(Montréal) Les symptômes de la COVID longue sont possiblement attribuables à une réactivation du virus d’Epstein-Barr, suggère une nouvelle étude publiée par le journal médical Pathogens.

Le virus d’Epstein-Barr appartient à la famille des virus de l’herpès et compte parmi les virus humains les plus répandus. Les infections surviennent fréquemment à l’enfance et causent habituellement à ce moment des symptômes bénins. Le virus entre ensuite en période de latence.

L’auteur principal de l’étude, le chercheur Jeffrey E. Gold du groupe environnemental américain World Organization, et ses collègues ont constaté que le virus d’Epstein-Barr avait été réactivé chez les deux tiers des 68 patients présentant des symptômes de la COVID longue qu’ils ont testés, comparativement à seulement 10 % des patients du groupe témoin.

Il s’agit là d’une hypothèse intéressante, mais incomplète, a estimé le docteur Alain Piché, un spécialiste du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke qui compte parmi les principaux experts de la COVID longue au Québec.

« Je dirais que c’est l’éternelle question de l’œuf et de la poule : est-ce que c’est une cause ou est-ce que c’est une conséquence ? Est-ce que le fait d’avoir une longue COVID peut réactiver le virus d’Epstein-Barr, et la réactivation n’a rien à voir avec les symptômes, ou bien est-ce que l’Epstein-Barr est réactivé et c’est pour ça qu’on aura des symptômes ? », a analysé le docteur Piché.

L’étude ne permet pas non plus de savoir quand le virus d’Epstein-Barr a été réactivé chez ces patients, par exemple si cela s’est produit avant même qu’ils ne soient infectés par le SRAS-CoV-2, a-t-il ajouté.

On constate un phénomène comparable concernant la vitamine D, a rappelé le docteur Piché. Plusieurs patients atteints de la COVID longue présentent ainsi des taux faibles de vitamine D, mais on ne sait pas s’il s’agit d’une cause ou d’une conséquence de la maladie.

« Chez les patients chez qui les symptômes de longue COVID disparaissent, est-ce que les signes de réactivation du virus d’Epstein-Barr disparaissent ou pas ?, a demandé le docteur Piché. Si le patient n’a plus de symptômes, mais qu’on trouve encore des signes de réactivation du virus d’Epstein-Barr, alors là c’est moins convaincant qu’il y a une relation de causalité entre les deux. »

La piste reste quand même intrigante. On peut par exemple lire sur le site des Centres de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis (CDC) que certaines personnes infectées par le virus d’Epstein-Barr pourront ressentir de la fatigue « pendant plusieurs semaines ou même des mois ». Les patients atteints de la COVID longue rapportent très fréquemment un sentiment de fatigue chronique.

De plus, ajoute le site des CDC, les gens dont le système immunitaire est affaibli (par exemple, parce qu’il combat déjà une autre infection) seront plus susceptibles de présenter des symptômes en cas de réactivation du virus d’Epstein-Barr.

Cela étant dit, « il y a encore beaucoup d’inconnu », a prévenu le docteur Piché, et il faudrait par exemple organiser une étude longitudinale prospective pour approfondir cette hypothèse.

« De là à dire que la réactivation du virus d’Epstein-Barr est responsable des symptômes de la longue COVID, je pense que ce serait prématuré à ce stade-ci, a-t-il dit. C’est intéressant, ça ouvre des pistes, mais ça prend de meilleures études pour valider cette hypothèse-là à ce stade-ci. »