À l’issue d’une « analyse rigoureuse de la preuve », le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a annoncé jeudi qu’il ne porterait pas d’accusation dans la foulée de l’hécatombe survenue l’an dernier au CHSLD Herron, à Dorval.

Les éléments de preuve recueillis par les procureurs « ne révèlent pas la commission d’une infraction criminelle », a en effet indiqué l’organisme gouvernemental dans un communiqué jeudi matin.

Une équipe de quatre procureures a conduit l’étude juridique dans ce dossier, en se basant sur la preuve qui avait été colligée pendant l’enquête préliminaire du Service de police de la Ville de Montréal. Des compléments d’enquête et des expertises médicales ont aussi été utilisés par l’équipe d’avocates, qui a « récemment présenté son analyse aux autorités du DPCP », indique-t-on.

« Compte tenu des exigences relatives à la suffisance de la preuve pour intenter une poursuite criminelle, les procureures ont conclu que la preuve ne permettait pas le dépôt d’accusations. Cette décision ne banalise en rien les évènements tragiques qui sont survenus au CHLSD Herron, ni ne signifie qu’aucune faute de nature civile ou déontologique n’ait pu être commise », a renchéri le DPCP dans une déclaration.

L’organisation réitère par ailleurs qu'elle « compatit avec les familles des résidants décédés qui doivent non seulement vivre le deuil de leurs proches, mais aussi le regret de n’avoir pu se trouver à leur chevet dans les circonstances de la pandémie ». Plusieurs démarches sont d’ailleurs en cours afin que les familles concernées soient bien informées de la décision de ne pas porter d’accusation.

Des travaux à conclure

Le tout survient alors que les travaux de la coroner, Me Géhane Kamel, doivent reprendre le 7 septembre. Pour cette raison, le DPCP affirme qu’il ne peut donner plus d’explications pour le moment, « afin de ne pas influencer la version des témoins qui seront entendus au cours de l’enquête ou de nuire autrement au déroulement de celle-ci ».

« Il y a plusieurs témoins et personnes qui risquent d’être interpellés dans le cadre des audiences, donc si on présente notre analyse des faits, nécessairement, on pourrait involontairement biaiser certains témoignages. C’est la raison de notre retenue », a d’ailleurs précisé à La Presse la porte-parole du DPCP, MAudrey Roy-Cloutier.

Toutefois, lorsque les audiences prendront fin, « des explications pourront être fournies aux familles concernées afin de leur permettre de bien comprendre les motifs de la décision du DPCP », assurent les autorités à ce sujet.

Des dizaines de résidants du CHSLD Herron étaient morts entre les murs de l’établissement, durant la première vague de la pandémie de COVID-19.

En mai, la Cour supérieure du Québec avait approuvé une entente de 5,5 millions conclue entre les résidants, leurs proches et la direction du CHSLD Herron pour les dommages causés par l’éclosion de COVID-19 survenue dans l’établissement, au printemps 2020. L’entente, qui a été signée en mars dernier, prévoyait l’indemnisation des conjoints et des enfants des résidants défunts et des résidants survivants. Pendant la première vague, 47 personnes ont succombé au virus au sein de la résidence.

Selon le premier ministre François Legault, ce qui s’est passé au CHSLD Herron est « totalement inacceptable », a-t-il réitéré jeudi, interrogé sur la décision du DPCP lors d’un point de presse portant sur un autre sujet.

« On a déjà fait beaucoup de changements pour que cela ne se reproduise plus jamais » et on continuera à en faire, a-t-il promis. Il faut aussi surveiller de plus près les résidences privées. Encore plus que maintenant, a dit M. Legault.

Mais quant à la décision de ne pas porter d’accusation criminelle, il a souligné que le DPCP avait fait son travail et que « ce n’est pas [sa] responsabilité ».

Avec La Presse Canadienne