Le masque prendra plus de place dès ce jeudi partout au Québec. Le port du masque médical est désormais obligatoire dans tous les milieux de travail. Le gouvernement impose aussi le masque ou le couvre-visage lors d’activités extérieures en groupe avec des personnes de ménages différents, y compris la marche et tout autre loisir.

C’est « devant la menace des variants » que la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) dit avoir pris la décision d’exiger le port du masque médical en continu à l’intérieur dans les milieux de travail. « La prévalence des nouveaux variants est inquiétante », a affirmé l’organisme, invitant les milieux de travail « à la plus grande prudence ».

Fin mars, l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) avait émis une recommandation en faveur du port du masque en tout temps au travail. C’est ainsi que le port du masque médical ou d’un « masque attesté par le Bureau de normalisation du Québec » est désormais obligatoire dans tous les milieux de travail. « [Il s’agit] d’une mesure additionnelle à respecter à l’intérieur pour limiter la propagation du virus et de ses variants, en plus de la distanciation physique et de la présence de barrières physiques », a ajouté la CNESST.

Un employé de bureau devra porter son masque même une fois installé à son poste de travail. Pour le travail à l’extérieur, le port d’un masque médical ou d’un masque attesté par le Bureau de normalisation est exigé si des interactions à moins de deux mètres avec des collègues peuvent se produire.

Spécialiste en hygiène du travail à l’École de santé publique de l’Université de Montréal, Maximilien Debia accueille cette nouvelle avec enthousiasme. « C’est quelque chose qu’on demandait depuis un an maintenant. Cela dit, il n’est jamais trop tard. Toute éclosion évitée dans les prochains jours, c’est tant mieux pour la suite », raisonne-t-il.

L’expert ne cache toutefois pas qu’il aurait aimé voir cette mesure arriver beaucoup plus tôt. « Si on avait fait ça l’année dernière, c’est certain que la première vague aurait été mieux [gérée], mais maintenant, avec les variants, imposer le masque était nécessaire. Et les gens vont le comprendre », soutient-il.

« Ce qu’on voit aujourd’hui, c’est qu’on n’était pas fous il y a un an, quand on demandait au gouvernement de prioriser le port du masque. Dans les premiers mois, on a été très réticent à l’utiliser au Québec, alors qu’on savait que c’était gagnant dans plusieurs pays d’Asie », poursuit M. Debia.

Les aérosols ne s’arrêtent pas à un ou deux mètres. Si les personnes sont assises à distance, le problème de la contamination existe, même s’il est amoindri.

Maximilien Debia, professeur à l’École de santé publique de l’Université de Montréal

« C’est une stratégie qui sera efficace pour aller à la source de la génération des aérosols, avant la ventilation et la distanciation, surtout dans les milieux intérieurs qui sont à forte densité », explique M. Debia.

Un resserrement devenu inévitable

Pour le DMatthew Oughton, spécialiste des maladies infectieuses à l’Hôpital général juif de Montréal, cette mesure arrive à point, quand on sait « que la majorité des éclosions proviennent de milieux de travail ». Selon les données du gouvernement, près de 53 % des foyers de contamination y émergent.

Resserrer, en ce sens-là, a beaucoup de sens, surtout avec la forte propagation des variants plus transmissibles. Cela dit, il ne faut pas que cette consigne remplace les autres, dont la distanciation et la ventilation adéquate.

Le DMatthew Oughton, spécialiste des maladies infectieuses à l’Hôpital général juif de Montréal

D’après le DOughton, la décision de la CNESST fera surtout en sorte de supprimer toute « ambiguïté » dans les milieux. « Le fait que ça soit obligatoire partout, ça lance un message clair et il n’y a plus de place pour l’indiscipline. Les conséquences sont claires, donc ça supprime toute forme d’ambiguïté et d’exception, si on veut », dit-il.

« J’applaudis cette décision. Quant à savoir si ça aura un impact majeur, il faudra voir avec le temps, mais déjà, on peut penser que si ça avait été fait plus tôt, quand les variants n’étaient pas prédominants, l’impact aurait été plus fort », insiste aussi le médecin qui, comme Maximilien Debia, trouve « tout de même pertinent » d’implanter la mesure maintenant, alors que Montréal « n’a pas encore vu une explosion aussi forte » qu’à Québec ou à Gatineau, par exemple.

Le masque à l’extérieur

Dans ses nouvelles restrictions annoncées mardi soir, le gouvernement de François Legault a aussi rendu obligatoire, sans tambour ni trompette, le port du masque ou du couvre-visage « lors d’activités extérieures en groupe » avec des personnes de différents ménages. Cela s’appliquera autant en zone rouge qu’en zone orange. Seule exception : les cas où les personnes « sont assises à deux mètres de distance ».

PHOTO PAUL CHIASSON, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

François Legault, premier ministre du Québec

« Quand tu fais une activité à l’extérieur, tu portes le masque », a résumé un porte-parole au cabinet de François Legault, mercredi, en confirmant que la marche fait aussi partie des nouvelles restrictions.

Il faudra donc porter le couvre-visage en tout temps, lors d’une balade avec des amis ou des membres de sa famille qui n’habitent pas sous le même toit.

En zone orange, le masque d’intervention sera aussi obligatoire à l’école primaire, dès les premières années. « Je sais que certains parents sont inquiets de l’impact chez les jeunes enfants, mais on le fait déjà en zone rouge et ça se passe très bien », a dit le premier ministre mardi.

« Le port d’un masque ou d’un couvre-visage est obligatoire dans les arénas », rappelle aussi le gouvernement dans un communiqué paru après la conférence de presse de mardi. Comme en zone rouge, lorsqu’ils étaient ouverts, les gyms devront tenir un registre du masque obligatoire, précise-t-on également.

En février, Québec avait ordonné l’obligation de porter un masque N95 ou un masque de protection supérieure pour les travailleurs de la santé en zone chaude. La nouvelle avait été bien accueillie, mais des syndicats, dont la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, avaient soutenu que l’annonce arrivait « trop tard », alors que « plus de 30 000 employés du réseau de la santé [avaient] déjà été infectés par la COVID-19 ».

Dans un rapport paru mardi, l’INSPQ conclut que le port du masque lors de la pratique d’une activité physique d’intensité modérée à élevée a « été peu étudié chez les adultes et très peu chez les enfants ». « Il n’existe pas de consensus, ni dans les écrits scientifiques ni dans les recommandations de santé publique, concernant les risques à la santé associés », écrivent les experts, précisant toutefois que les données scientifiques « ne font pas état d’un risque avéré pour la santé de porter un masque » lors d’un effort physique, surtout chez les adultes « en bonne santé qui sont en mesure de gérer l’intensité de leur activité et leur respiration ».