(Québec) Québec entame sa dernière ligne droite vers la vaccination de la population générale en élargissant sa campagne aux malades chroniques âgés de moins de 60 ans, dès ce vendredi, et aux personnes présentant une incapacité motrice ou intellectuelle, ou présentant un trouble du spectre de l’autisme, la semaine prochaine.

C’était une annonce très attendue parmi les proches et les familles de personnes vivant avec une maladie chronique ou un handicap. Grâce à des arrivages plus importants que prévu du vaccin de Pfizer, le gouvernement Legault a élargi la vaccination à ces deux derniers groupes avant d’ouvrir la vaccination à la population générale.

« Je sais que les Québécois ont hâte […] de se faire vacciner », a lancé le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, jeudi. « Je pense que de mettre en priorité et de terminer nos personnes plus vulnérables, c’était le bon choix à faire. [Surtout] avec les nouveaux vaccins qu’on a obtenus la semaine dernière », a-t-il ajouté.

Québec avait dans un premier temps, à la fin de mars, ouvert la vaccination aux malades chroniques « à très haut risque » et qui étaient suivis en milieu hospitalier. Le gouvernement avait essuyé les critiques alors que les partis de l’opposition et de nombreux groupes réclamaient que la liste de malades admissibles soit élargie.

C’est le Comité sur l’immunisation du Québec qui a établi l’ordre de priorité des clientèles à vacciner en tenant compte de la disponibilité des doses. « On a eu la chance d’avoir 900 000 vaccins supplémentaires en mai », a souligné M. Dubé.

Ainsi, les personnes atteintes de maladie chronique et qui ont moins de 60 ans pourront, dès ce vendredi, prendre rendez-vous dans un centre de vaccination ou en pharmacie. À compter du 28 avril, ce sera au tour de « toute personne présentant une incapacité motrice, intellectuelle, de la parole ou du langage, visuelle, auditive ou associée à d’autres sens, ou encore, liée à un trouble du spectre de l’autisme ».

On autorise aussi les proches aidants qui accompagnent les personnes vivant avec un handicap à être vaccinés. Selon les estimations des autorités, ces nouvelles clientèles représentent environ 800 000 Québécois.

Consultez la liste des personnes admissibles

Québec dit « se fier à la bonne foi » des gens et ne demandera aucun document attestant l’état de santé de ces deux nouveaux groupes. On ne veut pas que les employés des centres de vaccination « jouent à la police », a indiqué M. Dubé.

« Je pense que ces gens-là ont déjà beaucoup à faire avec la vie qu’ils ont. Je pense qu’ils attendent depuis très longtemps d’être vaccinés », a fait valoir le ministre de la Santé.

Le DHoracio Arruda, directeur national de santé publique du Québec, a ajouté qu’il fallait faire confiance aux gens. « Qu’il y ait des individus qui essaient de se faufiler [on ne peut pas l’empêcher], mais la lourdeur que cela aurait entraînée dans les cliniques [de demander des preuves], ça ne vaut pas la peine pour ça », a-t-il expliqué.

Les autorités ont par ailleurs fait valoir que le « tour » de la population générale est le prochain. « Il vous reste à peine quelques semaines, pour ne pas dire quelques jours, avant de pouvoir prendre vos rendez-vous », a lancé le DArruda.

En route vers le 24 juin

Québec maintient son objectif d’amorcer la vaccination de la population générale d’ici la fin de mai. Le ministre Christian Dubé et le directeur de la campagne de vaccination au Québec, Daniel Paré, n’ont pas voulu s’avancer sur le déroulement de cette ultime étape, hautement attendue partout au Québec. Le gouvernement s’est engagé à ce que tous les Québécois qui le souhaitent aient obtenu leur première dose de vaccin d’ici au 24 juin.

« Donnez-nous encore quelques jours, puis on va vous revenir avec des réponses beaucoup plus précises », a assuré M. Dubé. Daniel Paré a annoncé que deux sites en entreprise seraient déployés dès la semaine prochaine, ce qui viendra « augmenter la capacité » vaccinale du Québec. On annoncera aussi au cours des prochains jours un premier projet de vaccination à l’auto, sans rendez-vous.

M. Dubé s’est aussi félicité jeudi d’atteindre un nouveau « record » : 84 837 doses supplémentaires ont été administrées dans la journée de mercredi, auxquelles s’ajoutent 935 doses données « avant le 21 avril ». De ce nombre, environ 30 000 doses du vaccin d’AstraZeneca auraient été administrées, la plupart sans rendez-vous.

