Les masques de protection jetables utilisés dans les hôpitaux et les milieux d’enseignement de l’Estrie pourront bientôt être récupérés pour être recyclés localement.

Le Centre intégré de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Estrie s’est associé à une entreprise de Val-des-Sources (ancien Asbestos) et à l’Université de Sherbrooke afin de développer une façon plus écologique et locale de se débarrasser de ces masques, dont l’utilisation a explosé avec la pandémie de COVID-19 et pour lesquels il n’existe pratiquement pas de solution de recyclage au Québec.

Un projet-pilote démarrera ce mois-ci, d’abord à l’hôpital de l’Hôtel-Dieu de Sherbrooke, avant d’être élargi aux autres établissements du CIUSSS-Estrie.

Les masques, mais aussi à terme les autres équipements de protection individuels (EPI) comme des blouses, des gants ou des visières, seront récupérés et expédiés à l’entreprise MGA Environnement, qui peut les traiter pêle-mêle.

Ils seront broyés et mélangés à de la biomasse forestière pour en faire un matériau composite compact, qui « va [satisfaire à] toutes les normes environnementales les plus strictes », a expliqué dans une conférence de presse virtuelle le fondateur de l’entreprise, Martin Gagnon.

Ce matériau composite pourra servir à la fabrication de panneaux de revêtement, de gaz de synthèse, comme de l’éthanol ou le méthanol, ou encore à de la valorisation énergétique, en le brûlant pour générer de l’électricité, de la vapeur ou de la chaleur.

Ce qu’on veut, c’est éviter l’enfouissement des EPI, mais aussi d’autres biomasses.

Martin Gagnon, MGA Environnement

Si la perspective de brûler des matières constituées de ressources fossiles n’apparaît pas écologique au premier abord, Martin Gagnon répond que leur combustion permettra d’éviter la consommation d’autres carburants fossiles.

Défi logistique

La technique de MGA Environnement fonctionne déjà, mais le projet pilote lui permettra de le faire passer à une échelle industrielle, afin, souhaite-t-elle, de pouvoir l’exporter dans d’autres régions.

L’entreprise doit notamment s’adapter à la très faible « masse volumique » des EPI, qui est d’environ 46 kilogrammes par mètre cube (kg/m3), contre 350 kg/mpour de la biomasse forestière.

Le défi avec les EPI, ce n’est pas de traiter le tonnage, c’est de traiter le volume.

Martin Gagnon

MGA Environnement commencera donc ce mois-ci à recevoir les masques récupérés à l’Hôtel-Dieu, puis dans les autres établissements du CIUSSS-Estrie, avant d’élargir son approvisionnement à d’autres importants générateurs.

« On veut ouvrir à d’autres institutions, comme les [centres de services] scolaires », a indiqué Martin Gagnon, qui envisage de le faire avant la fin de l’année scolaire.

« On vise une entente d’approvisionnement simple, explique-t-il. On veut contrôler ce qu’on va recevoir, quand et comment. »

Économie circulaire

Le projet pilote du CIUSSS-Estrie « favorise l’économie circulaire régionale », ce qui le distingue des autres solutions de récupération des EPI, fait valoir Manon Larivière, directrice des services techniques de l’organisation.

Selon Recyc-Québec, une seule des rares entreprises offrant la récupération des masques de protection les traite au Québec ; les autres les acheminent aux États-Unis.

Et le coût de ces solutions est très élevé : il revient entre 10 000 $ et 20 000 $ par tonne métrique, calcule Patrice Cordeau, vice-recteur adjoint au développement durable à l’Université de Sherbrooke.

Ces services « clés en main » sont « formidables » pour répondre à des besoins à petite échelle, mais « il n’y a pas de solution à grande échelle pour les grands générateurs », explique-t-il.

L’objectif du projet pilote est de maintenir le coût de l’opération inférieur à celui de l’enfouissement, qui est d’environ 120 $ par tonne, au Québec.

L’Université de Sherbrooke, qui contribuera au projet en fournissant deux chercheurs de sa faculté de génie, accumule par ailleurs depuis octobre les masques qu’elle récupère afin de les expédier à MGA Environnement.