Si vous avez l’intention de vous acheter un vélo, n’attendez pas. Certains modèles, comme des hybrides de moins de 1000 $ et des vélos pour enfants, sont déjà en rupture de stock et d’autres seront épuisés d’ici quelques semaines.

« Dépêchez-vous ! » lance Fabien Grignard, gérant chez Cycles Gervais Rioux, qui vend deux fois plus de vélos que d’habitude. « Du jamais-vu. »

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Fabien Grignard, gérant chez Cycles Gervais Rioux

« Si vous savez ce que vous voulez, achetez le plus vite possible », ajoute Chloé Néron, directrice des opérations chez Cycle Néron, une chaîne de magasins de vélos de la région métropolitaine. « Au nombre de vélos qu’on vend chaque semaine, on pense qu’on va en manquer. »

Cycle Néron, qui possède notamment des boutiques à Brossard, à Boucherville et à Saint-Lambert, a doublé ses ventes dans plusieurs de ses magasins, où les gens attendent en ligne à l’extérieur pendant parfois deux heures.

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Chloé Néron, directrice des opérations chez Cycle Néron

C’est notre 50e saison cette année et ce sont des chiffres qu’on n’a jamais vus.

Chloé Néron, directrice des opérations chez Cycle Néron

Bicycles Quilicot prévoit aussi manquer de vélos.

« Les stocks n’ont jamais été aussi bas dans toute notre histoire », affirme le propriétaire et PDG Marc-André Lebeau, qui détient sept magasins, entre autres à Montréal, Terrebonne et Sainte-Thérèse.

« On a fait beaucoup d’achats dans les derniers temps, mais il y a des catégories de vélos qui sont plus difficiles à avoir, notamment les vélos hybrides en bas de 1000 $. On en a encore, mais ça part vite. Et le stock de vélos pour enfants est pratiquement à sec. »

Un terrain de jeu étendu

Les Québécois sont plus nombreux que jamais à renouer avec la pratique du vélo en raison de la pandémie de coronavirus, qui décourage l’utilisation des transports en commun et contrecarre les projets de voyage à l’étranger. Le phénomène est particulièrement fort dans le Grand Montréal et à Québec.

La Ville de Montréal prévoit d’ailleurs réaménager son territoire pour donner une plus grande place aux cyclistes cet été, sachant que les Montréalais seront nombreux à passer leurs vacances en ville et que les mesures de distanciation seront en vigueur pendant encore longtemps.

« On a eu une très, très forte demande pour les vélos d’enfants quand on a annoncé la fermeture des écoles et que le beau temps a commencé à se pointer le nez », explique Louis Boissinot, vice-président des ventes chez Opus Bike, qui fabrique et assemble des milliers de vélos à Montréal.

« On en a vendu beaucoup plus que d’habitude. Après ça, les vélos hybrides de moins de 1000 $ ont connu un essor extraordinaire. C’est encore très fort aujourd’hui. » 

On va manquer de vélos au rythme où ça part. On est en train de vendre les vélos de l’année 2020 et de vider nos entrepôts.

Louis Boissinot, d’Opus Bike

Les vélos électriques sont aussi très demandés.

« Les détaillants sont dingues actuellement », constate Michel Leblanc, propriétaire de l’entreprise montréalaise Velec, qui est le plus important acteur dans le domaine du vélo électrique au Canada.

« Il y a une demande incroyable, dit-il. Je n’ai jamais vu ça. Si j’avais eu plus de vélos, on aurait fait plus. Mais on va faire deux fois les chiffres de l’an passé, qui était notre meilleure année. Les conteneurs qui arrivent d’Asie étaient planifiés et sont déjà presque tous vendus. »

M. Leblanc, qui fait concevoir ses vélos électriques à Chicoutimi, achète les composantes partout dans le monde et fait faire l’assemblage en Asie.

Une dizaine de conteneurs remplis de centaines de vélos Velec sont attendus à Montréal d’ici les prochaines semaines. « Selon moi, on ne se rendra pas loin », souffle M. Leblanc, qui prévoit livrer les derniers en juillet.

Yvan Lapointe vient de s’en acheter un. Il en rêvait depuis quelques années, mais il a décidé de passer à l’action. « Comme on a plus de budget parce qu’on ne voyagera pas au cours de la prochaine année et peut-être même des deux prochaines années, ma conjointe et moi, on a décidé de s’acheter des vélos électriques. Ça change une vie ! Ça fait dix jours que je l’ai, je pars une heure et demie, deux heures dans les montagnes, c’est extraordinaire. »

« Il n’y a plus rien »

Alors qu’il se vendait un vélo électrique par semaine chez Cycles Gervais Rioux avant la pandémie, il s’en vend un par jour depuis quelques semaines.

« Tous les vélos commencent à manquer », indique le gérant du magasin de l’avenue du Parc, à Montréal, Fabien Grignard. « Ça manque clairement dans certains modèles, surtout hybrides. Il n’y a plus rien nulle part. Les vélos de route d’entrée de gamme en carbone, il n’y a plus rien non plus. »

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Marc-André Lebeau, propriétaire et PDG de Bicycles Quilicot

Marc-André Lebeau, de Bicycles Quilicot, remarque que les stocks de vélos haut de gamme descendent assez vite aussi. « Ce n’est pas là où il y a de l’urgence en ce moment, mais ça descend quand même parce qu’il y a des gens qui vont dire au diable la dépense. Je voulais payer 1000 $, je vais payer 2000 $. »

Benoît Després vient d’acheter trois vélos de montagne, deux pour ses garçons de 11 et 14 ans et un pour lui. « On voulait trois vélos pareils, mais de couleur différente, précise- t-il. Finalement, on a deux modèles parce qu’il en manquait. Et lors de ma commande, c’étaient les derniers ; il n’en restait pas un de plus dans aucun modèle. »

L’engouement pour le vélo n’est pas unique au Québec. Aux États-Unis, plusieurs détaillants craignent aussi de manquer de vélos.

Dave Olson, propriétaire de la chaîne américaine Erik’s Bike, un des plus gros détaillants aux États-Unis, qui possède 30 magasins, a du mal à s’approvisionner. « Je vous dirais d’acheter n’importe quel vélo le plus vite possible. Si vous attendez, vous allez le regretter », dit-il au bout du fil depuis le Minnesota.