« Sauvons Pâques ». C’est le nom d’une pétition lancée à la mi-janvier par une paroisse montréalaise, qui a recueilli près de 900 signatures. Ses auteurs proposent que la capacité d’accueil des lieux de culte soit calculée en fonction de leur superficie, comme dans plusieurs pays européens.

« Dans beaucoup de pays européens, dont la France, la capacité d’accueil des églises durant la pandémie dépend de leur taille en mètres carrés », explique Élisabeth Boily, adjointe à la mission à la paroisse Saint-Bonaventure, dans Rosemont, qui a lancé la pétition.

« Avoir 10 personnes dans une chapelle et 10 personnes à l’Oratoire, ça n’a pas de sens. Les gens pensent que Noël est la fête chrétienne la plus importante, mais c’est Pâques, précise Mme Boily. Alors j’aimerais qu’on puisse être plus que 25 pendant le carême et à Pâques, dans les églises qui sont assez grandes. »

Que pense-t-elle du jugement rendu vendredi autorisant 10 personnes par salle ? « Dans la réalité de nos célébrations, multiplier les rencontres à 10, ce n’est pas très utile et c’est très compliqué ; déjà de gérer 25 [personnes] dans deux lieux n’était vraiment pas simple », dit Mme Boily.

L’annonce, mardi dernier, de nouvelles mesures qui entreront en vigueur à partir de la fin de février n’ont pas rassuré les instigatrices du mouvement. « Les lieux de culte devront rester à 10 personnes en zone rouge et 25 en zone orange. En zone orange, les restaurants seront ouverts et deux semaines plus tard, les cinémas et les salles de spectacle aussi. Il faut que les gens puissent se rendre compte de cette incohérence et du non-respect du fait religieux par le gouvernement. Comment expliquer que les autorités chrétiennes au Québec ne se lèvent pas pour réclamer justice ? »

À l’été et au début de l’automne, les églises avaient le droit d’accueillir 250 personnes, mais cette limite pouvait être plus basse s’il n’était pas possible de pratiquer la distanciation physique, à cause de la taille ou de la configuration des lieux, souligne Pierre Murray, secrétaire de l’Assemblée des évêques du Québec. Mais à part ce point, « il n’y a personne au Canada ou aux États-Unis qui a fait varier la capacité d’accueil des lieux de culte en fonction de leur superficie, dit Mgr Murray. Nous sommes en train de nous assurer qu’il n’y a pas deux poids, deux mesures avec les salles de spectacle et les cinémas, qu’ils ne peuvent pas avoir plus de monde que les lieux de culte. »

« La foi, c’est communautaire »

Plusieurs critiques des fidèles qui demandent à avoir le droit de se réunir en plus grand nombre affirment qu’on peut très bien prier seul. « Je respecte ce point de vue, mais pour moi, le christianisme, la foi, c’est communautaire, dit Mme Boily. On a réussi à monter une super équipe dans la paroisse, on a beaucoup de monde à la messe le dimanche normalement, 200, 250 personnes. Cet été, on a fait des messes à l’extérieur, avec le curé, sur le parvis de l’église. Pour nous, se réunir dans la foi, c’est essentiel. »

Christian Lépine, archevêque de Montréal, appuie la pétition. « C’est un cri de cœur ! dit Mgr Lépine. Pour plusieurs, la vie spirituelle est un besoin essentiel. C’est important d’écouter ce cri de cœur. »

Gérald Cyprien Lacroix, archevêque de Québec, est plus circonspect : « J’entends bien la souffrance des croyants et croyantes qui signent cette pétition et je partage leur désir de se retrouver pour célébrer leur foi en communauté. Nous sommes faits pour vivre la foi avec d’autres et nous avons besoin de ce contact humain et spirituel. Le sacrifice que nous faisons en ce moment est très exigeant. Mais compte tenu de l’ampleur des impacts de la COVID-19, j’estime nécessaire de participer à l’effort collectif exceptionnel pour enrayer la pandémie. Ainsi, le plus rapidement possible, peut-être pour Pâques, je l’espère aussi, nous pourrons nous rassembler dans nos églises en plus grands groupes. »