Le ministre Dubé a aussi indiqué jeudi que plus de 100 000 personnes avaient pris rendez-vous pour obtenir le vaccin d’AstraZeneca. Selon Daniel Paré, le Québec aura écoulé sa réserve de quelque 200 000 vaccins d’AstraZeneca d’ici « quatre à cinq jours ».

Presque 2,6 millions de Québécois ont déjà reçu leur première dose, ce qui représente environ 29,2 % de la population. Si on tient compte seulement des personnes admissibles, celles de 16 ans et plus, ce taux monte à 35,7 %.

Consultez le tableau de suivi de la campagne de vaccination par groupe d’âge

Enfin, 41 299 personnes ont déjà reçu leur deuxième dose, soit 0,5 % de la population. Avec 11 000 vaccinateurs formés, « les équipes sont prêtes à recevoir plus de vaccins », a aussi indiqué le ministre Dubé.

Jeudi marque aussi des records d’administration de doses dans plusieurs régions, dont Montréal avec 19 090, la Capitale-Nationale avec 10 405, l’Estrie avec 6277 et l’Outaouais avec 4981. Avec plus de 3 millions de doses reçues, le gouvernement Legault dispose actuellement d’une réserve d’environ 477 000 vaccins en plus.

Vaccin à la rentrée scolaire ?

Alors que des sociétés pharmaceutiques, comme Pfizer, réalisent des études sur l’effet de leur vaccin chez les enfants, Québec étudie « plusieurs scénarios » de vaccination de cette clientèle. Pfizer évalue que son vaccin est efficace à 100 % chez les 12 à 15 ans, notamment. « Oui, on travaille sur des scénarios de vaccination […] des jeunes », a précisé Daniel Paré, évidemment si Santé Canada donne son aval à la vaccination des enfants. « Je pense que c’est une possibilité », a précisé le DArruda, citant les travaux de Pfizer. Il souligne que d’autres vaccins « qui ne sont pas encore sur le marché » pourraient aussi arriver d’ici le mois de septembre. « C’est une hypothèse, mais il va falloir avoir les études cliniques adéquates pour être capables de le faire », a-t-il prévenu.

Fanny Lévesque, La Presse

Pas d’AstraZeneca

Le major-général Dany Fortin a indiqué jeudi que, compte tenu de la situation en Inde, le Canada ne recevra aucune dose du vaccin d’AstraZeneca du Serum Institute of India d’ici la fin du mois d’avril. Même s’il reste 1,5 million de doses à livrer et que le fabricant s’est engagé à respecter cette livraison, le gouvernement canadien surveillera la situation de près, a noté Joëlle Paquette, haute fonctionnaire de Services publics et Approvisionnement Canada. « La livraison de 1,5 million de doses est prévue d’ici la fin de juin, mais évidemment, la situation en Inde et l’interdiction sur l’exportation pourraient [avoir une incidence sur] les livraisons », a-t-elle soutenu en conférence de presse. Québec a dit ne pas s’inquiéter de cette nouvelle puisque les arrivages du vaccin de Pfizer couvrent les nouveaux groupes. Le Canada recevra cependant, dans la semaine du 26 avril, les doses initiales du vaccin de Johnson & Johnson (Janssen au Canada). La distribution aux provinces du vaccin à une dose se mettra en branle début mai.

Mélanie Marquis, La Presse

Femmes enceintes : le gros point d’interrogation

Pourquoi les femmes enceintes ne font-elles pas partie des groupes vulnérables priorisés ? La semaine dernière, la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada (SOGC) le réclamait de toutes les provinces. « Il y a actuellement une vague de femmes enceintes qui arrivent dans les unités de soins intensifs en Ontario et beaucoup [ont besoin de respirateurs], peut-on lire dans l’avis de la SOGC. Ces femmes tombent extrêmement malades et très rapidement […]. » Selon le gynécologue ontarien Mark Walker, cité jeudi dans l’Ottawa Citizen, les femmes enceintes représenteraient la moitié des patients aux soins intensifs dans certains hôpitaux torontois. En conférence de presse, les autorités québécoises se sont montrées beaucoup moins catégoriques que la SOGC et n’ont pas caché leurs réticences. Christian Dubé, ministre de la Santé et des Services sociaux, a indiqué que la Santé publique était en train d’étudier la question. Et le Dr Horacio Arruda a ajouté que pendant la grossesse, la prudence est toujours particulièrement de mise avec de nouveaux vaccins. « Pour la femme enceinte, ce qu’on demande, c’est qu’elle en discute avec son médecin », a-t-il dit.

Louise Leduc, La Presse

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