(Montréal) Le chef de service des soins intensifs à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont, le Dr Francois Marquis, affirme qu’au cours des quelque deux dernières semaines, l’âge moyen des personnes infectées par la COVID-19 admises à l’hôpital a reculé de 10 ou 15 ans.

Contrairement à la première vague de la pandémie, l’an dernier, le Dr Marquis voit maintenant plusieurs patients âgés de 30 ou 40 ans qui n’ont pas d’antécédents médicaux. Ils ne prennent pas de médicaments et ne souffrent pas de maladies comme l’hypertension artérielle et le diabète.

Les observations du Dr Marquis sur l’âge des patients de la COVID-19 hospitalisés rejoignent celles faites plus tôt cette semaine par la Dre Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada. Elle avait précisé que l’état de plusieurs de ces plus jeunes patients se détériorait rapidement et qu’ils devaient être soignés aux soins intensifs.

L’épidémiologiste Gaston De Serres, de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), a quant à lui observé que la vaccination a provoqué un déclin depuis la mi-mars des hospitalisations de personnes âgées de 80 ans et plus souffrant de COVID-19.

M. De Serres a souligné que ce n’est pas seulement la proportion de patients plus jeunes parmi ceux hospitalisés qui augmente, mais que le nombre global de patients plus jeunes augmente également. M. De Serres a indiqué que 40 personnes âgées de 50 à 59 ans avaient été hospitalisées la semaine du 7 mars. Au cours de la semaine du 28 mars, elles étaient 54.

Mais les hospitalisations n’augmentent toujours pas de manière significative chez les personnes de moins de 30 ans. « Ce sont des gens plus jeunes. Ce ne sont pas des jeunes », a-t-il déclaré à propos de l’âge moyen des patients.

Dix personnes âgées de 20 à 29 ans ont été hospitalisées pour la COVID-19 au Québec la semaine du 28 mars, comparativement à cinq deux semaines plus tôt, a tout de même indiqué M. De Serres.

Si vous avez plus de cas, vous aurez clairement plus d’hospitalisations, mais la proportion de tous les cas hospitalisés restera faible, car ces groupes d’âge plus jeunes présentent un très faible risque d’hospitalisation.

Dr Gaston De Serres, épidémiologiste

Le Dr De Serres estime que davantage de jeunes sont malades parce que les variants du coronavirus se transmettent plus facilement entre les personnes et provoquent des conditions médicales plus aiguës.

Un renversement dans l’âge moyen

Mike Benigeri, directeur du Bureau des données clinico-administratives de l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS), a quant à lui observé depuis deux semaines une progression de 40 % du nombre de personnes âgées de 40 à 69 ans ayant contracté la COVID-19. Ce pourcentage en croissance était encore plus élevé chez les Québécois âgés de 18 à 30 ans.

Dans un rapport publié jeudi, l’Institut a déclaré que le nombre de nouveaux cas parmi les personnes âgées de 18 à 30 ans avait augmenté de 47 % la semaine du 27 mars, par rapport à la semaine précédente.

Selon le rapport, les patients de plus de 70 ans représentaient 60 % des hospitalisations liées à la COVID-19 en janvier, mais pour la semaine se terminant le 2 avril, ils constituaient 30 % des patients hospitalisés avec la maladie. Les patients de moins de 70 ans représentaient également 70 % des patients en soins intensifs cette semaine-là.

Le Dr Marquis explique que les personnes plus âgées ou qui ont d’autres maladies peuvent ressentir plus tôt les effets d’une infection à la COVID-19 alors que les plus jeunes peuvent avoir tendance à consulter un médecin que lorsqu’ils sont plus gravement malades.

« Ils repousseront les limites de l’endurance jusqu’au point où ils diront : « OK, c’est assez, j’ai vraiment besoin d’aller à l’hôpital » », a-t-il affirmé.

Bien que les risques de mourir soient faibles chez les jeunes, cela ne signifie pas que les conséquences parmi le petit groupe qui tombe gravement malade sont moins importantes, a-t-il déclaré.

« Si vous êtes ce type malchanceux, eh bien, vous allez mourir-et vous n’allez pas mourir à 1,5 %, vous allez être complètement mort. »

C’est la capacité d’accueil limitée des unités de soins intensifs des hôpitaux qui inquiète grandement François Marquis. Il craint que le Québec soit confronté dans deux semaines au même genre de crise vécue actuellement en Ontario.

Le premier ministre François Legault a déclaré à plusieurs reprises qu’avec la protection offerte par la vaccination aux personnes âgées, la province serait en mesure de tolérer plus de cas de COVID-19.

Le Dr Quoc Nguyen, gérontologue au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), a déclaré que si cela peut être vrai en ce qui concerne les décès, ce n’est peut-être pas le cas pour la capacité des soins intensifs.

« Quand nous regardons un cas en décembre par rapport à un cas en mars, il semble que nous ayons plus de soins intensifs qu’auparavant, mais nous n’avons pas nécessairement plus d’hospitalisations », a-t-il déclaré.