(Québec) Le nombre d’infections augmente de manière « exponentielle » dans la capitale, frappée durement par les variants, si bien que la Santé publique exhorte la population nouvellement en zone rouge à la plus grande prudence à la veille du congé pascal.

Les écoles, les restaurants, les commerces non essentiels, les gyms ou encore les théâtres ont dû fermer leurs portes jeudi soir, et ce, pour au moins 10 jours à Québec, à Lévis et à Gatineau. Quatre régions ont aussi basculé en zone rouge.

La nouvelle annoncée mercredi a eu l’effet d’une douche froide pour de nombreux entrepreneurs de la capitale, qui ont dû rouvrir puis refermer leur établissement en l’espace de trois semaines.

Mais la situation sanitaire est telle à Québec que les autorités n’avaient pas le choix, a affirmé jeudi le directeur régional de santé publique de la Capitale-Nationale, lors d’une conférence de presse manifestement destinée à mettre en garde la population.

PHOTO ERICK LABBÉ, LE SOLEIL

Le DAndré Dontigny, directeur régional de santé publique de la Capitale-Nationale, en conférence de presse, jeudi

« On invite tout le monde à rester à la maison. On sait que dans une zone rouge, il y a possibilité d’être en interaction à l’extérieur, on vous demande de le faire le moins possible », a lancé le DAndré Dontigny.

Ce dernier a dressé le portrait d’une situation « très préoccupante ». Après les 194 cas de mercredi, la région dénombrait jeudi 261 nouveaux cas. « On s’attend encore à beaucoup plus vendredi. On est dans une situation exponentielle », a-t-il prévenu.

En février, il n’était pas rare de compter moins de 30 nouveaux cas certains jours. À titre de comparaison, le pire bilan quotidien dans la région remonte au 4 décembre, avec 310 nouvelles infections.

Les variants représentent de 70 % à 80 % des nouveaux cas, selon la Santé publique. « C’est une évolution extrêmement rapide. On sait que le variant est très contagieux », rappelle le directeur régional de santé publique, qui montre du doigt le variant britannique.

Mega Fitness : 141 cas

Huit personnes se trouvent aux soins intensifs dans la Capitale-Nationale. Trois patients âgés de 36 à 61 ans y ont d’ailleurs été admis depuis mercredi, a précisé le DMathieu Simon, chef des soins intensifs à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec.

Les hospitalisations sont légèrement à la hausse. Ce sont les soins intensifs qui sont très occupés.

Le DMathieu Simon, chef des soins intensifs à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec

« Ce sont des personnes plus jeunes, qui ont une réserve physiologique plus grande. Ils peuvent endurer une maladie sévère à la maison et se dire : ‘‘ce n’est pas ça’’ ou ‘‘ça va passer’’. »

La campagne de vaccination chez les personnes âgées explique selon lui le changement du portrait aux soins intensifs. « Dieu merci, le variant arrive après la première vague de vaccination », a ajouté le DSimon.

La région doit aussi composer avec une importante éclosion au Mega Fitness Gym, qui a été fermé d’urgence mercredi. Elle avait recensé en date du 1er avril 141 cas positifs et une vingtaine d’éclosions en milieu de travail.

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Dan Marino, propriétaire du Mega Fitness Gym

Le propriétaire du gymnase, Dan Marino, a souvent fait les manchettes alors que la région était en zone rouge, car il menaçait de défier le gouvernement et d’ouvrir son établissement.

Dans un statut Facebook jeudi soir, M. Marino a juré qu’il avait instauré des « mesures au-delà des attentes » pour prévenir une éclosion. Il a affirmé avoir lui-même contracté le virus. « Ma santé va mieux », écrit-il.

« Un coup dur »

L’annonce de mercredi a pris de court des entrepreneurs. Les restaurants, qui avaient pu rouvrir le 8 mars, se préparaient à la fin de semaine de Pâques.

« C’est sûr qu’il y aura des pertes financières. Les chambres froides sont pleines », lance Louis Bouchard Trudeau, copropriétaire du restaurant Le Pied Bleu. « C’est plate. Je suis en train de me demander qui je vais devoir couper la semaine prochaine. »

Le restaurateur dit comprendre qu’il « s’agit d’une situation exceptionnelle dans une situation exceptionnelle ».

Le propriétaire de la microbrasserie Griendel, Martin Parrot, a des mots plus durs à l’endroit du gouvernement. Il est « extrêmement fâché » par la décision de rouvrir, puis de refermer en l’espace de 25 jours.

Quand ils ont rouvert, on espérait ne pas devoir refermer dans deux, trois semaines. On se disait : “Ça ne se peut pas que ça arrive, il faut leur faire confiance, à ces gens-là, ils doivent savoir ce qu’ils font…’’ Mais apparemment, non.

Martin Parrot, propriétaire de la microbrasserie Griendel

Il est atterré pour ses employés. « J’ai des employés qui venaient de lâcher des emplois ailleurs pour revenir ici à temps plein. J’en ai qui ont eu du mal à joindre les deux bouts dans la dernière année, et là, du jour au lendemain, tu les repousses de côté. »

Le maire de Québec a lancé un appel à la population jeudi pour qu’elle soutienne les restaurants en commandant des repas à emporter ou en livraison.

« C’est sûr que mercredi, ç’a été tout un coup dur. Ils sentaient le beau temps arriver, on avait l’impression de revivre, les gens prenaient des cafés sur le trottoir », s’est désolé Régis Labeaume.

Le maire a une fois de plus invité sa population à suivre les consignes sanitaires, même s’il se dit conscient de la « fatigue ». « Mais il n’y a pas de miracle là-dedans, rappelle Régis Labeaume. Il faut que la contamination diminue et éventuellement s’élimine. »