S’il reconnaît que le Québec voit « le début d’une troisième vague », le premier ministre François Legault n’entend pas pour le moment revenir sur ses mesures d’allégement, en dépit des nouvelles projections de l’Institut national de santé publique voulant que les variants deviendront « dominants » d’ici le début avril.

« On va faire le point mardi. Il y aura une augmentation des cas et des hospitalisations dans les prochains jours, mais pour l’instant, la situation reste sous contrôle. On ne change pas les mesures annoncées, que ce soit l’ouverture des écoles en secondaire 3-4-5 en zone rouge ou d’autres mesures comme les théâtres qui vont ouvrir », a déclaré le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), lors d’une courte mêlée de presse au Stade olympique vendredi.

Âgé de 63 ans, le premier ministre a reçu sa première dose du vaccin, celui de Pfizer-BioNTech. « Je n'ai presque rien senti », a-t-il insisté, en appelant les citoyens autorisés à prendre rendez-vous pour être vacciné. « C’est un passeport pour notre liberté. »

M. Legault dit avoir autorisé certains assouplissements parce qu’il savait que « les gens étaient tannés ». « Donner de l’air à la population était souhaitable, mais on est devant quelques semaines critiques », a ajouté le premier ministre, en parlant d’un équilibre à opérer.

On voit le début d’une troisième vague. […] Mais il faut que les mesures soient appuyées, respectées, en tenant compte du fait que ça fait un an que la population se fait demander de faire attention.

François Legault, premier ministre du Québec

Cela dit, le chef du gouvernement affirme qu’il n’exclura rien si la situation s’empire. « On va suivre ce qui se passe au cours des prochains jours. Comme à tous les mardis, on va prendre les décisions nécessaires. J’en profite pour demander à tous les Québécois d’être prudents. Le variant est extrêmement contagieux », a-t-il aussi avancé.

Les variants en progression

Plus tôt, vendredi, l’Institut national de santé publique (INSPQ) avait prévenu dans un briefing technique que les principaux variants représenteront plus de 50 % des nouveaux cas d’ici le début d’avril au Québec. Pour l’organisme, le constat est clair : les mesures en place sont insuffisantes pour ralentir ces nouvelles souches du coronavirus.

« Les mesures actuellement sont insuffisantes pour ralentir les variants. […] J’imagine que le gouvernement va devoir changer certaines décisions, pour ce qui est permis ce qui n’est pas permis », a expliqué le médecin épidémiologiste de l’INSPQ, le DGaston De Serres.

Sa position contraste fortement avec celle du gouvernement, qui a autorisé jeudi un nouvel assouplissement pour les rassemblements dans les lieux de culte, qui peuvent depuis aujourd’hui accueillir 250 personnes par bâtiment, y compris en zone rouge. Il y a trois jours, le gouvernement annonçait aussi le retour en classe à temps plein des élèves de 3e, 4e et 5e secondaires en zone rouge, dès lundi. Les spas, les gyms et les salles de spectacles rouvraient aussi vendredi.

Transparence et prudence réclamées

À l’Assemblée nationale, les partis d'opposition n'ont pas tardé à réagir vendredi. Le co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, s’est notamment demandé « où est le plan de la CAQ pour la troisième vague ? » « Dès février, nous avons averti la CAQ que le Québec n’était pas à l’abri d’une vague variants de coronavirus. Aujourd’hui, l’INSPQ confirme nos craintes : les requins décrits par le DArruda sont en train d’encercler le Québec. Si les cas continuent d’augmenter, le gouvernement ne doit pas hésiter à faire des choix difficiles », a-t-il martelé.

La formation politique demande par ailleurs ministre au ministre de la Santé, Christian Dubé, de dévoiler son plan d’action « face à une éventuelle troisième vague dans les plus brefs délais ». « Personne ne veut revivre les montagnes russes des deux premières vagues : les Québécois s’attendent à de la transparence », a insisté M. Nadeau-Dubois.

« La situation est préoccupante, a de son côté avancé la critique libérale en Santé, Marie Montpetit. La hausse des cas, la présence d’un variant extrêmement contagieux et le faible taux de vaccination dans plusieurs régions devraient amener le gouvernement caquiste à la plus grande prudence. [...] Avec la recrudescence des cas, le gouvernement doit s’assurer d’être prêt à affronter une nouvelle vague. »

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

La critique libérale en Santé, Marie Montpetit

Mme Montpetit déplore par ailleurs que le budget Girard présenté jeudi « ne contenait aucune mesure afin de faire face à une troisième vague ».

Dans les rangs péquistes, le député Joël Arseneau a aussi réclamé plus des autorités. Face aux projections de l'INSPQ et à la prépondérance anticipée des variants, le gouvernement doit plus que jamais appuyer ses décisions sur la science. Il doit faire preuve de transparence, dévoiler et suivre les avis de la Santé publique et expliquer les critères et indicateurs à l'appui de ses décisions », a-t-il lâché.