L’arrivée en très peu de temps de plusieurs vaccins contre la COVID-19 a alimenté l’espoir d’une fin prochaine de la pandémie, mais il reste à savoir pendant combien de temps les gens seront ensuite protégés contre ce nouveau coronavirus.

On ne connaîtra pas précisément avant un certain temps la période d’immunité offerte par ces vaccins, qui variera probablement d’une personne à l’autre, préviennent les experts. Mais il y a de bonnes raisons de croire que les personnes vaccinées pourraient obtenir un niveau de protection à long terme.

Steven Kerfoot, professeur agrégé au département d’immunologie et de microbiologie à l’Université Western, en Ontario, affirme que les données sur les infections passées et les vaccins eux-mêmes suggèrent « une réponse immunitaire parfaitement bonne qui durera jusqu’à quelques années pour la plupart des gens ».

« On ne peut pas le savoir avec certitude — il n’y a aucun test pour nous dire que cela durera 10 ans », prévient toutefois le professeur Kerfoot. « Mais il n’y a absolument aucune preuve non plus indiquant que l’immunité va disparaître dans un an. »

Les experts peuvent quand même se faire une idée de la durée de la réponse immunitaire d’un vaccin en examinant la protection obtenue après une infection naturelle par le même virus. Alors que certaines études ont suggéré que les anticorps peuvent disparaître relativement rapidement après des infections au SRAS-CoV-2, d’autres ont conclu à une réponse immunitaire plus persistante.

Plus de recul

Une étude d’une équipe de l’Université de Toronto publiée en octobre dernier a révélé que les anticorps restaient stables dans le sang et la salive pendant au moins 115 jours après l’infection. Il s’agit de l’intervalle le plus long qu’a mesuré l’étude — rien n’indique donc que les anticorps n’ont pas persisté au-delà de cette durée. Une étude américaine publiée la semaine dernière a d’ailleurs montré que les anticorps étaient présents dans le système pendant au moins huit mois.

Jason Kindrachuk, virologue à l’Université du Manitoba, s’attend à ce que des études détectent des anticorps plus longtemps encore, à mesure que les données remonteront plus loin dans le temps. À l’heure actuelle, dit-il, notre « « perspective à long terme » est vraiment celle des 12 derniers mois ».

« On espère que les personnes naturellement infectées auront une immunité au-delà de cette période d’un an, qu’elle pourra durer plusieurs années », a-t-il déclaré. « Mais nous commençons à entrer dans le champ des hypothèses à ce stade-ci parce que nous ne savons pas. »

Et même les études qui suggèrent une baisse précoce des niveaux d’anticorps ne sont pas alarmantes, soutient le professeur Kerfoot. Car les anticorps apparaissent rapidement pour combattre l’infection une fois qu’elle s’installe, mais commencent à disparaître progressivement par la suite, explique-t-il. Ce qui reste après, c’est « une lente réduction, sur plusieurs années, d’anticorps spécifiques, de cellules immunitaires et de cellules mémoire », qui peuvent aider à combattre les futures infections causées par le même virus.

« Ce dont nous parlons dans ce cas n’est pas nécessairement une protection contre l’infection, mais plutôt une protection contre une maladie grave », a-t-il expliqué. « D’un point de vue immunitaire, c’est tout aussi bien. »

Les variants ?

Le professeur Kerfoot ne s’alarme pas outre mesure, par ailleurs, de l’apparition de variants potentiellement plus transmissibles du SRAS-CoV-2, qui a suscité des inquiétudes quant à l’efficacité des nouveaux vaccins.

Il ne croit pas non plus que nous aurons besoin d’un vaccin annuel contre la COVID-19, comme ceux administrés contre la grippe saisonnière : ces vaccinations annuelles sont nécessaires parce que le virus de la grippe diffère dans son état d’une année à l’autre. Un rappel du vaccin COVID-19 pourrait être nécessaire, mais le professeur Kerfoot s’attend à ce que ce soit dans des années.

Horacio Bach, professeur adjoint de maladies infectieuses à l’Université de la Colombie-Britannique, rappelle que le développement de vaccins prend généralement beaucoup plus de temps, ce qui permet d’observer une plus longue période de longévité immunitaire au cours d’essais cliniques prolongés. « Une fois que l’on a vacciné, on doit voir ces personnes après un an, deux ans, pour déterminer si elles sont protégées et comment elles sont protégées », explique-t-il.

Le professeur Kindrachuk parle lui aussi d’un processus à long terme : au fil du temps, les scientifiques peuvent continuer à développer des vaccins avec des profils d’immunité plus longs. Il s’attend d’ailleurs à ce que les vaccins de deuxième et troisième générations offrent potentiellement des améliorations sur les précédents. « Ça évolue certainement dans la bonne direction. »