Les Québécois de 65 ans et plus pourraient-ils être vaccinés plus rapidement contre la COVID-19 en se rendant en Floride plutôt qu’en restant au Québec ? En théorie, ces snowbirds pourraient être admissibles à recevoir le vaccin dans la première phase de la campagne. En pratique, le cafouillis logistique en Floride semble laisser frileux les voyageurs saisonniers.

« Entre ce qu’ils disent aux États-Unis et ce qui va se produire, et à quelle date que ça va se faire en Floride pour tous les 65 ans et plus… On ne sait pas », a réagi Jean-Marc Nepveu au téléphone. Le Lavallois de 75 ans a l’habitude de se rendre tous les ans dans l’État américain, où il possède une résidence, mais a décidé de rester au Québec cette année, par prudence. La possibilité d’être vacciné plus rapidement ne le convainc pas de repartir.

Le début de la campagne de vaccination a été chaotique : des Floridiens ont fait la queue pendant des heures devant des centres se basant sur le principe du premier arrivé, premier servi. En tout, quelque 260 655 personnes ont maintenant reçu la première dose du vaccin dans le Sunshine State.

65 ans et plus en premier

Le gouverneur de la Floride, Ron DeSantis, a signé un décret pour inclure toutes les personnes de 65 ans et plus – environ le cinquième de sa population – dans la première phase d’inoculation, avec le personnel et les résidants des centres de soins de longue durée et les travailleurs de la santé ayant des contacts directs avec les patients.

PHOTO JOE BURBANK, ASSOCIATED PRESS

Ron DeSantis, gouverneur de la Floride

L’agence de santé américaine, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC), suggère plutôt la vaccination des personnes de 65 à 74 ans dans une troisième phase, après le personnel de la santé et les personnes en centres de soins en premier lieu, puis les plus de 75 ans et les travailleurs essentiels, comme les policiers et les pompiers, dans un deuxième temps.

La décision de la Floride est « mélangeante » pour la population, « sans explication claire », croit Marissa Levine, professeure de santé publique à l’University of South Florida.

« Il ne fait aucun doute que les 65 ans et plus sont plus à risque de mourir, explique-t-elle, ce qui en fait une très bonne approche si c’est pour prévenir les morts. Le problème, c’est que ce n’est pas le seul groupe d’âge qui a des complications graves ou de la mortalité en raison de la COVID-19. »

Plusieurs personnes plus âgées peuvent se protéger en réduisant leurs déplacements, alors que les travailleurs essentiels ont à se déplacer, ce qui explique la suggestion des CDC.

Marissa Levine, professeure de santé publique à l’University of South Florida

Admissibilité

Il n’est pas clair si tous les 65 ans et plus sont admissibles à la vaccination ou s’ils doivent avoir une preuve de résidence principale ou secondaire dans l’État. Les appels de La Presse au département de Santé de la Floride sont restés sans réponse ; dans un courriel, le service de communication s’est contenté de répondre que « quiconque qui peut prouver avoir 65 ans et plus est admissible à recevoir le vaccin sans frais en Floride », sans fournir plus de détails.

« Si les gens passent un certain temps en Floride, qu’ils soient du Canada ou d’un autre État, c’est logique qu’ils reçoivent le vaccin, puisqu’ils sont dans la communauté », note Marissa Levine, qui ne craint cependant pas une arrivée importante de gens de l’extérieur.

Le complexe de condos Century Village East, où vivent des snowbirds québécois, devait commencer à offrir le vaccin sur place mardi. Sur son site, la direction précise que les résidants saisonniers et les citoyens canadiens de 65 ans et plus sont admissibles à le recevoir, mais n’a pas voulu commenter.

Conrad Bernier, président du conseil d’administration du Park Lake Inc., au sud de Fort Lauderdale, est retourné à sa résidence de Floride en novembre dernier. La nouvelle de la vaccination des 65 ans et plus n’a pas causé d’émoi dans la petite communauté où la majorité des maisons mobiles appartiennent à des Québécois, mais qui est plutôt désertée ces jours-ci, dit-il. « On s’attend à pouvoir être vaccinés d’ici mars », estime l’homme de 78 ans, qui assure que les mesures sont prises pour éviter la propagation du virus dans la communauté.

La professeure Marissa Levine observe la situation en Floride avec inquiétude après la période des Fêtes. « Nos hôpitaux sont très occupés et inquiets du manque possible de personnel, souligne-t-elle. Tout le monde se demande ce qui va arriver dans les quatre à huit prochaines semaines. C’est très préoccupant. »

En Floride, le nombre de cas positifs est en hausse ; la moyenne mobile des 7 derniers jours indiquait 60,5 cas par 100 000 habitants. Au Québec, ce taux se situait à 30,2.