« On s’attend à une vague d’annulations. » Des hôteliers du Québec dénoncent avec force la décision du gouvernement Legault de ne pas autoriser l’ouverture des piscines dans leurs établissements, à peine quelques heures avant le début de la semaine de relâche.

« Nous vivons une situation catastrophique depuis plus d’un an. Et là, on avait une petite pointe d’espoir. On avait rappelé des employés, rempli nos piscines. On était prêts, et c’était une bulle à la fois, sans vestiaires. Bref, toutes les mesures étaient prises pour assurer la sécurité de nos clients », fustige la PDG de l’Association des hôtels du Grand Montréal (AHGM), Eve Paré.

À ses yeux, l’absence de communication du gouvernement est « inexplicable ». C’est par un décret ministériel, adopté jeudi, mais rendu public vendredi, que les hôteliers ont appris qu’ils ne pourraient rouvrir leurs piscines.

On y lit notamment que les piscines pourront rouvrir, « à l’exception » de celles des établissements hôteliers. Jusqu’ici, pareille éventualité n’avait jamais été abordée, affirment les associations d’hôteliers, qui se préparaient à rouvrir leurs piscines dès le 26 février. « Le jour même où nos piscines doivent rouvrir, on apprend qu’on ne pourra procéder. Sauf qu’on a des familles qui sont arrivées [vendredi], en pensant qu’elles y auraient accès », dit Mme Paré.

C’est certain qu’on va devoir quantifier les pertes, mais déjà, on s’attend à une vague d’annulations. Il y aura des [démarches] pour qu’on soit compensés pour ces pertes [financières].

Eve Paré, PDG de l’Association des hôtels du Grand Montréal

Beaucoup de « frustrations »

À l’Association Hôtellerie Québec, le président Xavier Gret est « abasourdi » par la décision des autorités. « Il y a beaucoup de frustrations dans l’industrie, dit-il. On ne comprend pas la situation, d’autant que les piscines municipales vont rester ouvertes. C’est deux poids, deux mesures », tonne-t-il, précisant lui aussi que les protocoles sanitaires étaient prêts, et déjà déployés. « On aurait fait un contrôle à l’entrée comme toujours, avec un respect des horaires également », insiste M. Gret.

Son groupe a d’ailleurs contacté le ministère du Tourisme à cet égard vendredi, mais attend toujours des réponses formelles. « Le gouvernement doit expliquer aux clients pourquoi ils ne pourront profiter des piscines. Nos taux d’occupation sont plus élevés en partie parce qu’on offre ce service-là, alors oui, on s’imagine que bien des gens risquent d’annuler », insiste aussi M. Gret.

Il est minuit moins une. Présentement, on a des clients qui se dirigent vers des hôtels où l’enregistrement commence. Ils s’attendaient à pouvoir utiliser les piscines avec leur bulle familiale.

Xavier Gret, président de l’Association Hôtellerie Québec

Et le porte-parole insiste. « Il y a des frais qui ont été engendrés par la réouverture de nos piscines, et en plus du personnel spécifique qui avait été embauché pour la semaine. On a besoin de réponses », dit-il, en demandant à Québec de revenir sur sa décision, pour assurer la survie financière des hôtels à travers la province.

Québec demeure flou, l’opposition « scandalisée »

Le cabinet de la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, dit avoir été mis au courant de la décision jeudi soir. L’attachée de presse, Sandra O’Connor, a soutenu que la décision avait « été prise par la Santé publique », renvoyant nos questions vers celle-ci. « Nous avons demandé que la Santé publique publie un communiqué afin de préciser sa décision », a dit la relationniste.

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Caroline Proulx, ministre du Tourisme

Ces « précisions » sont finalement venues en début de soirée. Dans un communiqué, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) a simplement affirmé que « les activités sportives ayant lieu dans des piscines intérieures publiques sont permises » avec sa bulle familiale ; « toutefois, les piscines des établissements hôteliers devront rester fermées en zone rouge ».

« En zone orange, les piscines intérieures des hôtels peuvent demeurer ouvertes. Toutefois, en zone rouge, l’accès aux piscines a été resserré aux piscines accessibles à la population en général », ajoute une porte-parole du ministère, Marjorie Larouche, refusant de fournir des détails sur les raisons précises pouvant expliquer cette décision.

PHOTO IVANOH DEMERS, ARCHIVES LA PRESSE

Isabelle Melançon, porte-parole libérale en matière de tourisme

L’opposition officielle, elle, a fustigé « l’improvisation du gouvernement ». « Je suis scandalisée de voir le peu de respect de la CAQ à l’égard de nos hôteliers. […] Voici encore une fois, un triste exemple d’improvisation, de manque de transparence et du peu de considération pour nos familles et nos entrepreneurs. Nous demandons des explications », a réclamé la porte-parole des libéraux en matière de tourisme, Isabelle Melançon.

« Une gestion brouillonne et aléatoire, chapitre 22. 100 % communications, zéro planification », a pour sa part dénoncé le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, sur les réseaux sociaux.

Montréal rouvre ses piscines

En début de soirée, vendredi, Montréal a par ailleurs annoncé qu’elle rouvrirait progressivement ses piscines et ses arénas. Les activités permises seront toutefois « limitées à la pratique libre du sport et l’entrainement individuel ou en duo ». Si les personnes proviennent de la même bulle familiale, aucune distance minimale ne sera requise, mais sinon, les deux mètres s’imposeront « en tout temps ».

La Ville a du même coup autorisé la tenue d’activités intérieures ou extérieures dans le cadre d'un programme sport-études, d’une formation au niveau collégial et universitaire ou encore pour le sport professionnel de haut niveau. Les patinoires extérieures, buttes de glissade et sentiers de ski de fond demeurent ouverts dans la métropole. Rappelons qu’un maximum de huit personnes provenant de foyers différents est toléré, en plus d’un entraîneur. « Aucune activité n’est permise dans un contexte d’une ligue, d’un tournoi ou d’une compétition », précise-t-on néanmoins.

Enfin, le Planétarium rouvrira ses portes dès samedi. L’achat des billets en ligne est fortement recommandé. Les salles d’exposition des Maisons de la culture seront aussi accessibles.