(Ottawa) Le président de Pfizer Canada a déclaré lundi que lorsque l’entreprise a signé avec Ottawa un accord d’achat, en août dernier, elle ne s’attendait pas à ce que son vaccin soit approuvé au Canada avant février.

Cole Pinnow a également déclaré au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes, lundi, que des changements dans le calendrier de dosage et des avis contradictoires pourraient rendre plus de citoyens hésitants à se faire vacciner.

Le Comité consultatif national de l’immunisation a recommandé de reporter l’administration de la deuxième dose du vaccin, la faisant passer de trois ou quatre semaines à quatre mois après la première dose. Le Comité a émis cet avis parce que les données actuelles sur une seule dose montrent qu’elle est très efficace et que plus de personnes pourraient recevoir leur première dose plus tôt que prévu, alors que les vaccins sont rares au Canada.

Selon M. Pinnow, cette rareté s’explique notamment par le fait que lorsque le gouvernement canadien a signé le 1er août dernier un accord avec Pfizer, il croyait que le vaccin ne serait approuvé au Canada que bien après la nouvelle année.

Pendant ce temps, le Royaume-Uni et les États-Unis ont vu la possibilité d’obtenir l’autorisation du vaccin avant Noël et ces pays ont planifié leurs livraisons en conséquence, a-t-il déclaré. « Ce n’est qu’à la mi-novembre que nous avons identifié une voie qui nous permettrait de proposer ce produit aux Canadiens en décembre », a expliqué M. Pinnow. « Depuis lors, nous nous efforçons d’accélérer la livraison dans ce pays. »

Selon M. Pinnow, lorsque les premières doses ont été livrées, le 14 décembre, le Canada était le deuxième grand pays au monde à les recevoir — et « presque deux mois plus tôt que prévu ».

Pfizer devait expédier quatre millions de doses entre janvier et mars. La société a pu expédier 255 000 doses en décembre et M. Pinnow a indiqué lundi que Pfizer augmenterait ses livraisons d’ici la fin du mois de mars à 5,5 millions de doses.

Un Canadien sur 20

Plus de 1,8 million de Canadiens ont maintenant reçu une première dose de vaccin et avec les livraisons plus rapides, le nombre de personnes vaccinées chaque semaine a augmenté. Mais le Canada reste derrière bon nombre de ses pairs : le Royaume-Uni a vacciné plus d’une personne sur trois, les États-Unis plus d’une sur quatre, et une grande partie de l’Europe au moins une personne sur 12. Le Canada a vacciné environ une personne sur 20.

Mais la lenteur du déploiement, la semaine dernière, a incité le Comité consultatif national à reporter la deuxième dose jusqu’à quatre mois — et la plupart des provinces respectent cette recommandation. Chaque Canadien adulte qui le souhaite devrait donc être vacciné avant le 1er juillet, plutôt que le 30 septembre, comme Ottawa l’espérait jusque-là.

Mais M. Pinnow a rappelé que les essais cliniques de Pfizer démontrent clairement l’efficacité du vaccin lorsqu’il est administré en deux doses, à 21 jours d’intervalle. Les essais de Pfizer ont conclu que la double dose était efficace à 95 % pour atténuer ou empêcher les symptômes graves de la COVID-19.

M. Pinnow a souligné lundi que c’est aussi ce que Santé Canada avait indiqué en autorisant l’utilisation du vaccin au pays — et il craint que ces avis contradictoires « créent des inquiétudes, de la confusion et potentiellement de l’hésitation chez certaines personnes au Canada ».

Une première dose efficace

La critique conservatrice en matière de santé, Michelle Rempel Garner, a demandé à M. Pinnow si le Comité consultatif avait contacté Pfizer avant de publier son avis : la réponse est non, ce qui a fait sursauter la députée. « C’est effrayant », a-t-elle dit.

Le Royaume-Uni a retardé la deuxième dose de 12 semaines et une étude menée en Écosse a suggéré que la première dose du vaccin Pfizer et de celui d’Oxford-AstraZeneca avait déjà un effet important pour réduire les hospitalisations et les décès des personnes de plus de 80 ans.

Le Québec et la Colombie-Britannique ont aussi signalé des améliorations significatives de la situation dans les foyers de soins de longue durée après que la plupart des résidents ont reçu leur première dose en janvier et février. Le Canada est le seul pays à suggérer de retarder la deuxième dose de quatre mois. Toutes les provinces ont déclaré qu’elles avaient l’intention de suivre cette recommandation.

Les députés membres du comité de la santé ont également questionné M. Pinnow sur les détails du contrat Pfizer, qui est demeuré secret. Le président de Pfizer Canada a lui aussi refusé à plusieurs reprises de divulguer les détails du contrat, y compris combien le Canada paie par dose, ou si le Canada avait dû payer plus pour que ses doses soient livrées plus tôt que prévu.

M. Pinnow a soutenu que la divulgation des détails du contrat ne ferait rien pour faire entrer les vaccins plus rapidement au Canada.