Le vaccin d’AstraZeneca suscite les craintes et les précautions des responsables de la vaccination partout dans le monde. Un Québécois court toutefois plus de risques de souffrir d’une thrombose en prenant l’avion ou de mourir au volant de sa voiture que d’avoir une thrombose liée au vaccin.

À l’image de l’Alberta et de l’Ontario, Québec a élargi la vaccination à l’aide du vaccin d’AstraZeneca aux personnes de 45 ans et plus.

L’Agence européenne des médicaments a confirmé au début du mois d’avril le lien de cause à effet entre le vaccin d’AstraZeneca et le développement de thromboses. Deux cas de formation de caillot sanguin liés au produit de la société pharmaceutique ont été répertoriés à ce jour au Canada.

Les risques en chiffres

Selon un avis du Comité sur l’immunisation du Québec publié cette semaine, 1 personne sur 100 000 qui souffrirait d’une thrombose à la suite de l’injection d’une dose du vaccin d’AstraZeneca.

Ce risque varie cependant selon l’âge, note le chef de la division d’hématologie de l’Hôpital d’Ottawa et secrétaire de Thrombose Canada, Marc Carrier, qui précise que les risques de cette complication diminuent plus l’âge d’un patient augmente. Les scientifiques s’expliquent mal cette donnée, qui va à l’encontre des thromboses habituelles, touchant davantage les personnes âgées.

Il rappelle toutefois que la probabilité pour les personnes de 20 à 30 ans de contracter la COVID-19 et d’aller aux soins intensifs est actuellement de 7 sur 100 000.

Prendre sa voiture ou le vaccin ?

À titre comparatif, ce sont 3,9 personnes sur 100 000 qui sont mortes d’un accident de la route en 2019, selon la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ).

La Société canadienne du cancer rapporte que c’est un Canadien sur deux qui sera atteint d’un cancer dans sa vie.

Les fumeurs sont deux fois plus à risque de subir un accident vasculaire cérébral (AVC) que le reste de la population.

Une personne qui prend l’avion pendant plus de quatre heures a 21,48 chances sur 100 000 de développer une thrombose.

Thrombose Canada rapporte que ce sont 90 femmes qui prennent la pilule contraceptive sur 100 000 qui auront une thrombose.

L’organisation indique aussi que 5000 patients hospitalisés en raison de la COVID-19 sur 100 000 vont avoir des caillots sanguins.

En ce qui concerne le risque général de thrombose, c’est de 0,1 % à 0,2 % de la population canadienne qui a une thrombose annuellement.

Qu’est-ce qu’une thrombose ?

« Une thrombose, c’est lorsque le sang coagule dans une veine ou une artère puis la bloque. »

André Veillette, professeur en médecine et directeur de l’Unité de recherche en oncologie moléculaire à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM), explique qu’une thrombose peut se déplacer. Par exemple, le caillot peut se créer initialement dans un mollet puis se diriger vers les poumons, de façon à former une embolie pulmonaire.

D’ailleurs, un caillot qui bloque une veine dans le cerveau peut engendrer un gonflement de la veine et provoquer un AVC.

La médecin Maryse Guay, membre du Comité sur l’immunisation du Québec, précise que la formation d’un caillot est un phénomène tout à fait normal dans un cas d’hémorragie, comme lorsque l’on se coupe un doigt. Ce sont toutefois différents facteurs qui mènent vers une coagulation « anormale ».

Une réaction immunitaire en cause ?

« La thrombose veineuse associée au vaccin d’AstraZeneca serait une réaction immunitaire. Le corps fait des anticorps, qui vont se lier aux plaquettes, un type de cellule qui est important pour faire des caillots. Puis, cela engendre une agrégation plaquettaire, ce qui va créer une thrombose », explique le DCarrier.

Le chercheur André Veillette précise que ce type de thrombose immunitaire se présente à l’occasion lors de l’injection d’héparine, un médicament anticoagulant. Tout comme la thrombose liée au vaccin, l’héparine entraîne la formation de caillots dans les veines de la tête ou de l’abdomen.

La thrombose causée par l’héparine est une maladie du nom de HIT, Heparin‐Induced Thrombocytopenia. M. Veillette indique que c’est la connaissance de cette pathologie qui a permis aux experts de comprendre plus rapidement les thromboses liées aux vaccins.

L’adénovirus, la source du problème ?

Les vaccins d’AstraZeneca et de Johnson & Johnson sont unis par la technologie du vecteur d’adénovirus, qui conduit le virus dans le corps. Cet élément pourrait enclencher la réaction immunitaire qui cause une thrombose.

Cependant, les spécialistes s’entendent pour dire qu’il est trop tôt pour affirmer avec certitude que cette composante est la source des complications de caillots sanguins liées aux vaccins.

Davantage de thromboses chez les femmes ?

La Dre Guay indique qu’il n’est pas possible d’assurer hors de tout doute que les cas de thrombose sont plus élevés chez les femmes en raison de prédispositions spécifiques, ou parce qu’elles ont été vaccinées en plus grand nombre.

La médecin précise que lorsque le phénomène des thromboses liées aux vaccins est apparu en Europe, le traitement avait majoritairement été administré à des femmes travailleuses de la santé.