la COVID longue. Outre les conséquences physiques, il y aussi la détresse psychologique chez les travailleurs soumis à un accès restreint aux [masques]. Le fait de prodiguer des soins de proximité constitue un facteur de risque important », martèlent-ils.

Dans la dernière année, « plus de 41 800 contaminations par la COVID-19 ont été subies » par les travailleurs de la santé, dont 18 sont décédés, rappellent aussi les signataires. « Nous vous prions de maintenir vos directives », disent-ils à la CNESST.

Lundi, plusieurs syndicats représentant des travailleurs de la santé avaient déjà uni leurs voix pour dénoncer la position des experts en PCI, affirmant qu’en « présence d’un virus potentiellement mortel », il importe de « tendre vers les plus hauts standards en matière de protection ».

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C’est en mars que la CNESST avait ordonné le port du masque de type N95 dans les « zones tièdes » pour tous les travailleurs de la santé dans tous les milieux de soins. La décision avait été prise dans la foulée d’un jugement du Tribunal administratif du travail (TAT), qui a tranché que les travailleurs de la santé devaient pouvoir porter des appareils de protection respiratoire, dont fait partie le N95, en tout temps lorsqu’ils sont en contact avec des cas confirmés ou suspectés de COVID-19 – et non seulement en zone chaude.

Avec Fanny Lévesque, La Presse