Santé Canada examine toujours les données du fabricant Merck sur son médicament antiviral contre la COVID-19 qui a été autorisé jeudi au Royaume-Uni.

Le régulateur fédéral a déclaré jeudi qu’il continuait de recevoir des données « à mesure que de nouvelles informations deviennent disponibles » de la société pharmaceutique Merck sur ce médicament molnupiravir, considéré comme la première pilule à traiter avec succès la COVID-19. Santé Canada n’offre aucun échéancier pour la fin du processus d’examen.

Le molnupiravir a obtenu jeudi une autorisation conditionnelle d’utilisation en Grande-Bretagne, mais on ne savait pas précisément à quel moment la pilule serait disponible là-bas.

Merck fournit des données à Santé Canada sur une base continue depuis août, alors que le produit était encore en phase d’essais cliniques. Le régulateur fédéral rappelle que son examen doit déterminer si les avantages du médicament l’emportent sur les risques. Santé Canada doit aussi s’assurer que ce médicament répond aux « exigences strictes de sécurité, d’efficacité et de qualité ».

Merck a annoncé des résultats préliminaires en septembre montrant que son médicament avait réduit de moitié les hospitalisations et les décès chez les patients présentant des symptômes précoces de COVID-19. Par contre, les résultats n’ont pas encore été évalués par des pairs ou publiés dans une revue scientifique.

La société pharmaceutique n’a pas non plus divulgué de détails sur les effets secondaires du molnupiravir, sauf pour dire que les taux étaient similaires entre les personnes qui ont reçu le médicament et celles qui ont reçu un placebo.

Contre le virus de l’influenza

Le molnupiravir avait été d’abord étudié comme traitement potentiel contre la grippe, avec un financement du gouvernement américain. L’année dernière, des chercheurs de l’Université Emory, à Atlanta, ont décidé d’utiliser le médicament comme traitement potentiel contre la COVID-19. Ils ont ensuite octroyé la licence du médicament à la pharmaceutique Ridgeback et à son partenaire Merck.

Le médicament cible une enzyme que le coronavirus utilise pour se reproduire, en insérant des erreurs dans son code génétique, qui ralentissent sa capacité à se propager et à prendre le contrôle des cellules humaines. Cette activité génétique a conduit certains experts indépendants à se demander si le médicament pourrait potentiellement provoquer des mutations entraînant des malformations congénitales ou des tumeurs.

L’Agence britannique de réglementation des médicaments et des produits de santé a déclaré que la capacité du molnupiravir à interagir avec l’ADN et à provoquer des mutations avait été étudiée « de manière approfondie » et qu’il ne s’était pas avéré présenter un risque pour l’humain.

Le docteur Sumon Chakrabarti, expert en maladies infectieuses à Mississauga, en Ontario, a déclaré que le molnupiravir est intrigant parce que les erreurs qu’il insère dans le code génétique ne sont pas reconnues comme telles par le SRAS-CoV-2. « Ça conduit donc à des mutations massives et le virus meurt », a-t-il déclaré. « C’est plutôt’cool’, en fait. »

Merck Canada a indiqué jeudi qu’un accord d’approvisionnement n’était pas encore en place, mais que des discussions avec le gouvernement canadien étaient en cours.

Le molnupiravir est également en attente d’examen par les organismes de réglementation aux États-Unis, dans l’Union européenne et ailleurs dans le monde. Aux États-Unis, la FDA a annoncé le mois dernier qu’elle convoquerait un groupe d’experts indépendants pour examiner l’innocuité et l’efficacité de la pilule fin novembre.

Merck et son partenaire Ridgeback Biotherapeutic ont demandé d’autoriser le médicament pour les adultes présentant des cas précoces de COVID-19 qui sont à risque de maladie grave ou d’hospitalisation.

La pilule, que le patient prend à la maison, a été autorisée en Grande-Bretagne pour les adultes de 18 ans et plus qui ont été déclarés positifs à la COVID-19 et qui présentent au moins un facteur de risque de développer une maladie grave, telle que l’obésité ou une maladie cardiaque. Les patients atteints de symptômes légers à modérés prendraient quatre comprimés du médicament deux fois par jour pendant cinq jours.

Selon le professeur Chakrabarti, qui n’a pas vu les données sur les études cliniques, le médicament devrait toutefois être pris au début de l’infection. « Le taux de réduction des symptômes n’est pas spectaculaire […], mais tout ce qui peut réduire les hospitalisations est bienvenu. »

Avec des informations de l’Associated Press