(Montréal) Le vaccin contre la COVID-19 n’existe pas encore, mais quand il sera là, qui l’aura en premier ? L’Agence de la santé publique du Canada a dévoilé cette semaine ses orientations préliminaires sur les populations à immuniser en priorité.

Le stock de futurs vaccins contre la COVID-19 ne devrait pas être suffisant au début pour répondre à la demande d’immunisation, souligne l’agence fédérale pour expliquer la nécessité de ses orientations.

Celles-ci sont basées sur les recommandations formulées par le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI), qui donne à l’Agence de la santé publique du Canada des conseils indépendants.

Des catégories prioritaires ont été établies, sans ordre de préséance entre les différents groupes : « il n’est pas possible d’établir une approche séquentielle tant qu’on ne connaît pas les caractéristiques du vaccin, les résultats des essais cliniques et le nombre de doses disponibles », est-il précisé.

Les groupes ciblés sont les suivants : les personnes risquant fortement de développer une forme grave de la COVID-19 ou d’en mourir, comme les personnes d’âge avancé et celles atteintes de maladies « à haut risque ». Ces maladies seront définies « à mesure qu’évoluera la base de données probantes ». Ceux qui habitent avec ces personnes à haut risque sont aussi visés.

Le CCNI, qui regroupe 15 experts, a aussi mis sur sa liste les personnes les plus susceptibles de transmettre la COVID-19 aux personnes à haut risque, comme les travailleurs de la santé dans les résidences pour personnes âgées.

Sont aussi inclus ceux qui contribuent au maintien de servi es essentiels au f nctionnement de la société — non encore définis — mais, par exemple, les policiers, les pompiers et les employés d’épiceries.

D’autres groupes sont visés, comme ceux chez qui l’infection pourrait avoir des conséquences disproportionnées, notamment dans les communautés autochtones, et ceux qui habitent loin des centres de soins.

Ces recommandations s’appliquent uniquement aux programmes d’immunisation provinciaux financés par des fonds publics, et non aux personnes souhaitant prévenir la COVID-19 à l’aide de vaccins non inclus dans ces programmes.

Elles s’appuient sur les données disponibles au moment des délibérations du CCNI, et pourraient donc évoluer.

« Nous savons que les Canadiens comprendront la nécessité d’accorder la priorité à certains groupes lors des premières semaines de la distribution des vaccins contre la COVID-19, jusqu’à ce qu’il y ait suffisamment de doses pour vacciner toutes les personnes qui le désirent », a déclaré l’Administratrice en chef de la santé publique du Canada, Dre Theresa Tam.

Le but est de réduire les conséquences graves de la COVID-19 et les décès, a souligné Dre Caroline Quach, pédiatre, microbiologiste-infectiologue au CHU Sainte-Justine et présidente du Comité consultatif national en immunisation de l’Agence de Santé publique du Canada.

« Les inégalités existantes, amplifiées par la pandémie, pourraient être exacerbées avec une attribution inéquitable du vaccin. Des efforts doivent être faits pour améliorer l’accès aux services d’immunisation et faire participer les populations systémiquement marginalisées dans la planification de programmes de vaccination ».

Au Québec

Ces orientations préliminaires du fédéral donnent une base solide, qui pourra ensuite être adaptée « à la sauce québécoise », a expliqué en entrevue le Dr Nicholas Brousseau, médecin-conseil à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).

Il précise qu’il s’agit de recommandations. « Il revient à chaque province, qui est responsable de la santé dans sa juridiction, d’émettre les catégories précises qui vont être utilisées. Je crois que ça va se ressembler de province en province, mais chacune pourra adapter les groupes en fonction de sa réalité propre ». Et aussi en fonction des caractéristiques du vaccin, quand elles seront connues : il peut être plus efficace pour certains groupes que d’autres, ce qui peut avoir un impact sur les priorités, fait valoir le médecin.

L’INSPQ travaille actuellement à réaliser ses propres recommandations à ce sujet, qui seront fournies au ministère de la Santé du Québec. C’est lui qui a le dernier mot sur les priorités d’immunisation, souligne Dr Brousseau.

L’INSPQ n’est pas un membre officiel du Comité c nsultatif national de l’immunisation (CCNI), mais certains de ses experts travaillent au sein de ce comité.

À quand le vaccin ?

Des efforts mondiaux sont en cours pour mettre au point un vaccin contre la COVID-19.

Au début du mois d’août, plus de 130 vaccins expérimentaux contre la COVID-19 en étaient à différents stades de développement par les universités et l’industrie, indique l’Agence de santé publique. De nombreux vaccins potentiels se sont avérés prometteurs au point que les essais cliniques sur les humains ont débuté.

Au Canada, plusieurs fabricants prévoient commencer des essais cliniques. Début septembre, un fabricant canadien a commencé les essais cliniques de phase 1, et plusieurs autres devraient parvenir à ce stade dans les prochains mois.

Mais la concurrence fait rage en ce qui concerne l’accès aux vaccins à l’échelle mondiale.

Toutefois, sept fournisseurs de vaccins expérimentaux prometteurs se sont engagés à fournir au Canada un stock de vaccins suffisant pour couvrir une partie ou la totalité de la population canadienne. Il reste à déterminer si ces vaccins seront sans danger, efficaces, autorisés au Canada, et s’ils seront recommandés par le CCNI.

Bien qu’aucun vaccin contre la COVID-19 n’ait encore été approuvé, Dre Tam continue de croire, « avec un optimisme prudent », que des vaccins sûrs et efficaces contre la COVID-19 seront disponibles au cours du premier trimestre de 2021.