Le déconfinement de Montréal pourrait s’effectuer par étapes, et de façon décalée d’un secteur d’activité à un autre, en fonction du risque de transmission communautaire de la COVID-19 qui y sera détecté, a affirmé mardi la Direction régionale de santé publique (DRSP) de Montréal.

Il est donc « fort probable » que le calendrier de déconfinement soit revu. La possibilité d’un report de la date du 25 mai, déjà évoquée par le premier ministre François Legault lundi, fait l’objet d’une analyse de risques à la DRSP de Montréal, a confirmé sa tête dirigeante, la Dre Mylène Drouin. 

Si cette dernière n’a pas précisé la nature exacte de sa recommandation, elle a souligné que repousser la reprise des activités semble d’autant plus justifié que « la situation épidémiologique est très préoccupante » et que les chiffres publiés par l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) vendredi dernier « nous invitent à la prudence ».

« On est en train de regarder la réouverture des secteurs non pas dans un bloc monolithique. Il y a le volet des commerces, le volet des écoles et garderies. Il y a des secteurs à moindre risque, pour lesquels on pourrait avoir une réouverture sans augmenter la transmission communautaire », a indiqué la Dre Drouin lors d’une conférence de presse virtuelle. 

La réouverture des centres horticoles est un exemple de déconfinement qui n’a provoqué aucun sursaut de contamination virale, a-t-elle souligné. À l’inverse, les écoles pourraient se révéler des vecteurs de propagation du coronavirus. 

Visite montréalaise 

À compter de ce mercredi, la DRSP publiera une carte de Montréal démontrant la concentration de l’infection dans les différents coins de l’île. La carte permettra également de voir que les travailleurs de la santé sont surreprésentés dans les « quartiers chauds » de Montréal, selon la Dre Drouin. On compte actuellement 3743 travailleurs du réseau de la santé dans l’île qui ont été déclarés positifs, soit près de 20 % des cas confirmés. Ces personnes habitent notamment Montréal-Nord, Saint-Michel et Rivière-des-Prairies. 

Il y a des points chauds un peu partout à Montréal, mais des gros territoires où il y a quelque chose d’un peu plus diffus, c’est vraiment dans l’est et le nord de l’île.

La Dre Mylène Drouin, directrice de santé publique de Montréal

Le premier ministre François Legault ira constater de visu l’état de la situation à Montréal jeudi et vendredi. Pour la première fois depuis le début de la pandémie, il se rendra dans la métropole pour rencontrer notamment la mairesse Valérie Plante, la DRSP et des gestionnaires de CIUSSS et de CHSLD. 

Questionné au sujet de la performance des gestionnaires de la région, il s’est dit « quand même satisfait de ce que les gens font avec les ressources qu’ils ont ». 

« Ce n’est pas simple, mais je pense que les gens, actuellement, font ce qu’ils doivent faire », a-t-il affirmé.

« Allez vous faire tester » 

Les objectifs d’intensifier le dépistage, notamment dans les quartiers montréalais où l’on constate une hausse importante de contamination depuis déjà près de deux semaines, ne sont pas atteints. Deux nouvelles unités mobiles pour tester les personnes présentant des symptômes de la COVID-19 seront mises en service d’ici la fin de la semaine. 

Elles devaient l’être dès lundi dernier et ainsi prendre le relais du centre permanent de dépistage, mais il y a eu cafouillage à cause d’un manque de personnel et d’affluence. Le centre a fermé puis a été rouvert. L’objectif est d’effectuer jusqu’à 3000 tests par jour à Montréal, mais pour l’instant, ce sont 1900 prélèvements qui sont faits quotidiennement. 

Pour l’ensemble du Québec, la cible de 14 000 tests qui devait être atteinte vendredi dernier ne l’est toujours pas. Il est plutôt question de 10 000 tests en ce moment. 

« À beaucoup d’endroits, on manque de monde qui veut avoir un test. Donc, je fais un appel aujourd’hui, entre autres, aux gens qui sont dans les zones chaudes, donc Montréal, Laval : allez vous faire tester », a lancé M. Legault, mardi. 

Le directeur national de santé publique, le Dr Horacio Arruda, a ajouté que des tests seront maintenant également faits dans ces zones auprès de personnes qui n’ont pas de symptômes. Mais la Dre Drouin affirme que ce sont les personnes qui ont de la fièvre, de la toux, des difficultés respiratoires ou qui ont été en contact avec des personnes atteintes de la COVID-19 qui sont testées à Montréal.

Un bilan toujours plus lourd 

Pendant ce temps, le bilan continue de s’alourdir. Lundi, on dénombrait 19 878 cas dans l’île de Montréal, qui demeure l’épicentre de la pandémie au Québec et dans tout le Canada. La COVID-19 a fait jusqu’à maintenant 2003 victimes montréalaises. 

À l’échelle du Québec, 118 nouveaux décès ont été annoncés, dont 113 dans la grande région de Montréal. Le bilan des morts s’élève maintenant à 3131 à travers la province. 

En conférence de presse, le premier ministre Legault a brandi un graphique présentant le nombre de morts en fonction de la date réelle du décès, plutôt qu’en fonction de la date à laquelle celui-ci a été rapporté publiquement. « Il y a quand même une tendance positive, c’est-à-dire qu’il y a une diminution quand on les regarde journée par journée », a-t-il plaidé. 

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

François Legault, premier ministre du Québec, pendant le point de presse de mardi

Il est à noter que les décès survenus récemment n’ont pas été nécessairement tous comptabilisés et que la baisse soudaine des derniers jours doit être interprétée avec prudence. À preuve, un tableau semblable divulgué le 1er mai montrait environ 80 morts survenus le 29 avril. Dans la mise à jour rendue publique mardi, on voit maintenant 120 morts. 

Si l’on sait que la grande majorité des décès étaient des personnes habitant dans un CHSLD ou une résidence pour aînés, Québec ne diffuse plus depuis environ 10 jours la liste des établissements où il y a des cas de COVID-19 et leur nombre. On promettait une nouvelle version mardi, mais on l’attend toujours. 

Le nombre cumulatif de cas confirmés de COVID-19 s’élève maintenant à 39 225 – une hausse de 756 qui est modérée compte tenu de l’augmentation du dépistage, a dit le premier ministre. De ce nombre, un peu plus de 10 000 sont des personnes guéries. D’autres indicateurs montrent une situation stable dans l’ensemble, selon François Legault : 1841 personnes sont hospitalisées, seulement trois de plus que 24 heures plus tôt. Parmi elles, 186 se trouvent aux soins intensifs (- 7), un chiffre qui « diminue tranquillement » depuis quelques jours, a observé le premier ministre.