Les trois partis d’opposition fustigent le ministre de l’Éducation Jean-François Roberge, l’accusant d’être responsable du « cafouillage » dans le dossier de la ventilation dans les écoles.

L’opposition réagit ainsi après les révélations de La Presse ce vendredi voulant que le comité tripartite mis sur pied par Québec pour examiner les demandes d’installation de purificateurs d’air dans les écoles n’ait reçu aucune demande en ce sens depuis l’envoi de la directive aux centres de services scolaires (CSS), alors que des parents et des enseignants le réclament à grands cris.

« Après une étude bidon sur la qualité de l’air, nous avons le droit à un comité tripartite tout aussi bidon jusqu’à présent. Il en va de la confiance des parents et du personnel scolaire. Une chance que le printemps arrive », lâche la députée libérale Marwah Rizqy.

Selon la procédure mise en place par Québec et envoyée aux CSS le 2 février dernier, ce sont les CSS — et non les écoles, les enseignants ou les parents — qui doivent faire la demande au comité tripartite avant toute installation desdits appareils.

Or, pendant ce temps, plaidant l’« urgence d’agir », la Fondation Jasmin Roy continue de faire don de purificateurs d’air à des enseignants d’écoles publiques sans suivre la marche à suivre édictée par Québec, jugée beaucoup trop « lourde ». Au même moment, des parents — « découragés » par la « lenteur de la machine bureaucratique » — multiplient les démarches pour en faire installer dans l’école de leurs enfants sans qu’elles portent leurs fruits.

Une mère de famille dont les jumeaux fréquentent une école secondaire publique de la Montérégie a raconté à La Presse son « parcours de combattant » pour réussir — sans succès jusqu’à présent — à installer un appareil dans la classe de ses enfants.

La députée péquiste Véronique Hivon dénonce pour sa part cette situation digne « d’une comédie complètement absurde », « abracadabrante », « kafkaïenne ». « On demande au ministre de l’Éducation de se ressaisir, d’envoyer un message clair », a-t-elle ajouté.

Aux yeux de Québec solidaire (QS), le ministre Roberge est en train de « complètement échapper ce dossier ». « Devant un tel cafouillage, les communautés se prennent en main avec l’aide notamment de fondations privées comme celle de Jasmin Roy. Les enseignants se retrouvent alors coincés au milieu ; entre des parents inquiets pour la santé de leurs enfants et les centres de services scolaires qui suivent les directives émanant de Québec », observe le député de QS Gabriel Nadeau-Dubois.

M. Nadeau-Dubois rappelle que les écoles en Ontario, de nombreuses écoles privées et anglophones au Québec ainsi que tous les établissements publics en Allemagne sont équipés de purificateurs d’air, puisque, « sans être une solution miracle », il s’agit d’un « outil de plus dans le coffre de mesures sanitaires pour lutter contre la transmission de la COVID par aérosols ».

Mardi, La Presse a demandé au ministère de l’Éducation combien de demandes le comité tripartite avait reçues après avoir envoyé sa marche à suivre aux CSS le 2 février dernier. Réponse : « Aucune ».

Lorsque nous avons demandé des précisions à cette courte réponse, son porte-parole Bryan Saint-Louis nous a indiqué qu’il ne pouvait plus fournir d’informations sur le dossier puisqu’il est « judiciarisé ». Plus tôt cette semaine, la Fédération autonome de l’enseignement s’est adressée à la Cour supérieure pour qu’elle ordonne au gouvernement de refaire ses devoirs et de régler le problème de ventilation dans les écoles.

La question de la prévention de la transmission de la COVID-19 par aérosols divise les experts au Québec. Rappelons que la conclusion d’un comité d’experts mandaté par Québec diffère de celle d’un groupe d’experts canadiens et internationaux qui, dans une lettre ouverte publiée le 4 janvier, recommandait, dans les lieux où la ventilation laisse à désirer, de « distribuer des unités portables de filtration de l’air (HEPA) dans le format requis ou des appareils artisanaux utilisant des filtres MERV-11/13 et des ventilateurs pour filtrer les bioaérosols ».

Au cabinet du ministre de l’Éducation, on maintient que « les experts de la Santé publique et ceux du Réseau québécois Covid-Pandémie sont clairs : l’installation de purificateurs d’air n’est pas recommandée, puisque leur efficacité n’est pas démontrée pour contrer la transmission de maladies par aérosols ». « Si un centre de services scolaire veut installer un purificateur d’air, il doit s’adresser au comité mis en place afin de s’assurer que tout est conforme », rappelle-t-on en ajoutant du même souffle que « le flux d’air produit par le dispositif portatif de filtration peut théoriquement contribuer à la transmission du virus en circulant directement d’une personne infectée à une autre ». Le cabinet du ministre Roberge assure ne faire « aucun compromis sur la santé de ceux qui fréquentent notre réseau scolaire » tout en continuant à « écouter les experts en la matière ».