Le nombre de cas de COVID-19 continue d’augmenter dans le Grand Nord québécois. Mais depuis le début de l’éclosion, il y a trois semaines, seulement dix patients ont dû être hospitalisés, dont deux aux soins intensifs. Une situation qui s’explique par la jeunesse de la population, selon la directrice régionale de santé publique du Nunavik, Marie Rochette.

« Il faut savoir que sur les cas actifs, 95 % ont moins de 65 ans. La population est jeune et est moins à risque d’hospitalisation. Mais on sait que plus on a de cas, plus on a de risques d’avoir des aînés touchés », souligne la Dre Rochette.

Mardi, seulement deux nouveaux cas se sont ajoutés au bilan quotidien de la COVID-19 pour le Nunavik, qui compte plus de 260 cas actifs. Mais la Dre Rochette explique que ce nombre ne reflète pas du tout la réalité. Dans le Nord, une bonne part des échantillons sont transportés par avion à Puvirnituq ou à Kuujjuaq pour être analysés. La mauvaise météo a retardé plusieurs vols ces derniers jours, ralentissant du coup le dépistage. La Dre Rochette s’attendait plutôt à voir environ 20 nouveaux cas mardi. Actuellement, un seul patient provenant d’une communauté du Nord est hospitalisé au Centre universitaire de santé McGill, à Montréal.

La population tient le coup

Coordonnateur de l’équipe locale de gestion de crise à Salluit, Michael D. Cameron indique que la population est « plutôt calme et suit bien les règles de santé publique ». Avec près de 200 cas actifs, Salluit est la communauté la plus touchée.

Un refuge temporaire a été ouvert pour les dix personnes sans-abri de la communauté. M. Cameron reconnaît que pour des familles nombreuses qui doivent s’entasser dans leur maison, il est parfois difficile d’appliquer l’isolement quand un membre de la famille reçoit un diagnostic positif de COVID-19.

M. Cameron précise qu’une famille de 14 personnes habite par exemple une maison de cinq pièces. Plusieurs familles de 8 ou 10 personnes habitent dans des maisons de deux chambres. « La plupart s’adaptent bien. Ils isolent le cas dans une chambre le temps de l’isolement. Mais ça peut devenir stressant », dit-il.

Au Nunavik, « le tiers des ménages habitent dans des logements surpeuplés », note la Dre Rochette.

Deux fois par jour, M. Cameron donne de l’information sur la COVID-19 à la radio. De cette façon, il parvient à rejoindre les aînés de la communauté qui sont « inquiets et restent à la maison », dit-il. Les deux épiceries locales (COOP) font des livraisons pour leurs patients aînés, explique M. Cameron.

Infirmier à Salluit, Alex Magdzinski était de garde au dispensaire il y a trois semaines quand le premier patient atteint de la COVID-19 a été dépisté dans ce village de 1241 habitants, qui compte aujourd’hui près de 200 cas actifs. Depuis, le dépistage intensif s’est déployé dans la communauté, explique-t-il.

Selon M. Magdzinski, la population reste plutôt calme. La situation est toutefois tendue pour les équipes de soins, qui sont en pénurie de main-d’œuvre. « On travaille fort ! », dit l’infirmier.

Une vaccination peu populaire

L’offre de vaccination a été augmentée dans les communautés du Nord ces dernières semaines, explique la Dre Rochette. Mais les vaccins restent peu populaires. Les taux de vaccination restent faibles dans plusieurs communautés. À Salluit, seulement 31 % de la population est vaccinée.

M. Cameron explique que la religion explique une partie de cette réticence. Il y a certes présence de personnes qui sont adeptes de théories du complot, ajoute-t-il. « Mais la majorité ne veulent tout simplement pas être vaccinés », note M. Cameron. Ce dernier explique que dans le passé, des peuples autochtones ont « servi de cobayes » pour l’essai de traitements. « Cette peur résonne encore chez beaucoup de gens. La confiance n’est pas encore là », dit-il.

La Dre Rochette note toutefois que les populations âgées présentent un taux de vaccination plus élevé que la population générale dans plusieurs communautés. « Mais il n’y a pas un engouement massif », dit-elle.

Un hôpital mobile sera déployé au cours des prochains jours à Kuujjuaq « au cas où plusieurs villages seraient en éclosion en même temps », note la Dre Rochette. « On espère ne pas en avoir besoin », dit-elle.