(Ottawa) Justin Trudeau et certains autres leaders ont été rejoints jeudi par un allié plutôt inattendu dans leur élan de solidarité pour le partage d’un éventuel vaccin contre la COVID-19 : le président américain.

Donald Trump a offert un rare message de soutien, quoique bref, lors du sommet organisé jeudi par son bon ami Boris Johnson, premier ministre britannique. La rencontre virtuelle avait pour but de garantir aux pays pauvres un accès rapide et universel à un éventuel vaccin contre le coronavirus mortel.

M. Trump avait été totalement absent lors des récentes rencontres internationales virtuelles, y compris la grande réunion des Nations unies, la semaine dernière, et un évènement organisé notamment par l’Union européenne, en mai, pour consolider l’Organisation mondiale de la santé, que le président américain a décidé de ne plus soutenir financièrement.

Le président Trump a clairement indiqué jeudi qu’il faisait une apparition pour donner un coup de pouce au premier ministre Johnson. L’évènement ne figurait pas sur l’ordre du jour du président américain ni sur le communiqué de presse du sommet de Londres. « (M. Johnson) a appelé. Il a dit : “Pensez-vous que vous pourriez faire quelque chose, peut-être autour du bureau ovale ? ». J’ai dit : « Pourquoi pas ? ” Il se trouve juste derrière moi », a déclaré M. Trump, en montrant l’arrière-plan dans un message de moins de 40 secondes.

« Comme l’a montré le coronavirus, il n’y a pas de frontières. Il ne fait pas de discrimination. Il est méchant, il est vicieux, mais nous allons tous nous en occuper ensemble. C’est formidable de travailler en partenariat avec vous. Nous travaillerons fort. Envoyez mes salutations à Boris (Johnson) et bonne chance. Obtenons des résultats », a ajouté M. Trump, avant de couper la communication.

Trudeau plaide pour l’unité

À Ottawa, M. Trudeau a réaffirmé l’engagement du Canada envers les institutions multilatérales et les alliances internationales comme le G7, que le président Trump a dénigrées au fil des ans. « Même si certains de nos alliés, y compris les États-Unis, semblent se retirer du monde, le Canada s’engage de manière ferme et confiante, comme les Canadiens l’exigent », a déclaré le premier ministre.

M. Trudeau avait plus tôt soutenu qu’un éventuel vaccin contre la COVID-19 devrait être offert partout dans le monde si l’on veut éradiquer cette maladie. Le premier ministre a indiqué que la communauté internationale devait coopérer pour que les citoyens du monde entier aient accès aux vaccinations, « en particulier les plus vulnérables ». Il a indiqué que « la santé de nos concitoyens dépend de la santé de chacun, partout dans le monde ».

Le premier ministre s’est joint jeudi aux dirigeants de 50 pays et de grandes organisations, dont les philanthropes Bill et Melinda Gates, à cette conférence internationale des donateurs, qui espère recueillir près de 10 milliards pour GAVI, l’Alliance du vaccin, la principale agence de distribution de vaccins dans les pays moins développés.

M. Trudeau avait déjà annoncé l’engagement de 600 millions sur cinq ans du Canada envers cette agence GAVI, qui a depuis 20 ans vacciné 760 millions d’enfants et évité 13 millions de décès dans les pays les plus pauvres du monde.

« Les vaccins fonctionnent et 86 % des enfants du monde ont bénéficié de la vaccination systématique, a rappelé M. Trudeau jeudi. Et au milieu d’une pandémie mondiale, il n’a jamais été aussi important de renforcer les capacités de riposte aux éclosions de maladies et de travailler avec des organisations pour développer et administrer les vaccins. »

Conseil de sécurité et post-pandémie

Il s’agissait du troisième sommet international de M. Trudeau en une semaine. Le Canada fait campagne pour un siège non permanent au Conseil de sécurité des Nations unies, sur une plate-forme d’aide à la reconstruction du monde après la pandémie. Le Canada affronte la Norvège et l’Irlande pour un des deux sièges à pourvoir. Les 193 ambassadeurs auprès de l’ONU commenceront à voter par scrutin secret dans deux semaines, sans réunion plénière de l’Assemblée générale.

Gayle Smith, experte au Conseil de sécurité nationale sous l’administration Obama pour les épidémies d’Ebola en Afrique, estime que le leadership du Canada dans le monde après la pandémie sera absolument nécessaire, surtout à la lumière de la déchéance de son propre pays dans le monde. « Votre pays jouit d’une énorme crédibilité dans le monde entier en tant que pays auquel on peut toujours faire confiance », a déclaré Mme Smith, aujourd’hui présidente de l’organisation anti-pauvreté « One Campaign ».

Mme Smith n’attribue pas le mérite de cette réputation à M. Trudeau mais plutôt à la ministre du Développement international, Karina Gould, « véritable championne d’une réponse internationale audacieuse — et nous en sommes très heureux ».

« Elle a une vision et une détermination dont nous avons vraiment, vraiment, vraiment besoin », a déclaré Mme Smith, qui était elle aussi surprise de voir M. Trump débarquer au sommet de Londres. Mais son président « n’a pas dit grand-chose », rappelle-t-elle : il essayait probablement de redorer son image, écorchée par des manifestations sans précédent à l’échelle du pays et des critiques généralisées de son leadership — aussi bien des démocrates que de certains républicains, dit-elle.