Une nouvelle habitude s’est glissée dans le quotidien des Québécois mercredi : à l’entrée des restaurants et des gyms, chaque personne doit dorénavant présenter une preuve vaccinale. Une mesure qui ne fait pas l’unanimité, et que certains restaurateurs n’ont pas encore appliquée mercredi, faute de préparation ou de matériel.

Au restaurant L’Avenue, situé sur l’avenue du Mont-Royal, plusieurs personnes dégustaient leur petit-déjeuner. La file de clients affamés souhaitant accéder à une table s’allongeait au fil des minutes devant le populaire établissement.

John Misiasz, serveur à L’Avenue, circulait au travers des clients en file, et scannait les codes QR de chacun au moyen d’une tablette électronique. Les personnes adéquatement vaccinées devaient ensuite indiquer leur année de naissance.

« Ça fonctionne bien, les premières personnes n’étaient pas habituées, donc je m’attends à ce que cela prenne un peu de temps [d’adaptation] », a affirmé John.

Les clients du restaurant étaient satisfaits de la mise en place du passeport vaccinal dans le restaurant. « Ça va bien, mais c’est sûr qu’on va revivre les files d’attente », estime Vincent Durand-Dubé. Il ne remet toutefois pas en doute la pertinence du passeport vaccinal. « Je trouve que c’est nécessaire », lance-t-il.

Des touristes faisaient partie de la file qui patientaient au son de musique jazz à l’extérieur de L’Avenue. Abraham et Andaniela Omani, originaires de Grande-Bretagne, avaient imprimé leur preuve de vaccination pour se soumettre aux normes québécoises. En Grande-Bretagne, le passeport vaccinal est uniquement exigé pour voyager.

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Des touristes faisaient la file à l’extérieur du restaurant L’Avenue.

« Je pense que c’est ridicule », lance Abraham, qui craint les conséquences de cette mesure sanitaire sur les entreprises.

Les tables de la foire alimentaire du Centre Eaton étaient divisées en différentes sections, délimitées par de petites barrières. Les gardiens de sécurité s’affairaient mercredi midi à scanner les codes QR de tous ceux qui voulaient y entrer.

À la place des Festivals, les restaurants visités par La Presse ont amorcé l’utilisation du passeport vaccinal sans anicroche. La gestionnaire du Lola Rosa, Laurence Gonthier, considère cependant avoir observé une diminution de l’achalandage mercredi.

« Il y a beaucoup moins de monde que d’habitude, et il y a beaucoup plus de take out », a expliqué Laurence. Certains clients n’avaient pas correctement téléchargé leur preuve vaccinale et ont pris la décision de prendre leur repas pour emporter, raconte-t-elle.

Pas encore implanté partout

À quelques pas du restaurant à déjeuner, le St-Viateur Bagel & Café ne scannait pas encore le code QR de ses clients attablés à l’intérieur mercredi. Le passeport vaccinal fera son entrée chez l’entreprise sous peu, ont assuré les employés.

Au Chocolat Favoris sur la rue Sainte-Catherine, les employés attendaient toujours de recevoir des tablettes électroniques afin de scanner les codes QR. Les employés les regardaient cependant sur le cellulaire des clients sans le scanner.

Les établissements touchés par le passeport vaccinal bénéficient de deux semaines d’adaptation, avant de se faire imposer des sanctions pour le non-respect des mesures sanitaires.

Certains restaurateurs ont toutefois refusé de s’astreindre à cette mesure.

Joey Vigliotti ferme sa salle à manger de 20 places à compter du 1er septembre. Il n’était pas à l’aise d’appliquer le passeport vaccinal. Il évoque le respect de la vie privée de ses habitués et la liberté de choisir.

Un choix déchirant, insiste le propriétaire de Vincent Sous-Marins, à Montréal-Nord. « Je dois dire à des clients que je connais depuis 12 ans et qui font marcher ma business que je dois les refuser. Je n’ai vraiment pas le cœur de faire ça. »

Il n’avait aucune envie de « faire la police pour le gouvernement », poursuit M. Vigliotti, tout de même aux fourneaux mercredi matin dans la cuisine embaumée d’un parfum de friture.

Lors d’une conférence de presse, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a réitéré son soutien au passeport vaccinal.

« C’est sûr que ça amène des défis techniques, je le comprends, mais pour moi, le passeport vaccinal est la bonne chose à faire. Bien sûr, on aurait souhaité que tout le monde se fasse vacciner, alors on a eu une phase où on a donné une carotte, on était dans l’ouverture, avec des loteries, mais à un moment donné, faut que ça arrête », a-t-elle déclaré.

Les gyms sont prêts

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Au gym Haltères et Go, le propriétaire Serge Poirier vérifie le passeport vaccinal de Carl Bérubé.

Au gym Haltàres et Go, ayant pignon sur rue dans l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie, près de huit sportifs s’entraînaient mercredi matin.

Derrière le comptoir d’accueil, un employé vérifie à une reprise le code QR de chaque client. Par la suite, il inscrit dans le système informatique que le membre du gym est adéquatement vacciné. Lors de ses prochaines visites, le sportif n’aura qu’à scanner sa carte de membre à l’entrée pour valider sa preuve de vaccination. L’opération se déroulait rondement.

Le propriétaire de l’entreprise, Serge Poirier, a évoqué que 5 % de sa clientèle refuse de se faire vacciner. « Ce que j’ai proposé à ces membres, c’est de mettre leur abonnement sur pause », a-t-il déclaré, dans le but de limiter les pertes. « J’espère que ça n’ira pas à 10 % ou 15 %, comme la population, ça va faire plus mal », ajoute-t-il.

La perte des clients réfractaires à la vaccination pourrait toutefois être compensée par ceux qui n’avaient pas encore remis les pieds dans un gym, par crainte de contracter le coronavirus.

« Il y a des gens qui ne sont pas venus [de la pandémie], qui ont commencé à vouloir venir depuis qu’il y a ce système-là », a souligné M. Poirier.