Les experts en maladies infectieuses et les modélisateurs qui mesurent la transmission de la COVID-19 sonnent l’alarme d’une troisième vague provoquée par des variants plus contagieux du virus.

Mais en attendant cette troisième vague, certains se demandent si la deuxième vague est vraiment terminée, en particulier dans les zones peuplées du pays où la transmission est restée plus stable.

Des experts affirment que la définition de ce qui constitue une « vague » et la façon de déterminer si elle est terminée n’est pas si claire.

Certains disent que la deuxième vague est en voie d’être une chose du passé, comme en témoigne la tendance à la baisse des cas à travers le pays, mais d’autres avancent que les hausses et les baisses de cas n’ont pas été suffisamment uniformes pour déterminer si elle est terminée ou si la prochaine est déjà commencé.

Caroline Colijn, mathématicienne et épidémiologiste à l’Université Simon Fraser, soutient que le mot « vague » est quelque peu trompeur. Les vagues de virus ont tendance à s’atténuer d’elles-mêmes à mesure que l’immunité se développe au sein d’une population, a-t-elle expliqué, ce que nous n’avons pas encore atteint avec la COVID-19.

Au lieu de cela, les hausses et les baisses de la transmission de SRAS-CoV-2 ont été dictées par nos propres actions, a ajouté Mme Colijn, par exemple des mesures restrictives qui limitent la capacité du virus à se propager.

« Ce n’est pas une vague, c’est un incendie de forêt, a-t-elle déclaré. Nous fermons les boyaux et les flammes s’accentuent à nouveau et nous obtenons une croissance exponentielle. Ensuite, nous rouvrons les boyaux et les cas diminuent. »

Mme Colijn, dont la modélisation prédit de fortes augmentations des cas vers la fin février dans six des plus grandes provinces du Canada, croit que l’utilisation du mot « vague » permet aux gens de penser que la menace disparaît lorsque la maladie recule.

Mais tant que nous n’atteindrons pas les niveaux d’immunité collective, selon elle, cela ne se produira pas.

Nous ne voyons pas de ralentissement naturel. Nous voyons les choses tomber à cause des restrictions — ces lances d’incendie que nous mettons devant le feu. Ensuite, nous fermons les tuyaux et nous sommes surpris que cette vague revienne.

Caroline Colijn, mathématicienne et épidémiologiste à l’Université Simon Fraser

L’administratrice en chef de la santé publique du Canada a déclaré vendredi que huit provinces avaient signalé des cas de nouveaux variants de la COVID, dont trois présentaient des preuves de transmission communautaire.

La Dre Theresa Tam a indiqué qu’il y avait eu 429 cas du variant identifié pour la première fois au Royaume-Uni, 28 cas du variant identifié pour la première fois en Afrique du Sud et un cas du variant trouvé pour la première fois au Brésil.

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La Dre Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada

Bien que cela semble être un petit nombre par rapport à notre population, le virologue de l’Université du Manitoba Jason Kindrachuk indique que la transmissibilité accrue de ces variants rend la situation plus alarmante.

Il a ajouté que la prévalence réelle des variants à l’échelle nationale est inconnue, bien que certaines juridictions aient mené des études de prévalence ponctuelle pour tenter de le déterminer.

Jason Kindrachuk mentionne qu’un ou deux cas, lorsqu’ils sont détectés tôt et qui sont isolés, ne sont pas trop préoccupants. Mais le danger prolifère à mesure que de plus en plus de cas surgissent.

« Vous avez ce feu initial, puis des étincelles commencent à voler et cela conduit à un tas de petits incendies », a-t-il imagé.

Le Dr Howard Njoo, administrateur en chef adjoint de la santé publique du Canada, a expliqué qu’en raison de la présence de variants plus transmissibles, les gens devraient être plus diligents dans le respect des mesures sanitaires, y compris la limitation des contacts, le port du masque et la distanciation.

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Le Dr Howard Njoo, administrateur en chef adjoint de la santé publique du Canada

Cette transmission de variants survient à un moment où le Canada semble être « aux deux tiers de la descente de la courbe », a déclaré Theresa Tam, alors que l’ensemble des cas de COVID-19 chutent.

Certaines juridictions, comme l’Ontario, ont pris cela comme une raison de déconfiner.

L’ordre provincial de rester à la maison sera levé dans la majeure partie de la province la semaine prochaine, même si les projections publiées jeudi montrent une augmentation potentiellement rapide des cas d’ici la fin février.

Le Dr Andrew Morris, spécialiste des maladies infectieuses à l’Université de Toronto, affirme que le déconfinement de l’Ontario pourrait entraîner de nouvelles restrictions dans la province plus tard.

« Je prévois que nos chiffres au cours des deux prochaines semaines seront plutôt bons, mais ce sont les chiffres dans quatre semaines ou six semaines qui me préoccupent », a-t-il déclaré.

Troy Day, un modélisateur de l’Université Queen’s, est d’avis que le problème avec les variants est qu’ils se cachent toujours sous la surface. Et ils peuvent ne pas être vraiment dépistés jusqu’à ce qu’ils s’installent plus fermement.

M. Day est préoccupé par une troisième vague au Canada parce que des endroits comme la Grande-Bretagne ont montré des trajectoires similaires.

Les cas diminuent et on pense que tout va bien, mais en dessous se trouve en fait une augmentation des cas de variants qui finira par tout dominer.

Troy Day, modélisateur de l’Université Queen’s

Il croit que le mot vague est « une drôle de terminologie », précisant qu’il a hésité à étiqueter définitivement les hauts et les bas du nombre de cas de COVID-19 de cette façon.

« Toutes les vagues que nous avons vues sont largement motivées par ce que nous faisons pour les contrôler, a souligné Troy Day. Plus nous ouvrons et fermons, plus nous aurons de vagues multiples. »