Avant de partir pour des vacances méritées, le premier ministre François Legault devrait serrer quelques boulons dans la machine gouvernementale à déconfiner.

Comme ordonner la fermeture des bars dans des endroits clos.

Maintenant.

Pas dans une ou deux ou trois semaines.

Dans presque tous les États américains où on a déconfiné bars et restos intérieurs, on fait marche arrière. Ça ne fonctionne pas.

Les chiffres repartent à la hausse au Québec ? On fait comme si de rien n’était.

Mercredi, les chiffres à Montréal étaient les plus élevés depuis un mois. Et selon la Santé publique, la cause est essentiellement la contagion dans des bars.

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE

Dans presque tous les États américains où on a déconfiné bars et restos intérieurs, on fait marche arrière, indique notre chroniqueur.

Le taux de tests positifs a aussi augmenté. C’est mauvais signe.

Vous me direz : bah, c’est à peine 129 cas !

Sauf que depuis une semaine, les chiffres augmentent. Pas énormément, sans doute. Mais ils augmentent. Et les mêmes causes provoquant les mêmes effets, on est à risque de voir repartir les courbes.

On n’a pas encore compris ? On a déjà oublié les courbes exponentielles ? Vous vous rappelez ? 18 mars : 41 cas ; 19 mars : 75 cas ; 20 mars : 130 cas ; 21 mars : 185 cas ; 22 mars : 239 cas ; 23 mars : 345 cas. Puis le mois d’avril, entre 600 et 1000 nouveaux cas par jour. Et mai, à peu près comme ça.

Et tout ça en période de confinement à peu près total.

Si on ne veut pas rater le déconfinement, il faut faire des choix immédiatement.

Le personnel de la santé est épuisé. Les activités médicales « normales » reprennent peu à peu. Les listes d’attente sont longues. Et les urgences redeviennent… les urgences. C’est-à-dire très occupées.

Tout ça tient avec de la broche ; c’est demain, l’automne…

***

Cette fois, ce ne sera pas la faute à la malchance, à la semaine de relâche ou aux erreurs passées des gouvernements successifs.

Cette fois, c’est de nous qu’il s’agit.

Nous qui avons l’avantage de voir la situation juste au sud. Et ce qu’on voit, ce sont les effets d’un déconfinement précipité et mal foutu.

Mais les trucs qu’on ouvre et qui aident le virus à se propager, comme les bars, même si on les ouvre deux mois après la Floride… ça donne les mêmes résultats, non ?

Ben oui.

Quand je vois les files d’attente de trois à cinq (cinq !) heures devant l’Hôtel-Dieu pour se faire tester, je me dis que la Santé publique n’a plus ce sentiment d’urgence.

Or, tout ce qu’on a appris – ou admis – au sujet de ce coronavirus devrait nous l’avoir fait comprendre : le feu couve encore sous un décor estival.

Ce qu’on a appris ou finalement admis ? Comme le fait qu’il se transmet par aérosol. Que les éléments contagieux restent en suspens dans l’air à l’intérieur.

On ne peut pas, d’un côté, dire que les masques sont nécessaires et, de l’autre, laisser se dérouler des activités où les gens sont dans des espaces mal aérés sans masque.

Ça coûtera moins cher de compenser les pertes de ces commerces que de soigner des milliers de personnes et, peut-être, devoir retarder le retour en classe.

***

Le 20 avril, j’écrivais qu’on avait fait une erreur au sujet du port du masque. Je ne dis pas ça pour dire : je vous l’avais bien dit. Je n’ai aucune information privilégiée, je ne lis pas les revues médicales. Je ne faisais que me baser sur des informations publiques, notamment des autorités médicales asiatiques. Déjà, plusieurs médecins avaient écrit et dit ça. Si même un profane comme moi « sait » ça en avril, comment se fait-il qu’il ait fallu presque trois mois avant qu’on les rende obligatoires ?

Revenons à aujourd’hui.

Va-t-on attendre qu’il y ait 250 cas avant d’agir cette fois ? Et que tout reparte ?

Parce qu’on ne veut pas un nouveau confinement, parce qu’on veut protéger le droit des enfants à l’éducation, parce qu’on ne veut pas remettre le Québec sur pause, il faut cibler immédiatement les activités à risque, celles qui, de l’avis même de la Santé publique, font repartir à la hausse toutes les courbes.

Tout le monde aura de meilleures vacances après, y compris le premier ministre, si l’on décrète le dernier service.